La junte au pouvoir en Birmanie et trois groupes armés ont annoncé hier être parvenus à un accord de cessez-le-feu, facilité par Pékin, dans le nord du pays en proie à des affrontements violents depuis plusieurs mois. «Une réunion s’est tenue à Kunming (en Chine, ndlr). Nous avons conclu un accord de cessez-le-feu», a déclaré à la presse Zaw Min Tun, le porte-parle de la junte. «Nous nous sommes mis d’accord pour rouvrir le commerce frontalier» avec la Chine, a déclaré Tar Bhone Kyaw de l’Armée de libération nationale de Ta’ang (TNLA).
Depuis octobre, une alliance de plusieurs mouvements insurgés représentant des minorités ethniques a lancé une importante offensive contre l’armée, dans les régions proches de la frontière chinoise. L’alliance s’est emparée de plusieurs villes et carrefours frontaliers vitaux pour le commerce avec la Chine dans ce que les analystes considèrent comme le plus grand défi militaire lancé à la junte depuis son coup d’Etat en 2021. «Les deux parties ont convenu d’un cessez-le-feu immédiat, d’un désengagement du personnel militaire et d’une résolution des différends (...) par le biais de négociations pacifiques», a indiqué une porte-parole de la diplomatie chinoise, Mao Ning.
Médiation de la Chine
Les pourparlers, rendus possibles grâce à «la médiation et la facilitation» de la Chine, se sont déroulés mercredi et jeudi à Kunming (sud-ouest de la Chine), grande ville proche de la Birmanie, a précisé Mao Ning. La porte-parole n’a pas indiqué quelles zones étaient concernées par cet accord. L’alliance armée a affirmé la semaine dernière avoir pris le contrôle de Laukkai, une victoire importante et un coup dur pour la junte.
Depuis novembre, les habitants ont fui cette ville située près de la frontière chinoise dirigée par une milice alliée à l’armée. Laukkai est connue pour ses activités de jeu, de prostitution et d’escroquerie en ligne menées à partir de complexes où travaillent des milliers de personnes, dont beaucoup sont victimes de la traite des êtres humains.
L’alliance, composée de l’Armée de l’alliance démocratique nationale du Myanmar (MNDAA), de l’Armée de l’Arakan (AA) et de l’Armée de libération nationale de Ta’ang (TNLA), a déclaré que la ville était désormais sous son contrôle. La semaine dernière, à la suite d’informations faisant état de l’explosion d’un obus d’artillerie à la frontière entre la Birmanie et la Chine, Pékin avait exprimé son «vif mécontentement» quant au fait que les combats aient fait des victimes chinoises et a déclaré qu’elle prendrait «toutes les mesures nécessaires» pour protéger ses ressortissants.
En décembre, la Chine avait déjà annoncé un cessez-le-feu «provisoire» entre les belligérants. Mais les affrontements se sont poursuivis par la suite dans certaines parties de l’Etat Shan (Nord), et l’ambassade de Chine a demandé à ses ressortissants d’évacuer une zone située le long de la frontière commune en raison des risques pour la sécurité. Pékin avait monté le ton au début du mois et exprimé son «fort mécontentement» après des débordements sur son territoire qui ont causé des victimes côté chinois. Plusieurs médias locaux avaient alors rapporté qu’un obus d’artillerie en provenance de Birmanie s’était abattu en territoire chinois, et avait explosé.
La Chine a indiqué hier que les parties au conflit s’étaient engagées à «maintenir la paix et la stabilité à la frontière». «Les deux parties se sont engagées à ne pas compromettre la sécurité des frontaliers chinois et du personnel chinois en Birmanie», a précisé Mao Ning.