Le secrétaire général de l’UGTA, Amar Takjout, qui a été l’invité, jeudi, de la Chaîne 3 de la Radio nationale, affirme que pour son organisation, «le dialogue social reste une valeur sûre». Il a souligné l’importance de mettre sur la table toutes les questions en lien avec la vie des entreprises et la situation des travailleurs.
L’Algérie célèbre, aujourd’hui, le double anniversaire de la création de l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA) et de la nationalisation des hydrocarbures, correspondant au 24 février. La «fête» est un moment important pour le pays, qui commémore ainsi la lutte des travailleurs algériens contre le colonialisme français, et le recouvrement de sa souveraineté sur sa principale richesse naturelle, en l’occurrence les hydrocarbures.
Mais pas seulement. Au-delà des festivités habituelles organisées à travers le pays, la journée est aussi un moment pour évaluer les acquis du monde du travail algérien, 60 ans après l’indépendance et 34 ans après l’avènement du pluralisme politique et syndical.
Cette année, le double anniversaire intervient dans un contexte particulier. Un contexte marqué par, notamment, le débat autour du pouvoir d’achat et la situation des travailleurs et des entreprises. En effet, au-delà des assurances du gouvernement, qui met en avant les mesures prises pour «revoir à la hausse les salaires», «créer de nouveaux emplois» et «soutenir le monde de l’entreprise», des syndicats, eux, évoquent la réalité à laquelle ils sont soumis.
C’est le cas de l’UGTA, dont le secrétaire général, Amar Takjout, a été l’invité, jeudi dernier, de la Chaîne 3 de la Radio nationale. Ce dernier met d’emblée l’accent sur l’absence du dialogue social, tant au sein des entreprises, qu’au niveau de l’Exécutif.
Affirmant que, pour son organisation, «le dialogue social reste une valeur sûre», Amar Takjout souligne l’importance de mettre sur la table toutes les questions en lien avec la vie des entreprises et la situation des travailleurs. «Sans dialogue social, suivi de concertation et de négociations, on n’aboutit pas à beaucoup de choses. Le dialogue social est aussi synonyme de la réactivité de la société.
Cela va de l’entreprise, au monde de travail, à l’économie et au social. Le dialogue social est un outil à faire valoir à tous les niveaux pour dépasser les clivages au regard de ce qui se fait à travers le monde», affirme-t-il. Et d’insister : «Le dialogue social doit être porté par tous, y compris par les institutions, et doit être à la hauteur de la responsabilité de chacun.»
«Vérité des prix et des salaires»
Le patron de la centrale syndical revient, par la même occasion, sur sa dernière rencontre avec le président Abdelmadjid Tebboune, qui, selon lui, «a été réceptif à tous les problèmes» posés. «Après, il faudra traduire sur le terrain les mécanismes et les outils mobilisés ces dernières années pour réussir, créer des richesses et des emplois.
Voir le premier magistrat du pays réceptif à toutes ces questions est très important. J’ai beaucoup d’optimisme sur les questions à venir. Après, c’est aux travailleurs d’apporter un plus et aux responsables de traduire ces décisions et ces mécanismes. Y compris les chefs d’entreprise», souligne-il.
Poursuivant, Amar Takjout révèle l’ampleur de la détresse des travailleurs algériens qui subissent, selon lui, toutes sortes de pressions, y compris le harcèlement moral et sexuel. Pour fuir cet enfer, dit-il, ces travailleurs recourent à des congés maladie. «La santé dans le monde du travail, notamment la santé mentale, n’est pas prise en charge par les syndicats.
Des travailleurs partent en congé maladie, car il y a beaucoup de pression dans l’entreprise, comme il y a encore du harcèlement moral et sexuel. Il faudra légiférer et militer, voire traduire en justice ceux qui pourrissent l’environnement du travail», lance-t-il, avant de donner un chiffre inquiétant sur cette problématique. «10% des dépenses de la CNAS liées à la vie dans l’entreprise, c’est déjà beaucoup.
Là, on dépasse les 15%. C’est catastrophique ! A l’UGTA, on va mettre un département, à sa tête un professeur en médecine, qui va s’occuper de ces questions sensibles», précise-t-il.
Selon lui, le cadre du travail devra faire l’objet d’une étude scientifique. Car, indique-t-il, «il y a de la pénibilité et de la haute pénibilité». «Quand on perd sa santé, on ne peut pas la compenser avec de l’argent», lance-t-il, plaidant pour une concertation approfondie pour réformer le monde du travail. Il invite ainsi les syndicats à prendre en charge toutes ces questions, dont celle de la vérité des prix et des salaires «qu’il faudra mettre sur le table».
Amar Takjout aborde aussi le sujet des entreprises publiques en difficulté. «Il faudra d’abord faire un bilan pour tirer les conclusions», préconise-t-il. Ce sont autant de problématiques, et bien d’autres, qui doivent être abordées à l’occasion de ce double anniversaire. Commémorer, c’est bien, tirer les leçons pour corriger la trajectoire, c’est encore mieux…