Jeudi dernier, une victoire majeure a été remportée par les peuples autochtones du Brésil, en particulier ceux de l'Amazonie, à l'issue d'un procès qui avait débuté en 2021. La Cour suprême a confirmé leurs droits sur leurs terres, rejetant ainsi les positions défendues par le puissant secteur de l'agro-négoce.
Cette décision revêt une importance capitale, car les réserves attribuées aux autochtones sont considérées par les scientifiques comme des remparts essentiels contre la déforestation, jouant ainsi un rôle clé dans la lutte contre le réchauffement climatique.
Kleber Karipuna, directeur exécutif de l'Association des peuples indigènes du Brésil (Apib), a commenté cette décision en soulignant que c'était une "réponse très importante aux menaces et à la criminalisation que nous avons vécues ces quatre dernières années", faisant référence au mandat de l'ancien président d'extrême droite Jair Bolsonaro (2019-2022).
Cependant, cette décision constitue également un appel au gouvernement du président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva, qui est revenu au pouvoir en janvier, pour qu'il avance dans le processus de démarcation des terres indigènes, a ajouté Karipuna.
Le débat crucial lors du procès tournait autour de la thèse du "cadre temporel", qui était défendue par le lobby de l'agro-négoce au nom de la "sécurité juridique" des exploitants. Cette thèse ne reconnaissait comme terres légitimes pour les autochtones que celles qu'ils occupaient ou revendiquaient officiellement au moment de la promulgation de la Constitution en 1988.
Cependant, les autochtones ont expliqué que certains territoires avaient été abandonnés à cette époque en raison de leur expulsion, notamment pendant la dernière dictature militaire (1964-1985). Selon l'ONG Institut socio-environnemental (ISA), près d'un tiers des plus de 700 réserves indigènes déjà délimitées au Brésil, la plupart étant situées en Amazonie, auraient pu être affectées par cette thèse.
La décision de la Cour suprême, qui a fait jurisprudence, concerne spécifiquement le territoire Ibirama-Laklano, dans l'État de Santa Catarina (sud), qui avait perdu son statut de réserve indigène du peuple Xokleng en 2009 en raison d'une décision d'une instance inférieure. La Cour suprême a rétabli le statut de réserve indigène pour ce territoire.
En outre, les magistrats de la Cour suprême doivent encore se mettre d'accord sur des questions en suspens, notamment la possibilité d'indemniser les propriétaires de terres qui pourraient devenir des réserves à l'avenir. Les autochtones s'opposent à cette alternative au "cadre temporel", craignant que cela ne freine l'homologation de nouvelles réserves en raison du coût élevé que représenteraient les indemnisations pour l'État.
Le Brésil compte près de 1,7 million d'indigènes, soit 0,83% de la population, qu'ils vivent dans des réserves ou en dehors, selon les chiffres du dernier recensement.