Israël concentre depuis des semaines ses opérations militaires à Khan Younès où des médecins de l’hôpital Al Nasser décrivent une situation intenable dans cet établissement transformé en champ de ruines.
Alors que le génocide se poursuit pour le 134e jour consécutif à Ghaza, la perspective d’une invasion militaire israélienne de Rafah, où s’entassent près de 1,5 million de réfugiés palestiniens, fait de plus en plus craindre un afflux massif de déplacés vers l’Egypte. L’optique d’une telle offensive aurait poussé les autorités égyptiennes à construire une enceinte fortifiée dans le désert du Sinaï, près de la frontière, a rapporté jeudi le Wall Street Journal.
Citant des responsables égyptiens, le média américain a indiqué que «les autorités égyptiennes, craignant qu’une poussée militaire israélienne dans le sud de la Bande de Ghaza ne déclenche un afflux de réfugiés, sont en train de construire une enceinte fortifiée (…)». Le Washington Post a publié un article sur le même sujet en se basant sur des images satellite.
Un ancien fonctionnaire égyptien a déclaré au quotidien américain qu’«il fallait faire face au pire des scénarios», ajoutant que «l’armée égyptienne ne pouvait pas tirer sur les Palestiniens si des dizaines de milliers d’entre eux se déversaient à travers la frontière». Selon le Wall Street Journal, la zone tampon de 13 kilomètres carrés dans le nord du Sinaï «est située à l’écart des zones habitables», se basant, lui aussi, sur des images satellite montrant des travaux de dragage du sol dans la zone supposée fermée entre les 4 et 14 février.
Il a également fait référence à une vidéo publiée par la Fondation du Sinaï pour les droits de l’homme, basée à Londres, montrant ce qu’elle a déclaré être la zone entourée de murs en béton de plus de six mètres de haut. Des responsables égyptiens ont, ajoute la même source, affirmé que le site fermé (20 000 kilomètres carrés) pourrait accueillir plus de 100 000 personnes.
Le Caire a déjà, par le passé, fait état de plans d’urgence en cas d’afflux de réfugiés, tout en disant qu’il refusait d’acquiescer un plan d’exil forcé échafaudé par l’entité sioniste.
L’Egypte n’a d’ailleurs pas tardé à apporter un démenti formel aux informations relatives à une zone tampon dans le Sinaï. D’après Al Jazeera, l’Egypte dément les informations diffusées par des médias selon lesquelles elle préparerait une zone tampon pour accueillir les Palestiniens, au cas où ils seraient déplacés de force par l’armée d’occupation.
Toujours selon la chaîne qatarie, le chef du service d’information égyptien, Diaa Rashwan, a déclaré dans un communiqué publié vendredi soir que l’Egypte «disposait déjà d’une zone tampon et de clôtures dans cette région», soulignant qu’il s’agissait «de mesures prises par tout pays dans le monde pour maintenir la sécurité de ses frontières et la souveraineté sur son territoire».
Au risque de compromettre les accords de Camp David
Il a, au passage, rappelé la position de son pays qui rejette le déplacement des Palestiniens, «position réitérée des dizaines de fois par le président Al Sissi», dira-t-il. Il a aussi souligné que cette position exige le rejet «complet et irréversible» de tout déplacement forcé ou volontaire de Palestiniens, en particulier vers le territoire égyptien.
«L’Egypte ne peut entreprendre aucune action ou mouvement sur son territoire qui la contredise et donne l’impression (…) qu’elle participe au crime de déplacement demandé par certaines parties israéliennes», a-t-il soutenu. L’Egypte s’est déclarée, à maintes occasions, opposée au déplacement des Palestiniens, allant jusqu’à menacer de se retirer de l’Accord de paix de Camp David avec Israël.
Le ministre israélien des Affaires étrangères, Yisrael Katz, a pour sa part confirmé, vendredi, qu’Israël «se coordonnerait» avec l’Egypte avant la «prochaine» opération militaire à Rafah. «L’Egypte est notre alliée», a-t-il déclaré lors de la conférence sur la sécurité de Munich, en Allemagne.
Il a ajouté que l’opération militaire aurait lieu «après coordination avec l’Egypte», soulignant qu’Israël «informerait» le président américain Joe Biden de l’attaque militaire. Alors que le Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, continue de défier la communauté internationale, multipliant les déclarations quant à une «nécessaire opération à Rafah» pour «démanteler le Hamas».
Pendant ce temps, de nouveaux bombardements de l’armée israélienne ont fait une centaine de morts à Ghaza, dans la nuit de vendredi à hier, selon l’agence Wafa.
Des raids intensifs et des tirs d’artillerie ont ciblé le quartier d’Al Zaytoun dans le sud de la ville de Ghaza, la ville de Khan Younès ainsi que les zones sud et est de Deir Al Balah, dans centre de l’enclave palestinienne. Il y a lieu de préciser qu’Israël concentre depuis des semaines ses opérations militaires à Khan Younès, où des médecins de l’hôpital Al Nasser décrivent une situation intenable dans cet établissement transformé en champ de ruines.
Médecins sans frontières a, face à toute cette horreur, révélé que ses employés avaient «dû fuir, laissant les malades derrière eux». «La situation était chaotique, catastrophique», a déclaré à l’AFP Christopher Lockyear, secrétaire général de MSF.
Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’hôpital Al Nasser, l’un des onze qui restent ouverts sur les 36 que comptait la Bande de Ghaza avant la guerre, est désormais «à peine fonctionnel».Dans ce contexte dramatique, la communauté internationale multiplie ses appels pour dissuader Israël de lancer une offensive contre Rafah.
Des témoins ont rapporté qu’il y a eu hier des explosions dans le centre et à l’est de Rafah où au moins deux maisons ont été visées par des frappes aériennes. Le bilan de l’agression sioniste contre la Bande de Ghaza s’est alourdi hier à 28 858 morts et 68 677 blessés, en majorité des femmes et des enfants, selon des sources palestiniennes.
Josep Borrell appelle Israël à «éviter» une opération militaire à Rafah
Le Haut représentant de l’Union européenne, Josep Borrell, a appelé l’entité sioniste à «ne mener aucune opération militaire à Rafah» dans le sud de la Bande de Ghaza et mis en garde qu’une telle offensive aggraverait la situation humanitaire déjà catastrophique dans le territoire palestinien, a rapporté l’agence de presse Wafa.
Borrell a déclaré hier, dans un message publié sur X, que cette éventuelle attaque à Rafah «aggraverait la situation humanitaire catastrophique», appelant à «la protection de tous les civils, conformément au droit humanitaire international».
«Je fais écho à l’avertissement lancé par plusieurs Etats membres de l’UE selon lequel une offensive» de l’armée d’occupation sioniste sur Rafah «entraînerait une catastrophe humanitaire indescriptible», avait déclaré Josep Borrell.
Les autorités palestiniennes, de nombreux pays, des organisations internationales et régionales et des ONG ont mis en garde contre les conséquences désastreuses de l’éventuelle expansion du génocide sioniste à Rafah. R. N.
Les palestiniens appellent à traduire la sympathie internationale en mécanismes d’action
Le ministère palestinien des Affaires étrangères a appelé à traduire les positions et déclarations internationales en faveur de la cause palestinienne en mécanismes d’action internationaux à même de contraindre l’entité sioniste à stopper sa machine génocidaire contre les civils palestiniens dans la Bande de Ghaza et Rafah.
Dans un communiqué relayé par l’agence de presse Wafa, la diplomatie palestinienne a, en outre, «fustigé l’indifférence de certains Etats occidentaux quant aux conditions de vie catastrophiques qu’endure le peuple palestinien depuis maintenant 134 jours, particulièrement à Rafah, où près d’un million et demi de réfugiés palestiniens sont exposés désormais à toutes les privations».
Dans le même contexte, le ministère palestinien a fait observer que l’échec de la communauté internationale ne se limite pas désormais à l’incapacité de mettre fin à l’agression militaire sioniste et faire respecter les décisions du Conseil de sécurité et de la Cour internationale de justice (CIJ), mais aussi à l’impuissance d’assurer l’entrée de l’aide humanitaire aux Palestiniens et de protéger des hôpitaux, notant que «le silence de la communauté internationale est inexplicable».
Le bilan de l’agression génocidaire sioniste contre la Bande de Ghaza s’est alourdi hier à 28 858 martyrs et 68 677 blessés depuis le 7 octobre dernier, a indiqué le ministère palestinien de la Santé. (APS)