Burkina Faso : HRW demande à la junte d’enquêter sur un massacre de civils

16/03/2025 mis à jour: 08:36
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Photo : D. R.

Des atrocités auraient été commises par des soldats du 18e bataillon d’intervention rapide (BiR)et des Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), des milices civiles.

L’ONG Human Rights Watch a appelé, avant-hier, la junte au pouvoir au Burkina Faso à «enquêter» sur les massacres de civils, en début de semaine, par des hommes accusés d’appartenir aux forces de sécurité. Des exactions qualifiées de «manipulation» par les autorités. Des vidéos relayées sur les réseaux sociaux montrent des dizaines de corps ensanglantés jonchant le sol, sans signe de vie apparent, les pieds et les mains ligotés, dans la zone de Solenzo (ouest). Ce sont pour la plupart des femmes, des enfants et des vieillards. «Les autorités doivent enquêter de manière impartiale et poursuivre de manière appropriée tous les responsables de ces crimes graves», a déclaré HRW dans un communiqué.

«Les vidéos macabres d’un apparent massacre commis par des milices progouvernement au Burkina Faso soulignent l’absence systématique de responsabilité de ces forces», a affirmé Ilaria Allegrozzi, chercheure spécialiste du Sahel, citée dans le texte. «Les autorités doivent prendre des mesures immédiates pour mettre fin aux attaques de civils, en punissant les responsables d’atrocités comme celles de Solenzo», a-t-elle ajouté. Selon une source locale contactée par l’AFP, «des familles entières» de Peuls ont été tuées près de cette localité entre le 10 et le 11 mars.

Ces atrocités auraient été commises, d’après cette source, par des soldats du 18e bataillon d’intervention rapide (BiR)) et des Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), des milices civiles. Les BiR ont été créés par le chef de la junte, le capitaine Ibrahim Traoré, installé au pouvoir depuis 2022 à la suite d’un coup d’Etat militaire, pour lutter contre les attaques djihadistes.

Aux côtés des VDP, ils sont régulièrement accusés d’exactions contre des civils. Human Rights Watch a dénombré 58 corps dans les vidéos, mais estime que le bilan pourrait être plus lourd, car des cadavres sont empilés les uns sur les autres. «Ce sont des actions de manipulation qui visent à remettre en cause les actions des forces combattantes», a déclaré le chef du gouvernement, Jean-Emmanuel Ouédraogo. «De grandes opérations de lutte contre le terrorisme sont actuellement en cours. Le rouleau compresseur de l’armée est en train d’écraser l’ennemi dans ces zones», a-t-il poursuivi.

«Vidéos insoutenables»

Il a également annoncé la création de nouveaux BiR et le recrutement de plus de 14 000 militaires et de milliers de VDP. Dénonçant des «vidéos insoutenables», le mouvement de la société civile burkinabè Sens a estimé que «la lutte contre le terrorisme n’autorise pas tout». «Comment peut-on justifier de telles expéditions punitives sur des populations faibles et sans défense, dont le seul crime est leur appartenance à une communauté ethnique ?», poursuit ce mouvement qui estime à 500 le nombre de civils tués depuis 2023 par les forces de sécurité et leurs supplétifs.

La société civile burkinabè prend rarement la parole, souvent réduite au silence par la répression de la junte contre toute voix critique. La communauté peule est régulièrement stigmatisée au Sahel, accusée de composer le gros des rangs des groupes djihadistes ou de collaborer avec eux. En septembre, l’AFP avait rencontré plusieurs Peuls du Burkina, réfugiés en Côte d’Ivoire, qui avaient dénoncé les exactions des forces de sécurité dans diverses localités. «Chaque attaque djihadiste est suivie de représailles», a assuré un membre de cette communauté qui a fui la zone de Solenzo il y a un an, interrogé par HRW.

Le Burkina Faso est gouverné par une junte militaire arrivée au pouvoir par un putsch en septembre 2022, en promettant de rétablir la sécurité. Ce pays sahélien est pris depuis 2015 dans une spirale de violences djihadistes qui a fait plus de 26 000 morts, dont la moitié depuis le coup d’Etat de 2022, selon l’ONG Acled qui recense les victimes de conflits dans le monde.
 

 

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