En raison du blocus et des bombardements intensifs : Risque de famine à Ghaza

23/12/2023 mis à jour: 01:57
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Photo : D. R.

Une enquête de l’Observatoire EuroMed, ONG basée à Genève (Suisse), vient de révéler que 71% des Ghazaouis souffrent d’une famine extrême, 98% ne mangent pas à leur faim et 64% se nourrissent d’herbes, de dattes, de nourriture non cuite et de produits périmés.

Alors que les membres du Conseil de sécurité de l’Onu peinent à sortir avec une résolution imposant un cessez-le-feu humanitaire, la famine s’installe à Ghaza. Les Palestiniens, qui auront la chance d’échapper aux bombes à destruction massive larguées par l’armée d’occupation, mourront de famine, de soif ou de maladie.

La directrice exécutive du Programme alimentaire mondial (PAM), Cindy McCain, a révélé : «Plus de 570 000 Ghazaouis sont confrontés à une famine catastrophique», ajoutant : «Un ménage sur quatre à Ghaza est maintenant confronté à une faim extrême et qu’il y a un risque de famine, si l’accès à une nourriture adéquate, à de l’eau propre, à des services de santé et d’assainissement n’est pas assuré.»

Le communiqué a fait état du rapport d’analyse de la sécurité alimentaire pour Ghaza, qui indique que «l’ensemble de la population de Ghaza, environ 2,2 millions de personnes, est en situation de crise ou, pire, d’insécurité alimentaire aiguë», soulignant que «26% des habitants de Ghaza, soit 576 600 personnes, ont épuisé leurs ressources alimentaires et leur capacité d’adaptation et sont confrontés à une faim catastrophique».

Le rapport, cité par le communiqué, a insisté sur le fait qu’il «existe un risque de famine dans les six prochains mois si la situation actuelle de conflit intense et d’accès limité à l’aide humanitaire persiste». Le communiqué a relevé en outre que «beaucoup d’adultes ne s’alimentent pas pour que les enfants puissent manger».

Le PAM a par ailleurs rappelé avoir mis en garde contre «cette catastrophe imminente depuis des semaines. Malheureusement, sans l’accès sûr et régulier que nous demandions, la situation est désespérée. Personne à Ghaza n’est à l’abri de la faim (…)», a rappelé Cindy McCain, la directrice exécutive de l’agence onusienne.

Un de ses rapports a fait état de graves révélations : «La moitié de la population de Ghaza meurt de faim dans une situation de faim extrême ou grave, et 90% de la population se retrouve régulièrement sans nourriture pendant une journée entière. Seulement 10% de la nourriture actuellement nécessaire à 2,2 millions de personnes est entrée à Ghaza au cours des 70 derniers jours.»

Un constat également dressé par le Haut-Commissariat des droits de l’homme de l’Onu, qui a révélé jeudi dernier que «plus de 570 000 personnes, soit un quart de la population, meurent de faim à Ghaza en raison du manque d’acheminement de nourriture dans le territoire».

Un constat qui corrobore celui dressé par une enquête effectuée par l’Observatoire EuroMed des droits de l’homme et dont les résultats ont été publiés, mardi dernier, et ont montré que «71% de la population de Ghaza souffre d’une famine extrême, confirmant ainsi les accusations selon lesquelles Israël utilise la famine pour punir les civils palestiniens».

L’Observatoire a expliqué avoir travaillé sur un échantillon de 1200 personnes sondées à Ghaza. Il en ressort que «98% ne mangent pas à leur faim, et 64% se nourrissent d’herbes, de dattes, de nourritures non cuites et de produits périmés pour combler leur faim».

Effectuée dans le but de mettre en avant l’impact de la crise humanitaire induite par la guerre génocidaire israélienne qui dure depuis le 7 octobre dernier, l’enquête d’EuroMed Monitor a montré, par ailleurs, que le taux d’accès à l’eau pour boire et se laver ne dépasse pas 1,5 litre par jour et par personne, alors que la norme internationale des besoins nécessaires pour rester en vie est de 15 litres par jour et par personne.

En examinant les effets de la malnutrition et du manque d’ accès à l’eau potable, EuroMed Monitor, a relevé que «66% de la population interrogée ont déclaré avoir souffert de diarrhée, d’éruptions cutanées ou de maladies intestinales au cours du mois écoulé».

Les témoignages des médecins ont fait état d’une hausse du taux de décès dus à des évanouissements et à des crises cardiaques dans les zones de la ville de Ghaza et dans les sections nord qui connaissent une détérioration plus grave de la crise humanitaire et des taux de faim.

Utilisation par Israël de la famine comme arme de guerre

EuroMed Monitor a souligné que «depuis le début de son génocide à Ghaza, Israël a imposé un blocus complet sur l’enclave et empêché l’approvisionnement en nourriture, eau, carburant et autres produits de première nécessité humanitaire d’atteindre les plus de 2,3 millions d’habitants de Ghaza.

L’utilisation par Israël de la famine comme arme a pris des proportions extrêmement grave, notamment en coupant tout approvisionnement alimentaire aux Ghazaouis ainsi qu’en bombardant et détruisant les boulangeries, les usines, les magasins d’alimentation, les stations d’eau et les réservoirs».

Pour les auteurs de l’enquête, «Israël a également ciblé les systèmes d’énergie solaire et les générateurs électriques qui alimentent les restaurants, les entreprises et les agences gouvernementales.

De nouvelles attaques israéliennes ont détruit la zone agricole à Ghaza, magasins de farine, bateaux de pêche et des centres d’approvisionnement pour les organisations humanitaires, en particulier de l’Unrwa (Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine), la plus grande source d’aide humanitaire de Ghaza».

Sous la pression internationale, ont ajouté les auteurs de l’enquête, Israël a ouvert le passage terrestre de Rafah, cependant, ce dernier n’est ouvert en moyenne qu’à 100 camions par jour, pour le transport de fournitures humanitaires en provenance d’Egypte.

On est loin du chargement moyen de 500 camions qui entraient à Ghaza avant le 7 octobre pour répondre aux besoins humanitaires. Basé à Genève, l’Observatoire EuroMed des droits de l’homme a précisé que le droit humanitaire international interdit strictement l’utilisation de la famine comme arme.

Les inquiétudes exprimées par l’Observatoire EuroMed Monitor vont dans le même sens que celles de l’ONG américaine des droits de l’homme HRW (Human Rights Watch), qui lundi dernier, avait accusé, dans une déclaration, le gouvernement israélien «d’utiliser la famine des civils comme méthode de guerre» à Ghaza et de «bloquer délibérément l’approvisionnement en eau, en nourriture et en carburant, tout en entravant délibérément l’aide humanitaire, apparemment rasant les zones agricoles et privant la population civile des biens indispensables à sa survie».

Tout comme l’Observatoire, Human Rights Watch a appelé à un cessez-le-feu pour permettre à l’aide humanitaire d’arriver à la population civile. Le même appel a été lancé aussi par le Pam.

Dans une déclaration, l’Agence onusienne a mis en garde contre le risque de famine à Ghaza, si la communauté internationale et les organisations humanitaires «ne s’unissent  pas pour fournir une aide humanitaire avec les efforts et les quantités nécessaires».

Représentant et directeur du Pam en Palestine, Samer Abdeljaber, a, sur le site de l’Onu, qualifié la situation à Ghaza de «tragique» et affirmé qu’un «nombre croissant de personnes ont recours à des stratégies d’adaptation négative face à la situation, qui affectent leur santé, et que les personnes déplacées dans les abris ne peuvent pas obtenir des choses simples pour eux-mêmes et leurs enfants».

Il y a une dizaine de jours, l’agence onusienne avait mis en garde contre la famine en alertant : «Après dix semaines de crise à Ghaza, la moitié de la population est confrontée à une faim extrême, avec peu d’accès à la nourriture, à l’eau et aux abris», avant d’appeler «à un cessez-le-feu immédiat» et «à l’ouverture de tous les postes frontaliers pour apporter des secours et mettre un terme aux souffrances».

Mercredi dernier, un convoi de 750 tonnes d’aide alimentaire est rentré pour la première fois par le poste frontalier avec la Jordanie. C’est le Pam qui l’a affirmé très tard dans la soirée de mercredi, en annonçant «l’arrivée d’un convoi, le premier en provenance de la Jordanie depuis le début de la guerre contre Ghaza, le 7 octobre.

Il s’agit de 46 camions, pris en charge par le PAM et une ONG humanitaire jordanienne, la JHCO, transportant 750 tonnes d’aide alimentaire et qui a nécessité des semaines de coordination avec toutes les parties», a indiqué l’agence onusienne, tout en précisant que le convoi a transité par le poste-frontière de Kerem Shalom.

L’acheminement «temporaire» de cette aide vers Ghaza avait été autorisé cinq jours auparavant, par l’autorité israélienne, sous la pression de la communauté internationale. 
 

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