Cinquante milliards de dollars de recettes pour 2022 ! Que de bonnes nouvelles le patron de Sonatrach a annoncées devant le chef de l’Etat lors de la visite présidentielle jeudi à Oran. Toufik Hakkar a raison de se frotter les mains.
Les recettes du groupe feront un bond de 150% par rapport à 2020, selon ses prévisions. Une chance providentielle qu’on doit aux cours du pétrole (le Sahara Blend a augmenté de 68% à la fin du mois de mai 2022 par rapport à la même période en 2021), et à la demande mondiale en gaz, dont bénéficie l’Algérie à la faveur de la guerre en Ukraine.
Un alignement des astres inespéré qui vient interrompre la spirale récessionniste induite par l’effondrement des cours du pétrole en 2014, le déficit d’investissement qui en a découlé et le choc négatif de la pandémie.
Le vent est donc favorable après les années de disette et les retombées inflationnistes qui continuent de menacer la stabilité de l’Algérie. Désormais, le pouvoir de Abdelmadjid Tebboune est en situation aisée, économiquement s’entend.
Au beau milieu de son mandat, le chef de l’Etat dispose d’un matelas assez confortable pour accélérer la mise en œuvre de l’agenda de réformes structurelles qu’il a établi, et relancer l’économie nationale par l’investissement et la croissance dans les segments hors hydrocarbures. Les conditions financières sont réunies pour entreprendre des chantiers difficiles ; ceux qu’un pays ne peut engager qu’en période d’aisance.
La réforme ne peut souffrir davantage d’ajournements et de tergiversations. Sortir notre économie de l’ornière de la dépendance aux hydrocarbures et lui donner les moyens de s’inscrire durablement dans la dynamique des tigres et des dragons exige une gouvernance parfaite. Une gouvernance ferme contre le parasitisme dominant, contre la corruption et la bureaucratie, ces fléaux qu’il va falloir éradiquer. Une gouvernance intelligente qui fait confiance aux jeunes et aux compétences algériennes à l’étranger et instaure la méritocratie.
Et il faut agir sans délai. Les prix du pétrole sont capricieux et personne parmi les spécialistes n’a les moyens de prévoir les cours au-delà de deux ans. Cette nature fluctuante donne une marge de manœuvre bien courte au régime algérien qui, par ailleurs, est avisé pour ne pas rééditer le gâchis des vingt ans de Bouteflika. Le président déchu a usé de la corruption comme un instrument de soumission et de gouvernance.
Il a exaucé les visées néocolonialistes les plus hardies en dilapidant la ressource et en gaspillant l’opportunité pour l’Algérie de construire une économie forte et un Etat affranchi de toutes les dépendances.
Une fenêtre de tir est ouverte pour le régime actuel pour surmonter ses handicaps et assumer le challenge. Faute de quoi, on va encore rater l’opportunité et se crasher au premier virage.