Amar Takdjout, SG de l’UGTA, hier au forum d’El Moudjahid : «Pour regagner la confiance des travailleurs, il faut de la pédagogie»

09/01/2024 mis à jour: 01:29
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Amar Takdjout, SG de l’UGTA - Photo : D. R.

Le SG de l’UGTA estime que pour «regagner la confiance des travailleurs, il faut du travail et de la pédagogie, il faut reprendre les espaces de concertation et de dialogue, de rassemblement et de réunion…»

Amar Takdjout, secrétaire général de l’Union générale des travailleurs algériens (UGTA), a dévoilé hier, lors de son passage au forum d’El Moudjahid, les missions prioritaires de son organisation. L’urgence est la réorganisation de la centrale syndicale, motivée par divers facteurs, tels que les besoins changeants des travailleurs et l’évolution du paysage économique.

«Elle a une place et une philosophie qu’elle ne doit pas perdre», dira-t-il, reconnaissant qu’il y a eu «des dérives, des dérapages et des incompréhensions. La culture du clientélisme n’a pas commencé à l’UGTA. Elle a commencé dans la sphère politique.

Nous devons revenir à une organisation digne de ce nom». Au-delà des constats, l’heure est à la reconstruction. Cela implique de passer à l’action, de mettre en place des plans concrets pour remodeler et renforcer l’UGTA dans le but de mieux répondre aux besoins des travailleurs et de la société. «L’organisation est la clef de voûte.

C’est ma profonde conviction», met-il en exergue. Pour M. Takdjout, il faut apporter un argumentaire, car l’UGTA «n’a pas à apporter un programme, ce n’est pas un parti politique, ne cherche pas à accéder au pouvoir, ce n’est pas un programme alternatif mais elle est dans le devoir d’avoir des argumentaires pour défendre les intérêts des travailleurs.

Ma mission est de défendre le côté moral des travailleurs parce que souvent la question matérielle (demander des augmentations de salaires, de primes) prend le dessus sur les autres aspects», poursuit-il.

Il dresse un sombre tableau à ce sujet : «Aucun syndicaliste UGTA ou autonome ne s’est vraiment penché sur cette question ; combien de travailleurs ont été abîmés moralement dans les entreprises et les administrations ? Harcèlement, pression, hostilité dans le travail, c’est notre problème.

Ma vision est un syndicalisme qui défend les droits matériels et moraux des travailleurs», fait-il remarquer. Selon M. Takdjout, l’UGTA va s’engager à discuter avec les pouvoirs publics sur ces deux questions. «On ne sait demander que les salaires, on est devenus un tube digestif mais on ne pose pas le véritable problème du monde du travail et l’espace social», selon ses déclarations.

«Il faut organiser le monde du travail et non l’embrigader»

Selon les analyses du SG de l’UGTA, «la loi du travail, si elle est contestée par le syndicat, c’est parce qu’elle a été faite par le politique, on veut discuter d’égal à égal. Il faut changer les mentalités dans les entreprises et au sein de nos structures syndicales, c’est ce qui peut nous aider à nous faire respecter.

Pour regagner la confiance des travailleurs, il faut du travail et de la pédagogie il faut reprendre les espaces de concertation et de dialogue, de rassemblement et de réunion. Il faut dire la vérité aux travailleurs. Il ne faut pas cesser de travailler, réfléchir et produire des idées».

Concernant les lois sur les conflits sociaux, il précise qu’elles sont faites pour être appliquées. Mais il faut essayer de faire des propositions pour faire changer les choses. Parmi les insuffisances ou les lacunes, il cite la question de la restriction des grèves.

Souvent, dira-t-il, «le problème est de savoir si nous avons des capacités à écouter les interrogations de travailleurs. Souvent, on n’écoute pas, on laisse passer les choses, on ne discute pas, et cela peut aboutir à des contestations. Il faut organiser le monde du travail et non l’embrigader».

Concernant la retraite anticipée, il précise qu’il est plutôt favorable à une retraite après 32 ans de service qu’à une retraire proportionnelle, qui a des incidences sur la santé financière de la CNR.

Selon lui, il faut poser les véritables problèmes, car «une société c’est deux, un partenariat c’est deux, un dialogue social c’est deux, une négociation c’est deux, il faut que le logiciel change pour qu’on puisse régler les problèmes de la société, ce n’est pas uniquement le problème salarial, c’est un tout, on ne peut pas résumer le problème du pouvoir d’achat uniquement au salaire.

On doit faire un travail d’échanges, de formation, d’explication en faisant de la pédagogie». Concernant le pouvoir d’achat, il précise : «J’ai envie d’aboutir à un diagnostic, des analyses avec des propositions correctes qui peuvent répondre aux interrogations de la société actuelle mais ce n’est pas facile.» Il n’existe pas de solution unique, mais une combinaison de stratégies peut contribuer à améliorer le pouvoir d’achat des citoyens.

«Nos propositions sont la maîtrise des prix et l’accompagnement des entreprises qui ont des difficultés, vous avez aujourd’hui plusieurs types d’entreprises économiques, il y a celles qui ont beaucoup d’argent et ont des salaires relativement bons, il y a des entreprises juste moyennes et leurs salaires sont aussi moyens et d’autres entreprises qui peinent pour verser les salaires et il y en a d’autres qui n’arrivent pas à payer les salaires à la fin du mois.

Et il y a des entreprises déstructurées, on a beau injecter de l’argent, elles n’arrivent pas à s’en sortir. Il faut avoir le courage de poser ce problème.

Certaines subissent les contraintes du marché (absence de plan de charge), souvent les entreprises contractent des dettes pour payer les salaires parmi les mécanismes proposés la Caisse nationale du chômage qui règle le problème du chômage partiel», a mis en évidence M. Takdjout.

Il a salué les décisions prises par la président de la République concernant l’augmentation des salaires, «une volonté d’apaiser les esprits, mais maintenant comment freiner l’inflation pour qu’elle ne s’aggrave pas, toute la question est là». Concernant le dialogue avec le gouvernement, il dira : «Nous pourrons solliciter une tripartite pour discuter des problèmes ensemble.

On peut aussi demander une bipartite entre nous et les employeurs, ou entre nous et le gouvernement. Cependant, nous ne voulons pas de tripartite alibi, un moyen d’information, mais un moyen de réfléchir et trouver des solutions ensemble, dossier par dossier, question par question et sujet par sujet.

Les précédentes tripartites n’ont pas été au fond des problèmes économiques ou sociaux. La tripartite est l’art du compromis, et je le précise le compromis pas la compromission», conclut-il. 

 

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