Investissements émiratis en Algérie : Emarat Dzayer Steel, un projet fantôme de 1,16 milliard d’euros

18/02/2024 mis à jour: 18:18
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Photo : D. R.

Annoncée en grande pompe après sa validation du temps de la «issaba», cette joint-venture allait, entre autres, créer de l’emploi, fabriquer du rail et éliminer même l’importation des pipelines qui servaient l’industrie pétrolière et hydraulique. Janvier 2024 : rien n’a été fait.

Lors de sa dernière visite à Sider El Hadjar, le ministre de l’Industrie et de la Production pharmaceutique a assisté à une présentation du plan de développement de Sider El Hadjar. Le projet Emarat Dzayer Steel (EDS), un partenariat algéro-émirati qui traîne depuis le 28 mars 2018, date de sa validation par le Conseil des participations de l’Etat (CPE), a été cité comme facteur de blocage pour le développement du complexe.

En effet, plusieurs projets que devaiet réaliser EDS n’ont pas vu le jour six années après. «Les projets cités dans la présentation sont tributaires de la résiliation du contrat de partenariat Emarat Dzayer Steel (EDS), qui était sensé développer la même gamme de produits, mais sans succès depuis 2018», lit-on dans le document de l’exposition, à laquelle ont pris part, aussi, les autorités locales.

Annoncée en grande pompe après sa validation du temps de la «issaba», cette joint-venture allait, entre autres, créer de l’emploi, fabriquer du rail et éliminer même l’importation des pipelines qui servaient l’industrie pétrolière et hydraulique.

Janvier 2024 : rien n’a été fait. «Sous la loupe, ce partenariat est beaucoup plus en faveur du partenaire étranger que de l’Algérie», analysent plusieurs économistes. Le groupe Sider et Emarat Dzayer Group (EDG) avait eu l’aval du Conseil des participations de l’Etat pour la création, en partenariat, d’une société mixte 51/49 dont le coût du projet a été estimé à 1,16 milliard d’euros.

Financé à hauteur de 30% sur fonds propres et 70% sur crédits bancaires, à un taux de 3,5% d’intérêt, ce nouveau complexe, dénommé Emarat Dzayer Steel, est installé au sein même du complexe Sider El Hadjar de Annaba. D’un montant de 812 millions d’euros (70%), le dossier du crédit a été déposé pour étude au niveau des banques algériennes.

Quant au reste, soit 348 millions d’euros (30%), il devait être apporté par les deux partenaires : 177,5 millions par l’Algérie et 170,5 millions par le partenaire émirati. «Finalement, l’Algérie assure le crédit de 812 millions d’euros via ses banques, ajoute un apport en cash-flow de 177,5 millions d’euros, et son partenaire étranger n’apporte que 170,5 millions d’euros dans un gigantesque projet dont il assure le management.

Au final, l’Algérie participe avec un total de près d’un milliard d’euros et l’Emarat avec 170 millions. Pourquoi alors nous ne faisons pas appel aux entreprises chinoises, notamment les fournisseurs de Sonatrach, pour en faire un partenariat win/win sur tous les plans ? Le cas échéant, Sider El Hadjar est prioritaire pour bénéficier de cet effort financier afin de réaliser son plan de développement, d’autant plus qu’il est la propriété du groupe Sider, le partenaire des Emiratis», s’interrogent des économistes.

Des chiffres impressionnants

En matière d’emploi et de formation, ce partenariat «fictif» avait prévu, selon sa fiche technique, le redéploiement de la totalité des effectifs de la filiale du groupe Sider, tuberie sans soudure (TSS), la création progressive de 1670 nouveaux postes de travail directs, répartis sur 5 ans et autant de nouveaux emplois indirects.

La concrétisation de ce projet devait passer par deux phases. «La première comprend le revamping de la ligne TSS (14 pouces) afin de passer d’une capacité de 30 000 t/an à 50 000 t/an. Le coût est évalué à 3 milliards de dinars (20 millions d’euros). Les délais de sa réalisation sont estimés à 14 mois.

L’acquisition d’une ligne de laminés marchands d’une capacité de 300 000 t/an et d’un bain de galvanisation à chaud pour un coût global de 11 milliards de dinars (78 millions d’euros). Les délais de sa réalisation sont estimés à 16 mois.

L’acquisition d’une ligne de tubes sans soudure pour la gamme de diamètres de 3 à 10 pouces, d’une capacité annuelle de 300 000 t pour un coût global de 42 milliards de dinars (300 millions d’euros) et un délai de réalisation estimé à 20 mois», détaillent nos sources. Depuis l’annonce de la création de ce mégaprojet, l’Algérie importe toujours les pipelines.

Son principal fournisseur : la Chine. Selon toujours la fiche technique de ce projet «fantôme», la seconde phase consiste en l’acquisition d’un module de réduction directe (DRI) d’une capacité de 2,5 millions t/an pour un coût global de 64,4 milliards de dinars (462 millions d’euros) et un délai de réalisation estimé à 36 mois.

Le DRI produit de la matière première pour alimenter l’aciérie électrique. Le surplus doit être commercialisé sur le marché national. L’acquisition d’une aciérie électrique d’une capacité de 1,5 millions t/an de demi-produits (billettes, blooms…), pour un coût global de 28 milliards de dinars (200 millions d’euros) et un délai de réalisation estimé à 24 mois.

L’acquisition d’un laminoir pour la production de profilés moyens et lourds de la gamme des 80-320 mm d’une capacité de 600 000 t/an pour un coût global de 14 milliards de dinars (100 millions d’euros) et un délai de réalisation estimé à 24 mois.

Encore une fois rien n’a été fait, hormis le recrutement en 2021 d’un bureau d’affaires étranger pour accompagner le début de la création de ce mégaprojet mort-né. Plusieurs demandes de résiliation de ce contrat de partenariat avec les Emiratis ont été transmises aux pouvoirs publics à l’effet de libérer le plan de développement du complexe Sider El Hadjar. Une réponse se fait toujours attendre. 
 

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