Le chaos urbanistique

01/06/2023 mis à jour: 04:29
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C’est un des grands malheurs de l’Algérie, il suffit d’une colère de la nature pour que s’effondrent des bâtisses comme des châteaux de cartes, en premier celles construites sur des lits d’oued, des terrains inadéquats et les autres non respectueuses des normes techniques. 

Les tares du bâti privé sont connues depuis toujours et le problème est qu'elles se perpétuent toujours. Bousculés par l’urgence de faire face à une énorme demande, les pouvoirs publics ont laissé faire, se contentant d’une maigre réglementation et ne poussant pas trop loin le suivi et le contrôle. 

Devenu la règle, le quantitatif s’est même élargi au niveau des programmes publics, plus particulièrement ceux de l’AADL. Certes, des milliers de foyers algériens ont pu accéder au logement grâce à cette formule, et certaines cités ont été des réussites architecturales. 

Mais de graves ratés subsistent tel, à titre d’exemple, celui de la cité Haouch Errich, près de Meftah. Des dizaines et des dizaines de tours de dix étages chacune qui s’accrochent à une terre agricole en un alignement incertain, quelques-unes frôlant dangereusement un ravin mitoyen à peine de cinq à six mètres. 

Une énorme cité-dortoir, sans aucun service public, même pas un transport pour y accéder pour les futurs locataires travaillant dans les villes environnantes, jusqu’à Alger. Bien des bénéficiaires ont refusé de rejoindre cette agglomération de la honte, qui risque de devenir un concentré de maux sociaux. D’autres cités du même genre sont programmées pour être livrées prochainement un peu partout dans le pays. 

Seront-elles concernées par les mesures édictées récemment par l’Etat en direction des constructions illicites privées ? Dernièrement, en Conseil des ministres, a été prise la décision de «réviser la loi sur l’urbanisme sur la base d’une véritable planification urbanistique afin d’éradiquer définitivement l’anarchie et pour que toutes les opérations de construction et de réalisation soient soumises, à l’avenir, à un encadrement juridique strictement réglementé, notamment dans les villes». 

Il a été, par ailleurs, enjoint aux ministres de l’Intérieur et de l’Habitat de veiller à la création d’une commission centrale d’étude des dossiers des constructions illicites accompagnée de la mise sur pied d’une police de l’urbanisme dans le cadre du projet de révision de la loi sur l’urbanisme. La directive est que la décision de démolition ne doit pas être prise systématiquement. Le pays est donc dans l’attente de ce vaste programme dont on ne sait s’il sera en mesure de freiner la descente aux enfers tant le mal est profond. 

Ce qui frappe le visiteur des villes et villages, hormis les centres-villes, généralement anciens ou historiques, c’est l’enchevêtrement sans limites, sans ordre ni esthétisme de constructions de toutes sortes et de tous acabits, séparées inégalement par des routes sinueuses, souvent sans bitume, la plupart du temps crevassées. Dans ce bâti quelconque, ce qui domine ce sont les constructions illicites, des plus finies et cossues aux plus précaires, celles-ci visibles par la couleur des briques qui les confectionnent, apparentes sans cimentation ni ravalement et d’une horreur absolue. 

Depuis l’indépendance, aucun gouvernement n’a pu y mettre un terme, ni par les textes, ni par la pédagogie, encore moins par la répression même si diverses opérations ont éradiqué un bon nombre de bidonvilles dans le pays. Pour les experts, l’absence de contrôle et les passe-droits et la corruption en sont les principales causes.

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