Droits de l'homme au Sahara occidental : L'ONU «gravement préoccupée» par la répression marocaine

10/04/2025 mis à jour: 17:23
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Les Sahraouis subissent une féroce répression de la part des forces d'occupation marocaine - Photo : D. R.

«Nous exprimons notre inquiétude concernant les restrictions à la liberté de mouvement et de réunion imposées (par le Maroc) aux défenseurs des droits de l'homme sahraouis et étrangers», ont déclaré les experts des Nations unies chargés des questions des droits de l'homme.

La rapporteuse spéciale de l'ONU sur la situation des défenseurs des droits de l'homme, Mary Lawlor, et d'autres experts des Nations unies ont exprimé leur «grave préoccupation» face à la campagne de répression menée ces derniers mois par les autorités marocaines contre des défenseurs des droits de l'homme, des journalistes et des porte-parole de la contestation au Sahara occidental occupé, «en représailles de leur soutien à l'autodétermination du peuple sahraoui».

«Nous exprimons notre grave préoccupation quant à l'intimidation et la surveillance (par les autorités de l'occupation) des défenseurs des droits de l'homme sahraouis, la déportation (...) de quatre jeunes militants syndicaux norvégiens du Sahara occidental, ainsi que les mesures de rétorsion économique imposées aux membres de la famille des défenseurs des droits de l'homme et aux militants eux-mêmes», ont souligné Mary Lawlor et des experts des Nations unies dans une communication écrite au sujet de la répression marocaine des défenseurs des droits de l'homme au Sahara occidental au cours des derniers mois. «Nous exprimons également notre inquiétude concernant les restrictions à la liberté de mouvement et de réunion imposées (par le Maroc) aux défenseurs des droits de l'homme sahraouis et étrangers», ont-ils poursuivi.

Et d'ajouter dans le même contexte : «Nous sommes également préoccupés par l'effet dissuasif notable que ces mesures sont susceptibles de déclencher sur les défenseurs des droits de l'homme sahraouis de manière plus générale, en entravant leur capacité à exprimer (...) leurs critiques ou à mener à bien leur travail légitime de défense des droits humains.» Dans leur communication, les experts onusiens ont précisé que «plusieurs journalistes, défenseurs des droits de l'homme, leaders de la contestation et opposants politiques de premier plan ont fait l'objet d'une répression (marocaine) accumulée ces derniers mois, évidemment en représailles de leur travail en faveur des droits de l'homme, et notamment de leur soutien à l'autodétermination du peuple sahraoui».

Des rapports font état aussi d'une surveillance accumulée et du recours à des tactiques d'intimidation, telles que les menaces et le harcèlement, «pour faire taire» les Sahraouis, selon la même source. «On signale de plus en plus de détentions arbitraires, de répressions violentes de manifestations pacifiques et de restrictions à la liberté d'expression et à la liberté de mouvement contre les défenseurs des droits de l'homme. Les familles des défenseurs des droits de l'homme ont également été visées par les représailles économiques et la perte d'opportunités en matière d'éducation et d'emploi», ont déploré les auteurs de cette communication.

Actes d'intimidation

Les experts onusiens ont cité, dans leur document, quelques cas de militants et de défenseurs des droits de l'homme au Sahara occidental ayant fait l'objet de répression marocaine, à l'instar des journalistes sahraouis qui défendent les droits du peuple du Sahara occidental, Ahmed Ettanji et Mohamed Mayara. «Le 9 octobre 2024, les forces de sécurité marocaines ont assiégé, menacé d'arrêter et expulsé Ahmed Ettanji et Mohamed Mayara de la ville de Cap Boujdour, au Sahara occidental, alors qu'ils s'y trouvent pour une visite familiale.

A leur arrivée au poste de contrôle local, les deux défenseurs des droits humains ont été retenus par les autorités marocaines, puis relâchés au bout d'une heure.» «Lorsque les défenseurs des droits de l'homme sont arrivés au domicile de la famille, ils ont trouvé la police marocaine (...) encerclant l'endroit, les menaçant d'arrestation et exigeant qu'ils quittent immédiatement la maison et la ville», poursuivent-ils. «La famille d'accueil a également fait l'objet d'actes d'intimidation et de menaces de perquisition parce qu'elle hébergeait les défenseurs des droits de l'homme. En conséquence, les défenseurs des droits de l'homme ont dû quitter la ville et ont été contraints de retourner dans Laâyoune» occupée.

Appel à la libération d'un étudiant sahraoui

Le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a émis un avis dans lequel il appelle à la libération «immédiate» et «inconditionnelle» de l'étudiant et militant sahraoui des droits humains, Al Houcine Al Bachir Ibrahim, affirmant qu'il est soumis à une «détention arbitraire» dans une prison marocaine. Le groupe de travail, qui assure qu'Al Houcine Al Bachir Ibrahim a été emprisonné de façon «arbitraire» par les autorités marocaines, n'a pas manqué d'exprimer sa préoccupation quant aux conditions de détention de cet étudiant incarcéré depuis plus de six ans. Al Houcine a été arrêté en janvier 2019 suite à son expulsion forcée d'Espagne, où il avait demandé l'asile.

A son arrivée au Maroc, il a été placé en détention, soumis à de mauvais traitements, privé d'accès à un avocat et finalement condamné à 12 ans de prison à l'issue d'une procédure entachée de violations, au cours de laquelle il a été privé d'un procès équitable. Lors de l'évaluation de la détention d'Al Houcine au Maroc, le Groupe de travail des Nations unies a constaté de graves violations quant «aux procédures réglementaires, notamment l'utilisation d'aveux entachés et des violations de l'interdiction de la torture», déclarant également que «l'arrestation initiale d'Al Houcine par le Maroc était arbitraire».

Dans un communiqué conjoint, le Comité norvégien de soutien au Sahara occidental, le Groupe de travail sur les droits de l'homme au Sahara occidental occupé et le Comité des familles des étudiants sahraouis détenus ont soutenu que «l'avis de l'organe des Nations unies renforce l'inquiétude internationale croissante face au ciblage systématique des défenseurs des droits humains sahraouis par le Maroc».

«Avec cette décision, le Groupe de travail des Nations unies a développé, renforcé et clarifié sa condamnation du Maroc pour les violations nombreuses et répétées du droit international et des droits humains, telles que rapportées par les procédures spéciales des Nations unies«, poursuit le communiqué. Se référant aux Groupes de travail des Nations unies chargés de la question des étudiants sahraouis emprisonnés, l'avocate d'Al Houcine, Tone Sorfonn Moe, a réaffirmé que «la dernière décision de l'organe des Nations unies révèle le caractère systématique des représailles visant les jeunes et les défenseurs des droits humains sahraouis», soulignant «la nécessité d'une intervention urgente pour protéger la prochaine génération de défenseurs des droits humains au Sahara occidental«. Dans une déclaration, la famille d'Al Houcine Al Bachir Ibrahim a fait part du supplice que subit ce dernier, dénonçant les conditions de détention inhumaines et son isolement dans une prison marocaine, loin de ses proches.

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