A la croisée des cultures, la soprano Amel Brahim-Djelloul fascine tout autant qu’elle attire à elle des artistes de différents horizons. La cantatrice, native d’Alger et originaire de Miliana, est fortement sollicitée dans les grands opéras et autres concerts dans nombre de villes en Europe. Après ses prestations lors du Festival in Voce Veritas (Dans la voix de la vérité) 2024 à Franchevile et avec l’Orchestre de Chambre de Lyon, où elle a décliné les programmes Lucrezia, portraits de femmes et Les Noces de Figaro notamment, la chanteuse lyrique s’accorde un temps de répit avant d’aller à la conquête d’un autre public qu’elle emmènera vers les cimes de la Kabylie, à travers l’album Les Chemins qui montent. Cet opus, sorti en 2022, se veut un clin d’œil au troisième roman de la célèbre trilogie de Mouloud Feraoun, l’un des plus grands écrivains kabyles du XXe siècle. Un voyage poétique et musical envoûtant que proposent Amel Brahim-Djelloul et ses musiciens vers les sommets de Kabylie et ses chemins qui montent. Nous avons choisi le bon timing pour lui tendre la perche et répondre aux interrogations d’El Watan.
Propos recueillis Par Farouk Baba-Hadji
- La soprano Amel a campé lors du dernier festival In Voce Veritas de Lyon le personnage Lucrezia, la dame romaine. Comment le public a-t-il accueilli ce spectacle lyrique ?
Le public, venu nombreux, a accueilli la prestation avec beaucoup d’intérêt. Sur scène, je sentais cette écoute silencieuse, captée, je dirais, par le magnétisme du discours qui est très fort, très intense et contrasté. En somme, c’était un beau concert avec les Paladins sous la direction artistique de Jérôme Correas.
Ces dernières années, vous êtes fortement sollicitée à vous produire dans des concerts en France et dans d’autres villes en Europe. Vous mettez à rude épreuve vos cordes vocales, non ? C’est difficile en tout cas de rester performante avec la même agilité vocale …
Non, je ne mets pas mes cordes vocales à rude épreuve comme vous dites, car tout cela est un métier qui se fait avec une maîtrise, comme toute performance d’ailleurs. Il y a effectivement des périodes de grande intensité dans l’exercice du métier.
Mais il y a aussi des temps de repos de l’instrument et de ressourcement. Je fais très attention à mon instrument et pour rester performante avec la même agilité, je m’appuie sur une bonne technique vocale qui respecte l’instrument.
- Vous avez croisé la musique symphonique avec le patrimoine andalou et des partitions traditionnelles kabyles. Comment avez-vous vécu cette expérience et quels sont les albums que vous avez avez enregistrés ?
Oui, je dirais que c’est une expérience tout à fait harmonieuse et réjouissante. La réunion de ces deux mondes dans lesquels j’aime voguer me donne beaucoup de plaisir et permet de rendre l’art plus universel. Nous avons enregistré en 2008 avec mon frère l’album Souvenirs d’Al Andalus, un opus qui rend hommage à la musique andalouse et méditerranéenne.
Depuis, ce programme a été donné à de nombreuses reprises et même avec une version symphonique. L’année dernière, c’est à la musique kabyle que j’avais rendu hommage avec l’album Les Chemins qui montent, en collaboration avec Thomas Keck et Rezki Rabia.
Nous nous sommes produits dans plus d’une vingtaine de concerts et une version avec orchestre symphonique est en cours d’élaboration pour la saison prochaine… Cela nous tarde de pouvoir le présenter en Algérie !
- Après une longue absence dans les concerts animés en Algérie, Amel souhaite-t-elle être invitée à fouler la scène de l’Opéra d’Alger ?
Si cela ne tenait qu’à moi, je serais revenue en concert depuis longtemps. Je ne demande que ça ! Malheureusement, cela n’a pas encore pu se faire, mais j’ai bon espoir que les conditions puissent être réunies bientôt Inchallah pour que l’album Les Chemins qui montent puissent enfin venir à la rencontre de son public en Algérie qui nous le réclame depuis sa sortie.
- Depuis votre prestation lors de l’inauguration de l’Opéra d’Alger Boualem Bessaih en 2016, on ne vous a plus revue fouler la scène en Algérie. Serait-ce par désenchantement de votre part ?
J’ai été invitée à chanter à l’Opéra d’Alger à trois reprises depuis son inauguration : en novembre 2016 pour un concert dans le cadre du Festival culturel international de musique symphonique, en décembre 2016 avec le programme Souvenirs d’Al Andalus dans le cadre du Festival international de musique andalouse, et en janvier 2017 avec le programme Les 1001 Lunes de la Princesse Boudour.
Depuis, il y a eu des invitations que je n’ai pu honorer pour cause d’agenda serré et de la période du confinement imposé par la pandémie de Covid-19, notamment. Mais j’espère vraiment revenir en 2024 avec Les Chemins qui montent, Inchallah.
- En dehors des concerts et des opéras auxquels vous participez, y a-t-il des projets qui vous tiennent à cœur et que vous envisagez de concrétiser ?
Dans l’immédiat, j’ai plusieurs projets avec orchestre, notamment avec l’album Les Chemins qui montent sus-évoqué, mais aussi des projets mêlant le classique et le jazz, des projets de musique de la Méditerranée, des projets de musique baroque et un autre projet avec un quatuor à cordes.