Alors que leur détention était tenue secrète par Israël : Des prisonnières de Ghaza soumises à des traitements brutaux

07/01/2024 mis à jour: 03:19
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Des centaines de Palestiniennes croupissent dans les géoles de l’entité sioniste - Photo : D. R.

Depuis le 7 octobre dernier, 184 Palestiniennes croupissent dans les prisons israéliennes où elles survivent dans des conditions inhumaines.

Alors que bon nombre d’entre elles étaient portées disparues, 51 femmes enlevées par l’armée d’occupation ont été localisées à la prison Damoun, située à Haïfa, dans le nord de la Palestine occupée. Cet ancien entrepôt de tabac sous occupation britannique a été converti dès 1948, lors de la première Nakba, en centre de détention pour les détenus de la résistance palestinienne.

Les femmes, tout comme les enfants, occupent deux ailes qui leur sont réservées. Une bonne partie des personnes enlevées durant l’offensive terrestre israélienne à Ghaza et exposées dans la rue les mains ligotées, les yeux bandés, en sous-vêtements, et présentées comme des combattants de Hamas, y sont détenues.

Le 18 décembre dernier, l’association palestinienne des droits de l’homme Dameer a évoqué, dans un rapport rendu public, l’arrestation et le transfert de 30 femmes de Ghaza à Damoun, «où elles sont soumises à conditions très difficiles».

L’ONG a cité aussi des hommes, des enfants, des personnes âgées, des femmes malades et blessées : «Il est interdit aux détenues de Ghaza de communiquer ou d’interagir avec d’autres prisonnières dans différentes cellules de la prison. Elles n’ont pas accès à des visites d’avocats et reçoivent des repas insuffisants et de mauvaise qualité, ne bénéficient que d’un court temps de douche, ne dépassant pas 15 minutes, pour plus de 30 détenues.

De plus, leurs chambres sont perquisitionnées et fouillées quotidiennement.» Jeudi dernier, le président de Commission des affaires des prisonniers et ex-prisonniers en Palestine, Qaddoura Fares, a affirmé, sur la chaîne Al Jazeera, qu’il détient une liste de 51 femmes de Ghaza détenues à la prison Damoun, expliquant : «Il est difficile d’obtenir des informations sur les prisonnières de Ghaza.

Cependant, la Commission a pu, grâce à d’ex-prisonnières de Cisjordanie et de Jérusalem qui ont séjourné à Damoun, avoir des informations. Nous avons une liste de 51 détenues de Ghaza.» Selon l’intervenant, l’administration pénitentiaire refuse de permettre aux représentants de la Commission de rendre visite à ces détenues, affirmant qu’il n’y a pas de procuration de celles-ci.

Les prisonnières soumises à la torture

«C’est juste un prétexte pour nous empêcher d’avoir accès à elles. Nous sommes en train de chercher à prendre attache avec leurs familles afin d’avoir une procuration et de pouvoir rendre visite aux prisonnières le plus tôt possible.» Sur les conditions de détention, Qaddoura Fares évoque «des traitement brutaux et durs» à l’égard des prisonnières. «Lorsqu’elles ont été amenées en prison, elles se trouvaient dans une situation tragique.

Elles sont toutes venues en tenue de sport légère qui leur a été donnée – au lieu de vêtements – et la tête découverte, alors que la plupart d’entre elles portaient le hijab. Avant même d’arriver à la prison de Damoun, lors de leur transfert d’un campement à un autre, elles ont été agressées dans tous les postes par où elles sont passées jusqu’à leur arrivée à la prison.

C’est-à-dire du sud de la Palestine jusqu’au nord, elles ont transité par des centres où elles ont été insultées et fouillées de manière humiliante. Elles avaient les mains ligotées et n’avaient pas droit à des repas réguliers jusqu’à leur arrivée à Damoun où elles étaient en contact avec des prisonnières d’autres régions.»

Selon l’intervenant, lors de leur entrée à Ghaza, les forces d’occupation israéliennes «ont arrêté des centaines de Palestiniens, hommes, femmes, enfants et personnes âgées. Selon les témoignages de ceux qui sont revenus, l’occupation les a soumis à la torture pendant des jours».

Jeudi 4 janvier, les 51 noms des prisonnières de Ghaza détenues à Damoun ont été publiés par la Commission présidée par Qaddoura Fares et le Club des prisonniers palestiniens. Dans un communiqué commun diffusé jeudi dernier, les deux ONG ont expliqué que «le nombre de femmes détenues de Ghaza est supérieur à celui» annoncé, et que «les données concernent uniquement les femmes détenues dans la prison de Damoun».

Elles ont qualifié les conditions de détention de «tragiques», expliquant que les prisonnières étaient «confrontées à des abus et à des humiliations, comme tous les détenus de Ghaza», avouant ne pas connaître leur nombre exact, leurs lieux de détention, ou leur état de santé.

Israël refuse également que le Comité international de la Croix-Rouge leur rende visite. Les deux Ong ont exprimé leur crainte quant au sort des prisonniers et prisonnières de Ghaza «face à la persistance du crime de disparition forcée, malgré toutes les demandes et les appels lancés par les institutions auprès des instances internationales de défense des droits de l’homme, notamment les Nations unies, afin de révéler le sort des détenus», avant de rappeler que le nombre total des Palestiniens dans les prisons de l’occupation, jusqu’à la fin du mois de décembre 2023, était de plus 8800 et celui des détenus administratifs de 3291.

Propos obscènes, fouille à nu, passages à tabac, menaces de viol...

Ce n’est pas la première fois que des témoignages inquiétants sur les conditions de détention des Palestiniennes dans les prisons israéliennes sont relevés. Au mois de décembre dernier, l’Ong palestinienne Eddameer de défense des droits des prisonniers a dressé une situation terrifiante.

«Les femmes ont été soumises à la torture, aux abus, aux passages à tabac sévères, aux menaces qui équivalaient à des menaces de viol, et ont été utilisées comme otages pour faire pression sur un membre de leurs familles, en plus d’être soumises à des fouilles nues et humiliantes, à des maltraitances verbales et des insultes avec des mots obscènes. C’est ce qui ressort de la majorité des témoignages suivis par les institutions», écrit l’Ong.

Selon elle, «les crimes et violations contre les femmes se sont intensifiés après le 7 octobre, avec une escalade des arrestations dans les rangs de la gent féminine atteignant les 184 depuis le début de l’opération ‘‘Déluge d’Al Aqsa’’, le 7 octobre dernier.

Non seulement les femmes ont été la cible directe lors de ces rafles, mais également les épouses des détenus, leurs mères et leurs sœurs ont été menacées et sévèrement battues, certaines ont subi des blessures physiques, en plus des effets psychologiques que cela a entraînés».

L’organisation a mis en lumière «des données dangereuses liées à la réalité de la politique de détention des femmes, à travers le ciblage délibéré du corps des femmes par l’occupation, la torture, les abus, les fouilles à nu, l’obligation de retirer le hijab, la privation de leurs droits fondamentaux, la détention dans des conditions difficiles et tragiques dans les prisons et les camps».

Eddameer dit craindre pour la vie des dizaines de femmes ghazaouies arrêtées lors de l’invasion terrestre de Ghaza : «Aujourd’hui, l’intensité des crimes commis contre les femmes constitue le fait le plus marquant et le plus dangereux de cette étape, qui constitue le prolongement d’une longue histoire d’occupation visant les femmes.»

Mercredi dernier, la même Ong, ainsi que le Club des prisonniers palestiniens, le Centre d’information Wadi Hilweh et la Commission des affaires des prisonniers ont indiqué, dans une déclaration commune, que depuis le début de l’année 2023, Israël a arrêté près de 11 000 Palestiniens en Cisjordanie occupée, y compris dans la ville de Jérusalem-Est et à Ghaza, dont 5500 depuis le 7 octobre. Parmi les personnes arrêtées, figurent 300 femmes, certaines sont originaires des villes arabes d’Israël, et 1085 enfants. 
 

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