Étrange sortie du président du mouvement El Bina, Abdelkader Bengrina. Le chef du parti islamiste émet des «réserves» sur la généralisation de l’enseignement de l’anglais dans le supérieur. «Nous réitérons nos réserves sur la décision d’imposer l’utilisation de l’anglais comme langue d’enseignement dans les universités à partir de cette année», lance l’ancien candidat à l’élection présidentielle du 12 décembre 2019, dans son allocution prononcée en fin de semaine dernière, à l’ouverture de l’université d’été des jeunes de son parti à Tipasa.
Le chef de parti appelle à la «retenue» dans l’application de cette décision qui «risque de profiter» aux partisans du maintien du français dans l’enseignement supérieur. «Nous appelons, propose-t-il, à la retenue, à une approche progressive et à la prise en compte des réalités dans son application parce que nous craignons sincèrement les décisions venues d’en haut, précipitées et en dehors de toute objectivité. Nous craignons que cette décision profite aux cercles qui veulent consacrer la langue française et faire échouer le projet d’utilisation de la langue anglaise pour accéder au monde du savoir, des sciences, au progrès et au développement.»
A une assistance attentive mais visiblement assommée par les propos d’un partisan assumé de l’anglicisation de l’enseignement, il lance : «Que tout le monde nous comprenne, nous ne sommes pas opposés à l’enseignement en anglais. Pas du tout ! Nous sommes contre la précipitation.»
Le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a décidé l’introduction à marche forcée de l’anglais en tant que langue d’enseignement à partir de la rentrée universitaire 2023/2024. Dans une instruction adressée le 1erᵉʳjuillet aux chefs des établissements universitaires, le ministre Kamel Beddari a demandé l’organisation de réunions «à l’effet de constituer les équipes pédagogiques selon la matière ou le module, et ce avant le départ en vacances».
Plateforme de télé-enseignement
L’instruction précise que chaque équipe, dont la présidence est confiée à un membre du corps pédagogique, désigné ou élu, doit être composée d’enseignants de différents grades, dont des maîtres de conférences et assistants chargés de travaux pratiques (TP) et travaux dirigés (TD).
Il est précisé que la supervision du dispositif «revient à la Commission nationale chargée du suivi et de l’évaluation du programme de formation des enseignants et des étudiants du 3eᵉ cycle en langue anglaise».
Quelque mois plus tôt, le ministère de tutelle a annoncé la création d’une plateforme numérique de télé-enseignement de l’anglais, au recensement des enseignants concernés par cet apprentissage. L’opération prévoyait la formation d’au moins 80% des enseignants de sciences et technologie et de 100% de ceux des sciences sociales et humaines.
En janvier, le ministère a procédé au lancement de cette plateforme élaborée avec l’université américaine Massachusetts Institute of Technology (MIT).
«L’Algérie devient le seul pays africain à se doter de cette plateforme numérique avec l’accompagnement de l’université MIT», a annoncé M. Baddari, précisant que 30 000 professeurs suivront une formation en ligne, et pourront atteindre les niveaux B2, voire C1.
Le même ministère a annoncé, au lendemain de l’annonce des résultats de l’examen du baccalauréat, le lancement d'une autre plateforme de cours d’anglais en ligne destinée aux nouveaux bacheliers souhaitant améliorer leur niveau pour atteindre le B2.