Israël continue d’affamer Ghaza au mépris du droit international : «La famine des enfants est la marque d’un génocide»

14/03/2024 mis à jour: 06:54
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Photo : D. R.

Malgré les opérations humanitaires qui se multiplient pour tenter d’approvisionner la bande de Ghaza, les quantités de vivres qui réussissent à entrer dans l’enclave assiégée demeurent extrêmement insuffisantes. «Il est impensable qu’en 2024, dans un monde qui produit plus que suffisamment de nourriture, des enfants palestiniens meurent de faim», déplore l’ONG Defence For Children.

Au troisième jour du Ramadhan, correspondant au 159e jour de la guerre contre Ghaza, la situation est toujours aussi apocalyptique dans l’enclave palestinienne. A la clé, une série de raids assassins qui ont fait un grand nombre de victimes. Le ministère de la Santé à Ghaza a recensé une dizaine de massacres commis en vingt-quatre heures, entre mardi soir et mercredi matin, faisant 88 morts et 135 blessés.

Le bilan global de l’offensive israélienne s’élève ainsi à 31 272 morts et 73 024 blessés, indique la même source. Parmi les opérations les plus violentes enregistrées ce mercredi, des frappes massives menées dans la ville de Ghaza hier après-midi qui ont fait 15 morts, dont deux femmes et sept enfants, rapporte l’agence Wafa.

Ces attaques ont ciblé une zone d’habitation à Haï Al Daraj où «sept citoyens sont tombés en martyrs dont trois enfants, et plusieurs autres ont été blessés», note l’agence de presse palestinienne.

A Haï Al Zaytoun, au sud-ouest de la ville de Ghaza, l’aviation israélienne a ciblé ce même mercredi une maison appartenant à la famille Azzam, tuant huit personnes dont deux femmes et quatre enfants. Tell Al Hawa, un quartier situé à l’ouest de la ville de Ghaza, a été lui aussi le théâtre d’une offensive meurtrière hier.

Des unités d’artillerie israéliennes y ont tiré quatre obus à proximité de l’hôpital Al Qods affilié au Croissant-Rouge palestinien. Cette attaque a fait cinq morts dont des enfants, ainsi que plusieurs blessés d’après Wafa. Toujours à Ghaza-City, des frappes ont visé également une maison du quartier Al Sahaba, touchant plusieurs civils.

L’aviation israélienne a bombardé par ailleurs les régions nord et ouest de Khan Younès ainsi que la périphérie de la localité de Hamad, dans le même gouvernorat, indique Wafa sans donner plus d’informations sur ce raid. La même source précise que la veille, soit dans la nuit de mardi à mercredi, au moins 10 Palestiniens ont été tués dans un bombardement à Deir Al Balah, au centre de la bande de Ghaza.

Six morts en Cisjordanie

Des morts et des blessés ont été également enregistrés au cours de la journée d’hier dans plusieurs villes en Cisjordanie. Selon l’agence Wafa, un mineur de 15 ans, Moustafa Ahmed Taleb, a été tué par balles hier matin devant un check-point israélien à l’ouest de la ville de Beit Jala, dans le gouvernorat de Beit Lahm.

Le jeune garçon a été abattu suite à une «attaque au couteau» selon des sources médiatiques. «Des témoins oculaires ont rapporté que les forces d'occupation ont laissé l’enfant se vider de son sang sans lui prodiguer les premiers soins», affirme l’agence Wafa.

Sur la foi d’un communiqué de la police israélienne, l’AFP a indiqué que «deux membres des forces de sécurité israéliennes ont été blessés mercredi dans une attaque au couteau commise par un Palestinien de 15 ans au niveau d'un barrage situé au sud de Jérusalem». «Cette attaque a eu lieu vers 8h15 au niveau du "check-point des tunnels", séparant la périphérie de Jérusalem de la Cisjordanie occupée, où l'adolescent est arrivé en vélo», détaille l’AFP.

Ahmed Taleb «a été neutralisé par un soldat et un garde de sécurité qui ont tiré sur lui et il a ensuite été déclaré mort», ajoute l’agence française. Avec la perte du jeune résistant palestinien, «le bilan des morts en Cisjordanie, y compris à Jérusalem, s'élève depuis mardi à six, dont deux enfants : Rami Hamdan Al-Halhouli (13 ans) du camp de Shuafat, Zaid Khelaifa (23 ans) et Abdullah Assaf (16 ans), près de la ville d'Al Jib, au nord-ouest de Jérusalem occupée, et les deux jeunes hommes, Rabi' al-Nursi et Mahmoud Abu al-Hija, dans la ville de Jénine», relève l’agence Wafa.

Outre les effroyables pertes humaines qui continuent d’endeuiller les familles palestiniennes, l’actualité dans les Territoires occupés reste dominée par le spectre de la famine qui menace la majorité de la population de la bande de Ghaza.

«Il n'y a nulle part au monde une région comme la bande de Ghaza, où toute une population est menacée par une famine provoquée par l'homme», s’est indigné le chef du Programme alimentaire mondial (PAM) pour la Palestine, Matthew Hollingworth, cité par l’APS.

Au moins 27 décès dus à la famine

La directrice exécutive du PAM, Cindy McCain, a déclaré de son côté que l’organisme onusien qu’elle dirige «est gravement préoccupé par les conditions humanitaires à Ghaza, en particulier dans le nord, en proie à une catastrophe humanitaire».

«Si nous n'augmentons pas de façon exponentielle le volume d'aide entrant dans les zones du nord de Ghaza, la famine est imminente», a-t-elle prévenu. «Nous avons besoin que 300 camions d'aide alimentaire entrent dans Ghaza», insiste la directrice du PAM. Selon le ministère de la Santé à Ghaza, au moins 27 Palestiniens sont morts de malnutrition ces derniers jours. «Le monde sera témoin de nombreux décès dus à la faim dans les prochains jours», a averti le même ministère dans un communiqué.

L’ONG Defence For Children est persuadée que le nombre de décès dus à la faim est plus élevé que les 27 officiellement annoncés. «On craint que le nombre réel de décès dus à la famine soit beaucoup plus élevé, car de nombreux Palestiniens, en particulier dans le nord de la bande de Ghaza, sont confrontés à la famine et sont presque entièrement coupés de l’aide humanitaire limitée qui entre dans la bande de Ghaza par le point de passage de Rafah», a estimé hier cette ONG, déclaration relayée par l’APS.

«Il est impensable qu’en 2024, dans un monde qui produit plus que suffisamment de nourriture pour tous, des enfants palestiniens meurent de faim», s’émeut Ayed Abu Eqtaish, responsable au sein de Defence For Children International-Palestine. «La famine des enfants est la marque d’un génocide et un choix politique délibéré (de l'entité sioniste).

Il est complètement fou», a-t-il dénoncé. Les autorités sionistes, déplore-t-il, «continuent d’interdire et de restreindre l’accès à la nourriture et à d’autres produits vitaux pour une population affamée, alors que la communauté internationale reste les bras croisés».

Le PAM revient dans le nord

Le ministère palestinien des Affaires étrangères considère pour sa part que l’entité sioniste utilise l'aide humanitaire comme «carte dans les négociations».

Le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, a rejoint à son tour ces voix indignées, accusant Israël d’utiliser la faim «comme arme de guerre». «Alors que nous condamnons cela en Ukraine, nous devons utiliser les mêmes mots pour ce qui se passe à Ghaza», a-t-il martelé avant-hier dans un discours devant le Conseil de sécurité de l’ONU.

Au milieu de ce chaos déshumanisant, une légère éclaircie est annoncée au nord de la bande de Ghaza qui subit plus que dans les autres régions de l’enclave les affres de la famine : le PAM y a repris la livraison de son aide humanitaire.

«En accord avec les directives du gouvernement israélien, six camions transportant l'aide humanitaire du Programme alimentaire mondialsont entrés la nuit dernière (mardi) dans le nord de la bande de Ghaza via la ''porte 96''' de la barrière de sécurité», a indiqué l'armée israélienne dans un bref communiqué repris par l’AFP.

Avant leur entrée par la «porte 96», les camions ont été inspectés au terminal de Karam Abou Salem a précisé la même source. Sur le réseau social X, le PAM s’est félicité de cette opération en signalant que pour la première fois depuis le 20 février, ses convois ont atteint le nord de Ghaza pour y livrer une aide au profit de 25 000 personnes.

«Avec la population du nord de Ghaza qui est au bord de la famine, nous avons besoin que l'aide entre tous les jours et de points d'entrée situés directement dans le nord de Ghaza», plaide le PAM.
 

 

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