Etats-Unis : Donald Trump investi 47e président américain

21/01/2025 mis à jour: 14:41
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L’homme, qui se vante d’être le seul président américain à ne pas avoir déclenché ou soutenu de guerre depuis 1945, prétend mettre un terme «en 24 heures» à la guerre en Ukraine.

Le républicain Donald Trump est officiellement investi hier comme 47e président des Etats-Unis. La cérémonie s’est  déroulée à l’intérieur du Capitole où il a prêté serment, à cause du froid glacial qui traverse le nord du pays. 

Ainsi, Huit ans après sa première victoire, le républicain revient à la Maison-Blanche avec une  majorité parlementaire plus assurée. Comme il s’est entouré d’une équipe de fidèles qui ne chercheront pas à endiguer sa vision sur le monde. L’homme, qui se vante d’être le seul président américain à ne pas avoir déclenché ou soutenu de guerre depuis 1945, prétend  mettre un terme «en 24 heures» à la guerre en Ukraine. Entre-temps, il se montre hostile aux organisations internationales et annonce réduire le soutien financier américain à l’ONU. 

Les années Trump ont été marquées par une rupture avec des accords multilatéraux, comme sur le climat ou le nucléaire iranien, des guerres économiques, notamment à l’encontre de la Chine, l’Iran et Cuba, et des rencontres avec le leader nord-coréen Kim Jong-un. Sur le réseau X, le 6 novembre 2024, le sénateur Marco Rubio, choisi par D. Trump pour le poste de secrétaire d’Etat, a donné un résumé concis de la vision du monde du nouveau président : «Dans la configuration actuelle des affaires mondiales, une politique étrangère responsable de la part de l’Amérique ne doit pas reposer sur des fantasmes idéalistes, mais sur des décisions pragmatiques qui feront passer avant tout les intérêts nationaux essentiels des Etats-Unis.» 

La victoire du candidat républicain a été accueillie avec un mélange d’allégeance et de résignation dans les chancelleries du Vieux Continent. Elles redoutent entre-temps qu’il applique son programme : arrêt des livraisons d’armes à l’Ukraine, fin du parapluie sécuritaire américain, remise en cause des alliances traditionnelles et protectionnisme. Il a promis d’agir «à une vitesse et avec une force sans précédent» pour mettre fin au «déclin» de l’Amérique.

Quelques heures avant l’investiture de D. Trump 

Le président russe Vladimir Poutine a félicité le président élu américain, se disant «ouvert au dialogue» sur l’Ukraine pour aboutir à une «paix durable», selon des propos rapportés par l’AFP. Et d’ajouter : «S’agissant du règlement de la situation, je voudrais souligner que l’objectif ne doit pas être une brève trêve (...) mais une paix durable.» 

Plus tôt, le vice-président de la Commission européenne en charge de la stratégie industrielle, Stéphane Séjourné, a déclaré que l’Union européenne (UE) veut proposer à D. Trump d’investir davantage pour sa défense, mais lui réclamer en échange de ne pas lancer de guerre commerciale. «On ne peut pas avoir une guerre commerciale et en même temps construire l’Europe de la défense», a-t-il déclar sur France Inter. «Le deal avec les Etats-Unis, c’est oui pour un désengagement de la défense européenne» et pour construire des garanties de sécurité européennes en plus de l’OTAN, mais nous ne pouvons pas le faire avec une guerre commerciale à nos portes. Et les budgets nationaux ne sont pas en capacité de monter partout à 3% (du PIB) le budget de la défense», a-t-il dit.

 «On ne pourra pas s’organiser de manière efficace, notamment sur le front de l’Est, si en plus on a une guerre commerciale qui nous coûte énormément», a-t-il ajouté, en référence à l’aide à l’Ukraine. A la question d’une réponse européenne «par la force» à une guerre commerciale, le commissaire européen a rétorqué : «Je ne peux pas vous répondre.» 

Les Européens pâtiraient eux-mêmes en cas de droits de douane accrus sur des produits américains, et «la balance commerciale avec les Etats-Unis est très favorable aux Européens», a-t-il souligné. «Il y a deux stratégies possibles, une approche offensive ou une approche défensive. 

On peut avoir une réplique sur les droits de douane, mais les Européens le paieront», a-t-il poursuivi, prenant le cas de compagnies européennes qui achètent des pièces détachées de Boeing. «Il faut être offensif et être peut-être même radical s’il le faut», a-t-il cependant estimé. Il a aussi évoqué une «approche défensive qui consiste à ré-aiguiller un certain nombre d’achats dans le monde», par exemple «suspendre les approvisionnements de GNL (gaz naturel liquéfie) à l’Azerbaïdjan pour acheter plus aux Américains». 

«Le monde entier est dépendant de ce que fera ce soir Donald Trump. Un certain nombre de décrets seront pris. Et je pense que ni les Canadiens, ni les Mexicains, ni nous, ni le reste du monde, ne savent  exactement ce qu’il y a dans ces décrets», a-t-il observé. 

Le successeur de Joe Biden prévoit notamment d’imposer, dès le 20 janvier, des droits de douane de 25% sur tous les produits en provenance du Mexique et du Canada. La Chine pourrait également voir ses taxes augmenter de 10% et la zone euro est loin d’être rassurée sur la politique protectionniste du 47e président américain. Entre-temps, le dollar accélère sa chute  plombée par des informations de presse selon lesquelles Donald Trump n’instaurera pas de nouveaux droits de douane immédiatement après son investiture, tandis que le bitcoin s’emballe dans la perspective d’un second mandat pro-crypto. 

Selon Wall Street Journal, il prévoit de publier un mémorandum demandant aux agences fédérales américaines d’étudier les politiques et relations commerciales des Etats-Unis avec la Chine et ses voisins continentaux. De son côté, l’ambassadeur d’Allemagne aux Etats-Unis s’est inquiété des «projets de vengeance» du président élu et a jugé que son programme pourrait saper la démocratie américaine, dans un document confidentiel très alarmiste révélé dimanche par le quotidien Bild. 

Ces propos d’Andreas Michaelis sont contenus dans un câble diplomatique adressé mardi à la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock. Il y dénonce notamment la «stratégie de disruption maximale» du nouveau président américain pour «redéfinir l’ordre constitutionnel» de son pays, selon Bild. Il s’inquiète aussi de la volonté à ses yeux de Donald Trump et son allié Elon Musk de vouloir restreindre la liberté d’expression et limiter les droits des minorités. Le ministère allemand des Affaires étrangères a cherché à minimiser cette fuite de presse, affirmant que les Etats-Unis «sont l’un de nos alliés les plus importants». 

Le continent africain face au républicain

L’Afrique ne sera pas un enjeu majeur pour l’Amérique sous Trump II, pas plus qu’elle ne l’a été durant le premier mandat de ce président isolationniste qui a qualifié les pays africains de «trous à rats».
Le promoteur du MAGA (Make America Great Again) n’a reçu en quatre années que deux chefs d’Etat africains : Muhammadu Buhari (Nigeria) et Uhuru Kenyatta (Kenya). Mike Pompeo, son secrétaire d’Etat entre 2018 et 2021, s’est déplacé une fois au Sénégal et en Ethiopie. Quant à son épouse Melania, elle a effectué une «visite diplomatique et humanitaire» au Kenya. Lors de sa campagne de 2024, il s’est engagé à mettre en place un droit de douane universel de 10% sur tous les produits fabriqués à l’étranger. Cette mesure rendrait les produits importés plus chers, et les exportateurs africains seraient en conséquence susceptibles de vendre moins de leurs produits sur le grand marché américain. 

Ce deuxième mandat risque lui aussi de laisser un souvenir désagréable à l’Afrique en raison non seulement de la politique de l’immigration qui fermera les portes de l’Amérique aux jeunes du continent, mais aussi de l’imposition de droits de douane pour les importations africaines aux Etats-Unis, avec la très forte probabilité de ne pas renouveler, en 2025, l’African Growth and Opportunity Act (AGOA), qui exonère de taxes douanières un certain nombre de produits en provenance de 32 pays d’Afrique subsaharienne. Donald Trump pourrait favoriser la conclusion d’accords bilatéraux pour contrer l’influence de la Chine et de la Russie sur le continent. 

L’Afrique du Sud fait partie de ceux qui bénéficient le plus de ce programme préférentiel, en particulier ses secteurs de l’automobile, des produits chimiques, ainsi que certains produits agricoles comme les agrumes ou le vin. Au cours de son administration précédente, Il a déclaré que le programme ne serait pas renouvelé à son expiration en 2025. 

Ces dernières années, une partie du camp républicain a réclamé l’exclusion de l’Afrique du Sud de ce programme, en raison de ses relations avec la Russie, la Chine et l’Iran, et de ses prises de positions contre Israël, jugées contraires aux intérêts américains. Ils souhaitent également perturber l’initiative chinoise Belt and Road, qui intègre une grande partie de l’Afrique. En 2018, l’administration Trump a dévoilé Prosper Africa, une initiative qui aide les entreprises américaines souhaitant investir en Afrique, et la Development Finance Corporation (DFC), qui finance des projets de développement en Afrique et dans le monde entier. 

Joe Biden a maintenu ces deux entités en activité après sa prise de fonction, et la DFC affirme avoir investi à ce jour plus de 10 milliards de dollars en Afrique. Il est également attendu que D. Trump ne mette fin au Pepfar, une initiative américaine de longue date qui a permis d’injecter des sommes considérables dans la lutte contre le VIH en Afrique.  Amnay Idir

 

 

 

Le plus extraordinaire «comeback» de l’histoire américaine  

Donald Trump, au sommet de sa puissance politique, est devenu hier président des Etats-Unis, pour la seconde fois. Sous la coupole du Capitole, posant une main sur une bible héritée de sa mère, il a levé l’autre pour jurer de «protéger la Constitution». Le milliardaire républicain, qui avait battu la vice-présidente démocrate Kamala Harris le 5 novembre, est désormais à 78 ans le chef d’Etat américain le plus âgé jamais investi. Ce serment conclut le plus extraordinaire «comeback» politique de l’histoire américaine récente, celui d’un ancien président qui n’a jamais reconnu sa défaite en 2020, qui crie à la «vengeance» contre ses adversaires, qui a été condamné au pénal, qui a été visé cet été par deux tentatives d’assassinat, et qui a mené une campagne d’une violence rhétorique sidérante, émaillée de propos racistes et sexistes. Il a prêté serment à l’endroit même où ses partisans avaient tenté le 6 janvier 2021, d’empêcher la certification de l’élection de Joe Biden en prenant d’assaut le siège du Congrès américain. Son prédécesseur démocrate, qui conclut un demi-siècle de vie politique, a organisé une transition sans heurts du pouvoir à cet homme qui n’a eu de cesse de l’humilier.»Bienvenue à la maison», avait lancé Joe Biden un peu plus tôt en recevant Donald Trump, accompagné de son épouse Melania Trump, pour une ultime visite de courtoisie à la Maison Blanche. La normalité n’est que de façade, car le démocrate de 82 ans a aussi pris, à quelques minutes de céder le pouvoir, une décision absolument inédite. Il a en effet gracié, de manière préventive, les plus proches membres de sa famille, de peur qu’ils ne soient l’objet d’une vendetta judiciaire des républicains. Contrairement au républicain, qui avait boudé son investiture, le 46e président démocrate avait bien pris place dans la vaste salle pavée de marbre, véritable cathédrale de la vie politique américaine. A ses côtés les anciens présidents américains Bill Clinton, George W. Bush et Barack Obama, mais aussi les multimilliardaires Mark Zuckerberg et Jeff Bezos, le désormais incontournable Elon Musk, ainsi que des dirigeants ou personnalités d’extrême droite invités à titre personnel. La cérémonie d’investiture se déroule habituellement à l’extérieur, mais le protocole a été chamboulé à cause des températures glaciales.

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