Crise sécuritaire en Libye : Incidents à Tripoli entre unités sécuritaires régulières

31/05/2023 mis à jour: 01:35
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Les récents incidents à Tripoli durant la nuit entre le dimanche 28 mai et le lundi 29 mai, entre l’unité de lutte contre le terrorisme et le crime organisé et le bataillon 444 de l’armée libyenne, traduisent parfaitement l’absence de direction centrale de la sécurité dans la capitale libyenne. 

Il a suffi qu’un élément du bataillon 444 de l’armée soit arrêté, près du port de Tripoli, par l’unité de lutte contre le crime organisé, pour que chacune des factions déploie ses unités en position de combat dans plusieurs quartiers de Tripoli.Certains groupes, des deux bords, sont même entrés en action et des échanges nourris de tirs ont été entendus à Aïn Zara-Nord  et au Rond-point Fornejà une dizaine de kilomètres au sud-est de Tripoli, sur la route de l’université qui a suspendu ses examens.  

La libération du militaire arrêté a entraîné la fin des hostilités. Les diverses unités ont regagné leurs campements respectifs, laissant la place aux forces de police de Tripoli pour reprendre la main et organiser la circulation. Dans une déclaration à El Watan, Imed Trabelsi, le ministre de l’Intérieur du gouvernement Debeiba, a confirmé que «les incidents se sont déroulés entre des unités officielles de l’Etat libyen». 

Il a regretté «pareils dérapages», qui se justifient, selon lui, par «la présence chaotique des armes et la faiblesse de l’Etat durant la dernière décennie». Il a considéré que «le rétablissement de l’ordre n’est pas chose aisée». Pareille analyse du premier responsable de la sécurité dans la capitale Tripolitaine étonne certes. 

Mais, elle est véridique et va dans le même sens que les propos du juge Jamel Bennour, qui assure que «les Tripolitains sont habitués à pareils incidents entre des unités rivales, surgissant malheureusement cinq à six fois l’année». 

Le juge, un militant de la première heure originaire de Benghazi, considère que «seule la centralisation de la direction sécuritaire pourrait stabiliser continuellement Tripoli, et l’Ouest libyen en général». Il regrette «la faiblesse de la direction politique sur le plan sécuritaire» et rappelle que «les unités présentes, milices présentées comme unités sécuritaires, n’ont pas permis à Fayez Sarraj de former la garde présidentielle comprise dans l’accord de Sekhirat».  Selon le juge, «les milices ont pris en otage le pouvoir politique en Libye et les puissances internationales le savent pertinemment», assure-t-il avec amertume.

Scénarii à répétition

Les récents incidents d’Ezzaouia et Tripoli ne sortent nullement de la logique quotidienne libyenne durant les périodes de paix. Ce qui se passe à Ezzaouia est en lien avec les quotes-parts dans le trafic de carburant, qui est organisé à un point tel que des bateaux assurent des traversées avec l’essence libyen volé. 

C’est une vérité que tout le monde en Libye connaît, ce qui traduit des implications à tous les niveaux, de la raffinerie au port, en passant par les unités sécuritaires terrestres et maritimes. Pour les incidents de Tripoli, c’est plutôt la suprématie continue des «révolutionnaires» par rapport aux «sécuritaires. Le milicien dirige le policier, voire le soldat, qui respecte le règlement. Le milicien n’a pas de respect pour l’Etat. 

L’Ouest libyen ne veut pas assurer le transit de la révolution vers l’Etat pour que les révolutionnaires gardent leurs avantages. Et c’est le peuple libyen qui paie les frais, alors que les membres de toutes les institutions tirent profit. Le scénario actuel n’est pas l’unique du genre. Il a été observé durant l’année 2021, lorsque des élections générales étaient prévues le 24 décembre 2021. Auparavant, diverses annonces d’élections générales ont été faites en 2018 et 2019, lors des conférences de Palerme, Paris, Dubaï, sans parler des préparatifs de Tunis, Le Caire, Charm Cheikh, Rabat, etc. 

Les dignitaires libyens et les diplomates étrangers ont fait le tour de toutes ces conférences, sans parvenir au moindre accord réalisable sur le terrain. «Avec les mêmes personnes et les mêmes approches, on ne saurait obtenir un nouveau résultat», assure le juge Jamel Bennour, qui se demande comment «ces entités peuvent-elles accepter des solutions qui les mettent à l’écart». Il remarque également que «les puissances occidentales tirent, elles-aussi, profit de la situation, puisqu’elles tirent à souhait le pétrole libyen». «Pauvres Libyens !», regrette-t-il 

Tunis
De notre correspondant Mourad Sellami

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