Centre de torture de Hammam Madjzara à Chréa (Tébessa) : Un autre témoin de la barbarie coloniale

26/03/2025 mis à jour: 07:19
713
Photo : D. R.

Parmi les dizaines de lieux de concentration et d’exaction répartis sur les différentes régions du pays, le centre de torture de Hammam Madjzara dans la commune de Chréa à l’ouest de Tébessa témoigne encore de la cruauté de l’armée coloniale envers des Algériens sans armes.

Avec ses murs délabrés, ses nombreuses salles obscures et ses puits où l’on jetait les corps des martyrs internés, ce lieu résonne encore de hurlements de douleur des prisonniers subissant les formes les plus inhumaines de torture. Situé dans l’une de cités de la vieille ville de Chréa, Hammam «Madjzara» ou bain du massacre, ainsi dénommé par les moudjahidine, s’étend sur plus de 900 m2.

Les propriétaires légitimes de ce bain, impuissants, ont assisté, durant l’année 1957 en pleine guerre de libération à la spoliation de leur bien ainsi que plusieurs maisons voisines par l’armée coloniale, qui en avait fait un centre de torture. Un membre de l’Organisation nationale des moudjahidine (ONM), Tayeb Rahem, rappelle les pires formes de torture et d’interrogatoire subis par les moudjahidine arrêtés originaires de Tébessa ou d’autres régions.

Gégène, immersion prolongée de la tête dans des bassines d’eau, supplice de la baignoire, maintien prolongé sans bouger debout, accroupi, sur un pied, sur la pointe des pieds, aspersions d’eau bouillante, tous les moyens ont été utilisés pour extorquer des aveux, raconte M. Rahem.

De son côté, le moudjahid Ahmed Hadji, membre, à l’époque, de l’Armée de libération nationale (ALN), soutient que les soldats français excellaient dans la torture au point où le sang des suppliciés coulait dans un escalier du hammam.

«En ce sinistre lieu, la torture se pratiquait en toute impunité, car le centre était situé dans un endroit isolé qui faisait que les hurlements des torturés ne pouvaient être entendus vu l’épaisseur des murs des salles et l’étroitesse des tunnels aménagés par l’occupant français», ajoute M. Hadji. Si ce moudjahid, ému aux larmes, se souvient des méthodes de torture, cordes, piquets de suspension à plusieurs mètres du sol, ce qu’il retient surtout ce sont ces chiens féroces dont les soldats se servaient pour dévorer les corps des torturés alors même qu’ils étaient vivants.

Les membres de la famille révolutionnaire de la wilaya de Tébessa renouvellent à chaque occasion leurs appels au ministère de tutelle pour réhabiliter ce haut lieu historique, témoin des crimes coloniaux français, et le transformer en un musée racontant une période importante de l’histoire de la région.

Le secrétaire de wilaya de l’ONM, à Tébessa, Mohamed-Cherif Douaifia, suggère, dans ce contexte, la création d’un musée historique des moudjahidine sur le site du bain et l’utilisation de ses murs pour y suspendre des tableaux simulant les tortures auxquelles les Algériens étaient soumis.

Soulignant que plus de 800 moudjahidine de différentes régions ont été torturés, il appelle à documenter ces souffrances et de tirer parti des témoignages vivants sur ce centre afin de les intégrer à la Mémoire nationale et de les utiliser pour la recherche universitaire.

Copyright 2025 . All Rights Reserved.