Informations insistantes sur des mandats d’arrêt de la CPI : Netanyahu met en garde contre «un précédent dangereux»

29/04/2024 mis à jour: 20:14
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Benyamin Netanyahu pourrait faire l’objet d’un mandat d’arrêt délivré par la CPI - Photo : D. R.

Réagissant aux informations persistantes sur des mandats d’arrêt imminents délivrés par la Cour pénale internationale (CPI) contre lui et plusieurs dirigeants politiques et sécuritaires israéliens, le Premier ministre de l’Etat hébreu, Benyamin Netanyahu, met en garde en disant : «Sous ma direction, Israël n’acceptera jamais une tentative, de la part de la CPI, de saper le droit fondamental du pays à se défendre (…).»

Alors que des informations persistantes sur l’imminence du lancement de mandats d’arrêt internationaux par la Cour pénale internationale (CPI) contre les dirigeants israéliens, le Premier ministre de l’Etat hébreux, Benyamin Netanyahu, sort de sa réserve pour avertir, dans un message publié sur Telegram, que «toute décision n’aurait aucun effet sur les actions entreprises par Israël, mais pourrait être un précédent dangereux».

Le Premier ministre a lancé une véritable mise en garde en déclarant : «Sous ma direction, Israël n’acceptera jamais une tentative, de la part de la Cour pénale internationale, de saper le droit fondamental du pays à se défendre (…).» Et d’ajouter : «Alors que les décisions prises par la Cour, à La Haye, n’affecteront pas les actions qui sont celles d’Israël, elles viendront établir un précédent dangereux qui menace à la fois les soldats et les personnalités publiques.»

La déclaration de Netanyahu est intervenue juste après la publication, par la Chaîne 12, l’une des chaînes d’information les plus suivies en Israël, faisant état «d’inquiétudes de plus en plus» pesantes «de la possibilité que des mandats d’arrêt soient émis par la CPI à l’encontre de Netanyahu, de son ministre de la Défense, Gantz Gallant, ainsi que son chef d’état-major, Herzi Helvi, et d’autres hauts responsables politiques et sécuritaires, pour des violations présumées du droit international à Ghaza».

Le média avait également révélé que ces informations ont fait l’objet d’«une discussion en toute urgence» au niveau du  bureau  du Premier ministre israélien, sans pour autant donner plus de détails.

Même s’il n’est pas membre de la CPI et qu’il ne reconnaît pas cette juridiction, Israël a fait l’objet de nombreuses plaintes déposées par des ONG et des Etats signataires du Statut de Rome, dont l’Autorité palestinienne, pour des «crimes de génocide», «de guerre», «d’agression» et «contre l’humanité»  commis par l’entité sioniste lors de l’assaut menée contre Ghaza, au lendemain de l’attaque du 7 octobre.

Ces plaintes se sont ajoutées à une même procédure qui était pendante depuis 2018. La Chaîne 12 a précisé également que les mandats d’arrêt attendus seront probablement émis dans le contexte de la crise humanitaire dans la bande de Ghaza, en plus des déclarations internationales concernant la violation par Israël du droit international, en faisant référence à la guerre dévastatrice contre Ghaza et aux violations du droit international.

Citant des spécialistes du droit, la même source a estimé que «les professionnels du droit qui ont assisté à la réunion d’urgence limitée, à laquelle ont pris part les ministres des Affaires stratégiques Ron Dermer, le juge Yariv Levin et le ministre des Affaires étrangères Israël Katz, ont tenté de faire obstacle à la décision en prenant des mesures urgentes de dernière minute, devant le tribunal lui-même et devant des partis politiques influents, mais il apparaît que ces efforts n’ont pas porté leurs fruits».

Note interne

Révélations réaffirmées samedi dernier par le journal israélien Maariv en citant des «sources bien informées» sans les nommer. «Netanyahu était anormalement effrayé et nerveux à l’idée d’un mandat d’arrêt émis contre lui par la Cour pénale internationale», a écrit le journal en soulignant qu’«au cours des derniers jours, Netanyahu a noué de nombreux contacts avec des dirigeants et responsables internationaux dans le but de faire pression pour empêcher l’émission du mandat d’arrêt, notamment auprès du président américain, Joe Biden».

Selon les sources du journal, «Netanyahu se rend compte que le mandat d’arrêt international pourrait faire de lui une personne persécutée, c’est pourquoi il s’investit chaque jour dans des efforts pour le contrecarrer».

Pour les mêmes sources, «il n’est pas improbable que la flexibilité de la position israélienne concernant la question de l’accord d’échange de prisonniers et de détenus entre le mouvement Hamas et l’Etat occupant, y compris l’ouverture à la question de la fin définitive de la guerre à Ghaza, fasse partie des tentatives visant à contrecarrer la publication du mémorandum».

L’Etat hébreu semble se rendre à l’évidence que les graves violations du droit international par ses forces armées, encouragées par de nombreux dirigeants politiques à Ghaza, depuis presque sept mois, ne peuvent passer inaperçues ou jouir de l’impunité. Même à Washington, un des pays les plus liés à Israël et celui qui le défend et vient de lui accorder une aide militaire de 26 milliards de dollars, de plus en plus de voix s’élèvent contre la manière avec laquelle Tel-Aviv mène la guerre contre Ghaza.

En effet, selon une note interne, consultée par l’agence britannique de presse Reuter, «de hauts responsables du département d’Etat américain ont informé le secrétaire Anthony Blinken qu’Israël aurait violé le droit international dans sa guerre contre la bande de Ghaza». Cependant, a indiqué l’agence, «ils n’ont pas trouvé d’assurances crédibles ou documentées de la part d’Israël selon lesquelles celui-ci utilise des armes américaines conformément au droit humanitaire international.

Cela a donné lieu à une présentation conjointe de quatre bureaux du département d’Etat américain, à savoir : démocratie, droits de l’homme et travail, population, réfugiés et migrations, justice pénale mondiale et affaires des organisations internationales, sérieusement préoccupés par le non-respect du droit international humanitaire pendant la poursuite par Israël de la guerre à Ghaza». Reuters a écrit que «l’évaluation menée par les quatre bureaux a révélé que les assurances israéliennes ne sont ni crédibles ni fiables».

Cette évaluation, a ajouté l’agence, «cite huit exemples d’actions militaires israéliennes» qui, selon les responsables, soulèvent de sérieuses questions sur de potentielles violations du droit humanitaire international.

Ces violations comprenaient : «Des frappes répétées sur des sites et des infrastructures protégés, ainsi que des niveaux déraisonnablement élevés de dégâts civils pour des gains militaires, et peu de mesures ont été prises pour enquêter sur les violations ou pour demander des comptes aux responsables des dommages civils massifs et du meurtre de travailleurs humanitaires et des journalistes à un rythme sans précédent.»

Cette évaluation a précisé l’agence, cite également 11 cas d’actions militaires israéliennes «qui, selon les responsables, ont vu des restrictions arbitraires sur l’aide humanitaire, y compris le refus d’admettre des camions entiers d’aide en raison d’un seul article à double usage, des restrictions artificielles sur les inspections, ainsi que des attaques répétées contre des sites militaires. L’humanitaire n’aurait pas dû être attaqué».

Reuters a écrit en outre que «d’autres responsables du département d’Etat américain ont soutenu les affirmations d’Israël selon lesquelles il adhère au droit international», avant d’évoquer «une autre évaluation», que l’agence dit avoir consultée, émanant du Bureau des affaires politiques et militaires, qui s’occupe de l’aide militaire américaine et des transferts d’armes, qui a averti Blinken sur le fait que «la suspension des ventes d’armes américaines limitera la capacité d’Israël à faire face aux menaces potentielles en dehors de son espace aérien et exiger que Washington reconsidère toutes les ventes actuelles et futures à d’autres pays de la région».

A ce titre, a souligné l’agence, «le bureau a déclaré dans son évaluation que toute suspension des ventes d’armes américaines susciterait des provocations de la part de l’Iran et de ses groupes alliés», alors que «le mémorandum n’aborde pas directement les garanties qu’Israël doit fournir».

L’agence a rappelé qu’au mois de février de l’année en cours, le président Joe Biden a publié un mémorandum sur la sécurité nationale exigeant que Blinken soumette un rapport au Congrès d’ici le 8 mai, déterminant s’il avait trouvé des «garanties israéliennes crédibles» selon lesquelles son utilisation d’armes américaines ne viole pas la loi américaine ou internationale.

Le 24 mars 2024, au moins sept bureaux du département d’Etat américain avaient envoyé à Blinken leurs contributions à un «mémorandum d’options» préliminaire, et «certaines parties du mémorandum, qui n’avaient pas été divulguées auparavant, ont été scellées». 

Multiplication des plaintes

Le procureur de la CPI, Karim Khan, avait déclaré au mois d’octobre dernier que le tribunal avait «l’autorité nécessaire pour examiner tout crime de guerre  potentiel» commis par les Israéliens à Ghaza.

Moins d’un mois après, l’Afrique du Sud a lancé devant la Cour internationale de justice (CIJ), la plus haute juridiction onusienne, sa plainte contre Israël pour «génocide» et sa demande d’indications de mesures provisoires contre Tel-Aviv contre les mêmes faits.

La Cour a déjà statué sur les mesures, alors que sur le fond, l’examen est toujours pendant. D’autres plaintes pénales pour les mêmes faits ont été déposées, au mois de mars dernier, par «plusieurs personnes» en Suisse, contre le président israélien, Isaac Herzog, alors qu’il était sur le sol helvétique, pour prendre part au WEF (Forum économique mondial), à Davos.

La procédure a été engagée auprès du procureur cantonal de Bâle-Ville, et des polices cantonales de Bâle-Ville, Berne et Zurich. Le procureur avait alors indiqué que ces plaintes «étaient examinées selon la procédure habituelle» et a expliqué être «en contact» avec le ministère suisse des Affaires étrangères «afin d’examiner la question de l’immunité» du président israélien.

Dans leur communiqué, les plaignants ont expliqué que l’immunité pouvait être levée dans des «circonstances précises» lorsqu’il s’agit de «crimes contre l’humanité».

Pour leur plainte, ils ont affirmé que «les conditions sont remplies» et révélé avoir demandé «la mise en place d’une procédure pénale approfondie» en Suisse contre le président israélien pour «génocide» et «crimes contre l’humanité», en parallèle aux accusations de «génocide contre le peuple palestinien à Ghaza», portées par l’Afrique du Sud contre Israël devant la CIJ. S. T.

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