Alors que l’armée israélienne intensifie ses frappes sur Rafah : 28 000 Palestiniens massacrés à huis clos

10/02/2024 mis à jour: 00:49
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Photo : D. R.

27 947 personnes ont été tuées et 67 459 autres blessées depuis le début de la guerre contre Ghaza, selon les autorités sanitaires locales. Les frappes israéliennes sont désormais concentrées sur la ville de Rafah, au sud de l’enclave assiégée. Les raids intensifs menés sur la ville frontalière avec l’Egypte font craindre des boucheries de grande ampleur dans ce micro-territoire où sont entassés 1,3 million de déplacés.

Alors que les négociations autour d’une trêve se corsent, Israël continue à s’acharner contre la Bande de Ghaza en multipliant les boucheries. Selon le ministère de la Santé de Ghaza, 13 nouvelles tueries ont été commises par l’armée israélienne en 24 heures, entre jeudi soir et vendredi matin, faisant 107 morts et 142 blessés. «Un certain nombre de morts et de blessés sont toujours sous les décombres, et d’autres étalés sur la voie publique, les forces d’occupation interdisant aux secouristes et à la Protection civile de les évacuer», rapporte l’agence Wafa.

Les dernières victimes enregistrées portent à près de 28 000 le nombre de Palestiniens tués depuis le début de la guerre contre Ghaza. En effet, selon les autorités sanitaires locales, 27 947 personnes ont trouvé la mort et 67 459 ont été blessées dans les attaques israéliennes depuis le 7 octobre, en majorité des femmes et des mineurs.

La même source précise que 340 cadres de la santé sont tombés en martyrs depuis le début de l’agression sioniste, et 99 autres sont en détention. En outre, 123 ambulances ont été détruites par des frappes de l’oppresseur.

Dans ce bilan funèbre, il convient de signaler également le nombre des confrères palestiniens qui ont laissé leur vie sous les bombardements qui déchiquettent Ghaza, et dont le nombre s’élève à 124 morts, selon le Bureau gouvernemental des médias de Ghaza, après la perte de Nafez Abdel Jawad, journaliste de la Télévision palestinienne.

Ce dernier a été tué avant-hier avec son fils et des membres de sa famille ainsi que d’autres déplacés, suite à un raid aérien qui avait pris pour cible une carcasse où ils s’étaient réfugiés à Deir El Balah.

Un désastre humanitaire à Rafah

L’armée israélienne concentre, désormais, ses frappes sur la ville de Rafah, à l’extrême sud de la Bande de Ghaza où plus d’un million de personnes sont entassées en quête d’un abri sûr. «Après que l’armée israélienne a concentré ses opérations militaires sur les villes de Ghaza (nord) puis Khan Younès, plus au sud, le Premier ministre Benyamin Netanyahu a ordonné mercredi de préparer une offensive sur Rafah, ville située à la frontière, fermée, avec l’Egypte, où s’entassent 1,3 million de Palestiniens dont la grande majorité sont des personnes déplacées par les affrontements des derniers mois», indique l’AFP.

Cette offensive sur Rafah fait craindre le pire pour une population assiégée de partout sur ce micro-territoire d’une densité démographique au-delà du supportable et où le moindre raid peut provoquer un carnage. Et c’est d’autant plus préoccupant que le passage de Rafah est la seule fenêtre de respiration pour les 2,4 millions d’habitants de Ghaza dans la mesure où c’est le seul poste de transit de l’aide humanitaire.

«S’il y a une grande offensive à Rafah, nous pourrions voir à nouveau des centaines et des centaines de milliers de personnes en mouvement, tentant de fuir les combats», écrit Thomas White, directeur de l’UNRWA, dans un post publié hier vendredi sur le réseau X, avant d’alerter : «Nous ne serons pas en mesure de mener des opérations de manière efficace et sûre à partir d’une ville attaquée par l’armée israélienne.»

Au cours d’une conférence de presse donnée hier à Jérusalem, Philippe Lazzarni, commissaire général de l’UNRWA, a estimé que la situation est «très inquiétante», avec «une intensification des opérations et des bombardements» qui «se rapprochent», en parlant de ce qui se passe à Rafah. «Toute opération militaire de grande ampleur au sein de cette population ne pourra qu’ajouter une couche supplémentaire à la tragédie sans fin qui se déroule», a-t-il insisté, selon des propos cités par l’AFP.

«Il y a un sentiment de panique» car les déplacés acculés sur place «ne savent pas où ils pourraient aller», s’alarme le patron de l’UNRWA. «Je ne sais pas pendant encore combien de temps nous serons capables de travailler dans un tel environnement à haut risque», confie-t-il, désemparé.

La France n’a pas manqué d’exprimer son inquiétude face à l’intensification des frappes dans la région : «Nous sommes effectivement très préoccupés face à la poursuite des combats dans la Bande de Ghaza et notamment à proximité du grand passage de Rafah, parce que le passage de Rafah est un point vital pour l’acheminement de l’aide humanitaire dans la Bande», a déclaré, jeudi dernier, le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Christophe Lemoine, au cours d’un point de presse, rapporte l’AFP.

Priver la population asphyxiée de Ghaza d’accéder à l’aide humanitaire en bouclant le gouvernorat de Rafah constitue «une violation du droit international», a fait savoir le diplomate français, avant de rappeler que «la priorité absolue (…) c’est d’obtenir un cessez le feu immédiat et durable».

Un convoi de l’ONU ciblé

Au 126e jour de la campagne militaire israélienne, de nouvelles attaques aériennes soutenues par des tirs d’artillerie ont fait des dizaines de morts et de blessés dans divers secteurs de la Bande de Ghaza, depuis jeudi soir, indique Wafa. L’aviation de l’occupant a déclenché une série de raids meurtriers contre des zones d’habitation dans plusieurs quartiers de la ville de Ghaza, dont Haï Errimel, Sabra, Al Zaytoun, Tall El Hawa et Sheikh Ajleen. Ces raids ont fait de nombreuses victimes, d’après la même source, Wafa, sans en révéler le nombre exact.

Les ambulances, signale-t-on, n’ont pu accéder aux lieux de ces carnages, du fait des frappes intenses qui pleuvent sur ces zones, de la part à la fois de l’aviation et des drones israéliens, et qui «tirent sur tout ce qui bouge». La marine de guerre est également déployée en renfort en pilonnant le port de pêche de la ville de Ghaza, affirme l’agence palestinienne.

A Rafah, pas moins de 8 personnes ont trouvé la mort dans un raid aérien qui a ciblé deux habitations appartenant aux familles Al Sid et Al Nahal, à Rafah, informe l’agence Wafa. Non loin de là, à Khan Younès, d’autres cortèges de martyrs ont été recensés, suite au pilonnage massif qui s’abat sur la ville. Par ailleurs, on apprend qu’un homme âgé et un jeune Palestinien ont été tués par des tirs de snipers près de l’hôpital Nasser à Khan Younès.

A Deir El Balah, au centre de la Bande de Ghaza, des bombardements qui ont visé une habitation ont fait un nombre indéterminé de victimes. Non loin de là, à Al Zawaida, au moins quatre civils ont été tués dans des frappes ayant ciblé un jardin d’enfants abritant des déplacés. Au Nord, dans le camp de Djabaliya, d’autres civils innocents ont été fauchés, suite à des raids qui se sont abattus sur une zone résidentielle.

Devant cet acharnement sanglant contre la Bande de Ghaza, le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, est monté une nouvelle fois au créneau pour exhorter la communauté internationale à voler au secours de la population ghazaouie massacrée à huis clos depuis 126 jours.

Ce qui se passe en Palestine est «une blessure saignante dans la conscience collective», a-t-il martelé mercredi soir au cours d’une intervention devant l’Assemblée générale des Nations unies où il a présenté ses priorités pour 2024, indique l’APS. Avertissant contre les risques d’un désastre inimaginable à Rafah, M. Guterres estime qu’«une telle action aggravera considérablement le cauchemar humanitaire, avec des conséquences régionales majeures».

Et de lancer avec insistance : «Le moment est venu pour un cessez-le-feu immédiat, pour des raisons humanitaires». Le SG de l’ONU a exprimé, dans la foulée, le souhait que «cette étape conduise rapidement à des mesures irréversibles vers une solution à deux Etats». Jeudi, au cours d’une conférence de presse, Antonio Guterres a réitéré son appel à la paix en Palestine en répétant que «la situation à Ghaza s’aggravait».

Au passage, il a défendu ardemment l’UNRWA après que nombreux donateurs, et non des moindres, aient suspendu leur financement au profit de l’Agence onusienne pour les réfugiés palestiniens. «Il n’est pas possible de remplacer le travail de l’UNRWA à Ghaza», a-t-il tranché selon l’APS. Guterres a fortement déploré le fait que «les opérations humanitaires de l’ONU continuent de se heurter à des refus d’accès, à des retards, à des obstructions et à de multiples risques, notamment des tirs» de la part de l’armée sioniste.

A ce propos, il a affirmé qu’un convoi des Nations unies a été touché par des obus de l’artillerie navale israélienne, en début de semaine, précisant que «seuls 10 des 61 convois humanitaires prévus pour se diriger vers le Nord (de Ghaza) en janvier sont arrivés à destination».

«La riposte israélienne est excessive», avoue Biden

De son côté, Stéphane Dujarric, porte-parole du secrétaire général des Nations unies, a affirmé que le niveau de la faim a été multiplié par 12 dans la Bande de Ghaza. «Une nouvelle étude des partenaires humanitaires pointe vers une augmentation sensible des cas de malnutrition aiguë, soit 12 fois plus que le taux qui prévalait avant la guerre.

Ces premières conclusions suggèrent que sans des services adéquats de prévention et de traitement, la situation ne peut que s’aggraver», a-t-il soutenu. L’UNRWA prévient que 300 000 Palestiniens sont en danger dans le nord et le centre de la Bande de Ghaza, à cause de la pénurie critique des sources de subsistance. Le chiffre a été avancé par Philippe Lazzarini.

Dans un message posté jeudi sur la plateforme X, il fait remarquer : «La dernière fois où l’UNRWA a été autorisée à livrer de la nourriture au nord, c’était le 23 janvier.» Lazzarini poursuit : «Depuis le début de l’année, la moitié de nos demandes de missions d’aide au nord ont été rejetées. L’ONU a identifié de profondes poches de famine dans le nord de Ghaza (…).

Au moins 300 000 personnes vivant dans la région dépendent de notre aide pour leur survie. Empêcher l’accès, c’est empêcher une aide humanitaire vitale. Avec la volonté politique nécessaire, cette situation peut être facilement inversée». Même Joe Biden estime que «la riposte à Ghaza a été excessive». C’est ce qu’a déclaré le président américain, jeudi, au cours d’un échange avec des journalistes à la Maison-Blanche, d’après l’AFP.

«Je pousse très fort, très très fort pour que l’aide humanitaire arrive jusqu’à Ghaza», a assuré Biden. Washington a averti le boucher Netanyahu du risque d’un «désastre», suite à l’offensive engagée à Rafah. 

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