Le Professeur Michel Martini, un des pères de la chirurgie orthopédique en Algérie, est décédé jeudi dernier à l’âge de 98 ans, à Paris, selon ses proches.
Son engagement en faveur de Guerre de Libération nationale lui a valu plusieurs arrestations, une assignation à résidence à Médéa, un séjour à la prison d’Oran puis une expulsion d’Algérie.
Dans un message de condoléances publié sur le site de la Société algérienne de chirurgie orthopédique et de traumatologique (Sacot), il est rappelé que le Pr Martini a été à l’origine de la création du service de chirurgie orthopédique de Douéra. «Il avait opté pour une Algérie libre et a participé à l’émergence d’une élite de chirurgiens orthopédistes à l’indépendance nationale», a rappelé la Sacot.
Michel Martini est né le 8 février 1925 à Paris. Après des études secondaires brillantes, il s’inscrit à la faculté de médecine où il passe son premier concours d’internat à l’âge de 21 ans, selon le site spécialisée Santé Maghreb. En octobre 1946, il accompagne son père venu visiter une de ses succursales à Alger, découvrant par la même occasion les villes d’Alger, Constantine, Biskra, Touggourt et Ouargla.
De retour en France, il poursuit ses études de médecine et est nommé interne en 1949. Il choisit la chirurgie et passe ainsi quatre ans et demi dans différents services de chirurgie parisiens. En mai 1954, il séjourne de nouveau en Algérie. Il y retourne pour remplacer pour une période d’un mois le docteur Hamida Bentami, chirurgien à l’hôpital de Miliana. Après ce remplacement, il retourne à Paris terminer son internat à l’Institut Gustave Roussy. Puis, il passe en décembre 1954, à Alger, le concours de chirurgien des hôpitaux de l’intérieur. Il sera, par la suite nommé médecin-chirurgien à Chlef (ex-Orléansville) et c’est là qu’il fit la connaissance de Germaine Tillion et de plusieurs membres du Parti communiste algérien (PCA).
Ces connaissances vont influencer son engagement pour la Révolution algérienne, puisqu’il accueillit clandestinement dans son service plusieurs membres du PCA, dont un homonyme de l’ancien président feu Mohamed Boudiaf. C’est par le docteur Masseboeuf, militant communiste de la vallée du Chelif, qu’il est amené dès la fin de 1955 à recevoir des blessés et à cacher des militants sous couvert de raisons médicales. Il aida, ainsi, aussi bien les combattants de l’ALN que les partisans communistes qui mettent en place un maquis symbolique dans cette région.
Avec le concours de son épouse qui est anesthésiste, il contribue à la mise en place de maquis des Combattants de la libération au-dessus d’Orléansville. Ses activités en faveur de la Guerre de Libération seront à l’origine de son arrestation et son assignation à résidence à Sidi Mahdjoub, près de Médéa, par la DST le 5 juillet 1956. Michel Martini fut aussi conduit à Alger, à la villa Sésini, où les paras pratiquent les interrogatoires et la torture. Inculpé d’«association de malfaiteurs», Michel Martini est envoyé à la prison d’Oran, où il sera embastillé de septembre 1956 à août 1957. Au bout de dix mois, assisté par Me Deville, le docteur Martini est condamné par le tribunal militaire d’Oran à cinq ans de prison, mais avec sursis. Il passe 24 heures au camp de Saint-Leu (Bethioua), et Me Deville fait signer, par le préfet d’Oran, Pierre Lambert, l’arrêté d’expulsion pour la France. Trois jours plus tard, Michel Martini et sa famille partent pour la Suisse, l’Italie, avant de rallier la Tunisie. Jusqu’à l’été 1958, il exerce la chirurgie à Sfax.
Sollicité par le docteur Nekkache
De la fin de 1958 à l’indépendance algérienne, nommé à l’hôpital Charles Nicolle de Tunis, il est appelé par le docteur Nekkache à prendre en charge la rééducation des blessés algériens qui sont dans les camps de l’ALN à la frontière tunisienne. En concertation avec le docteur Nekkache, il organisera des cours de traumatologie pour les médecins et infirmiers algériens, et s’occupera de la mise en place d’un centre de rééducation près de la frontière algéro-tunisienne.
Michel Martini revient en Algérie à l’indépendance, en juillet 1962. Il occupa le poste de chef de service de chirurgie générale à l’hôpital Parnet, à Alger, et professeur de chirurgie orthopédique et traumatologique. Le Pr Martini a, en outre, participé à la création de la Société algérienne de chirurgie (SAC) en 1963, héritière de la Société de chirurgie d’Alger. Il est le secrétaire général du premier bureau de la SAC, qui se réunit régulièrement le premier samedi de chaque mois à Bichat. Au cours de l’année 1964, il obtient la nationalité algérienne. Il s’impliquera également dans la réforme des études médicales initiée par le ministre de l’Enseignement de l’époque, feu Seddik Benyahia.
En novembre 1972, il rejoint l’hôpital de Douèra, à une vingtaine de kilomètres d’Alger, où il créera le service d’orthopédie et formera toute une génération d’orthopédistes, devenant ainsi le père de l’orthopédie algérienne et l’un des plus grands spécialistes mondiaux de l’infection osseuse en général et de la tuberculose osseuse en particulier. A sa retraite en 1987, il se retire en France.