Bachir Hakem : «Nous plaidons pour une augmentation conséquente des pensions»

27/01/2022 mis à jour: 00:21
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Bachir Hakem. Enseignant à la retraite, syndicaliste / Photo : D. R.
  • L’Organisation syndicale des retraités algériens (OSRA) a réitéré sa revendication liée au non-versement de la revalorisation des pensions de retraite au titre de l’année 2021. Pourquoi ce retard ?

Partout dans le monde, la revalorisation des pensions de retraite est un droit qui s’opère à une date bien précise, généralement au début du mois de janvier. En Algérie, la date fixée est le mois de mai. Mais la dernière revalorisation accuse un retard de neuf mois. C’est du jamais vu, à tel point que cette année cela pose des interrogations.

Est-ce que le gouvernement veut l’abroger, ou bien cherche-t-il à pousser les retraités à manifester pour réclamer leur droit ? Et là ce serait grave car notre syndicat cherche à réclamer d’autres revendications autres que ces acquis. Le gouvernement est conscient de la chute vertigineuse du pouvoir d’achat des citoyens, et que parmi les catégories les plus touchées figurent les retraités qui ressentent depuis longtemps la marginalisation et le mépris du gouvernement.

L’OSRA avait déjà adressé des courriers au ministre du Travail à ce sujet et n’ayant eu aucune réponse, avait annoncé une action après la tenue de son conseil national qui a dû être suspendue à cause de la hausse des contaminations au coronavirus de ces derniers jours.

Le droit à une revalorisation de la pension est un acquis prévu dans la loi et les taux ont été annoncés, ils varient entre 2 et 7%, ce qui est très faible car cela ne couvre pas l’inflation de l’année 2021. De plus, plus de 2 millions de retraités sur 3,2 millions touchent environ 20 000 DA, mais malgré cela ils acceptent cette revalorisation qu’ils considèrent plus comme une aumône qu’autre chose.

La seule explication aujourd’hui du retard dans le versement de la revalorisation est que les responsables sont certes conscients de l’injustice faite aux retraités, mais qu’ils cherchent le pourrissement de la situation car, comme énoncé plus haut, la revalorisation est un acquis qui ne peut être remis en cause.

  • Votre syndicat relève que près de 2 millions de retraités n’ont pas bénéficié du barème de l’IRG et plus de 3 millions ne profiteront pas des augmentations de salaires ni de la révision du point indiciaire…

Les pensions entre 20 000 et 30 000 DA avaient un IRG d’environ 100 DA, donc l’exonération ne permettra pas une hausse de la pension. Plus de 2 mil-lions d’Algériens ne bénéficient pas de cette exonération alors qu’ils sont prioritaires. J’irai plus loin : le nouveau barème ne permet pas à ceux qui touchent jusqu’à 40 000 DA de bénéficier d’une hausse substantielle de leur pension.

Le nouveau barème est de la poudre aux yeux. Ce n’est qu’à partir de 120 000 DA qu’on aura des augmentations de plus de 5000 DA. Le nouveau barème n’est pas favorable aux couches les plus démunies et ne couvre pas la décision de lever les subventions. De plus, les retraités ne verront plus d’augmentation de leur pension jusqu’à une nouvelle revalorisation alors qu’ils n’ont pas encore perçu celle de 2021.

Seul un SNMG équivalent à 60 000 DA et en conformité avec une pension minimale équivalente à ce SNMG peut permettre de faire face à l’érosion du pouvoir d’achat du retraité et limiter la «casse» que provoquera la fin des subventions.

S’agissant du Point indiciaire (PI), tous les retraités affiliés à la CNR ne peuvent pas profiter de la hausse des salaires car leur pension n’est pas calculée en fonction du PI, à l’inverse des retraités du Fonds spécial des retraites (FSR) qui eux profiteront de l’augmentation des salaires : la pension d’un retraité du FSR est indexée au salaire d’un travailleur actif.

C’est tout bonnement la politique du deux poids, deux mesures entre les caisses des retraites. Sans une augmentation conséquente des pensions, les retraités devront se contenter de ces miettes qu’on leur refuse après des années de bons et loyaux services. C’est de la marginalisation, du mépris et de l’ingratitude.

  • Votre organisation a pris note de la décision du président de la Répu-blique (Conseil des ministres du 2 janvier 2022) de mettre en conformité les lois sociales avec les nouvelles dispositions introduites dans le cadre de la dernière révision constitutionnelle et les conventions internationales…

Nous avons déjà attiré l’attention des responsables sur le refus de la délivrance du récépissé d’enregistrement à notre syndicat (OSRA), en application de la loi 90-14 relative aux modalités d’exercice du droit syndical que nous considérons non conforme à la Constitution et aux conventions et décrets signés par l’Algérie avec l’Organisation internationale du travail (OIT), mais aussi mal interprétée.

L’OIT, qui considère le retraité comme un travailleur passif, invite des syndicats de retraités à ses conférences. Il y a des organisations syndicales, à l’instar de l’Union internationale syndicale (UIS) qui regroupe plusieurs coordinations et syndicats de retraités à travers le monde, parmi lesquels la Coordination des retraités des pays arabes, dont je suis le coordinateur régional.

Cette dernière vient d’adresser une demande au président de la République pour tenir son congrès en Algérie. Elle attend la réponse. Nous avons attiré l’attention du ministère du Travail sur le fait que l’article 53 de la Constitution dispose que le droit de créer des associations ou syndicats est garanti et qu’il s’exerce par simple déclaration.

Nous avons également évoqué l’article 69 de la Constitution qui reconnaît le droit syndical. Nous avons pris note du communiqué de la Présidence car il rejoint à 90% notre interprétation de la Constitution et des conventions de l’OIT. Nous espérons que les responsables consentent à légaliser notre organisation, à l’image de la Fédération nationale des retraités algériens (FNTRA) qui existe depuis longtemps. 

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