Alors que la formule fait consensus au plan international : Israël crache sur la solution à deux Etats

16/12/2023 mis à jour: 00:49
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Benyamin Netanyahu et Itamar Ben-Gvir vont précipiter toute la région du Proche-Orient dans le chaos - Photo : D. R.

Tel-Aviv marche à pas décidés vers une occupation intégrale des Territoires palestiniens, après avoir miné durant au moins plus de 20 ans les possibilités territoriales, politiques et sécuritaires d’une assise à l’Etat palestinien prévu par les accords d’Oslo et soutenu par l’ensemble de la communauté internationale, des soutiens les plus zélés de Tel-Aviv jusqu’à ses ennemis jurés.

Israël assume ouvertement de défier la communauté internationale et déclare ne plus vouloir entendre parler de l’option à deux Etats. Mardi dernier, Benyamin Netanyahu, mettant fin à de longues années d’ambiguïté, a livré le fond de ses résolutions et de ses pensées sur le sujet. «Je tiens à clarifier ma position : je ne permettrai pas à Israël de refaire la même erreur qu’avec Oslo», a-t-il tranché via une déclaration vidéo.

Le propos a été perçu comme une réponse directe aux recommandations et critiques formulées la veille, avec une inhabituelle fermeté, par le patron de la Maison-Blanche à l’encontre de Tel-Aviv.

Grosso modo, Joe Biden trouvait que le gouvernement se laissait trop dangereusement emporter par les élans de l’extrême droite et qu’il fallait rapidement y remédier par une redistribution des cartes politiques au sein du pouvoir israélien dans le sens de favoriser la solution à deux Etats. Mais au-delà de la réponse, il y a aussi que la machine est mise en branle en interne pour clore définitivement le chapitre des accords de paix d’Oslo et de leur objectif corollaire d’établissement d’un Etat palestinien doté de souveraineté.

Le contexte de guerre actuel et ses effets sur les forces sociales et politiques dans l’Etat hébreu offrent une opportunité que ne comptent pas laisser passer Netanyahu et ses amis suprémacistes ; un Israélien sur trois pense qu’il est possible de cohabiter avec un Etat palestinien, selon les derniers sondages, alors qu’ils étaient près de 70% à le penser au lendemain de la signature des accords.

Les mouvements de gauche, 
traditionnellement ouverts à la solution politique négociée, semblent eux-mêmes gagnés par les nouvelles tendances. Des médias israéliens rapportent que lundi dernier, lors d’une réunion à huis clos de la commission des affaires étrangères et de la défense de la Knesset (parlement), Benyamin Netanyahu s’est laissé à dire que «la mère de tous les péchés était Oslo».

C’est donc le centre du pouvoir, et non plus seulement les va-t-en guerre de l’extrême droite, qui avance à pas décidés vers une occupation intégrale des Territoires palestiniens, après avoir miné durant au moins plus de 20 ans les possibilités territoriales, politiques et sécuritaires d’une assise à l’Etat palestinien promis, non seulement par les accords d’il y a 30 ans, mais aussi par l’ensemble de la communauté internationale, des soutiens les plus zélés de Tel-Aviv jusqu’à ses ennemis jurés.

La paix comme principal ennemi

Les accords d’Oslo et l’objectif de deux Etats comme solution définitive constituent en effet le seul point d’accord international sur un conflit qui divise le monde depuis près de 75 ans. Mais il apparaît que dans les faits, les accords ont été enterrés avec l’assassinat d’Itzhak Rabin, deux ans après leur signature.

L’installation massive des colonies sur des portions de territoires réservées, la chasse régulière faite aux bédouins palestiniens, la répression et le système d’apartheid, puis l’œuvre assidue de décrédibiliser l’Autorité palestinienne, unique incarnation politique tolérée n’ont en effet pas attendu le 7 octobre et les attaques du Hamas pour plomber les horizons politiques du conflit.

Après avoir déployé depuis près de deux mois et demi la machine militaire pour écraser le dernier foyer actif de résistance à Ghaza, l’on ne se gêne plus désormais d’afficher le véritable objectif stratégique des opérations. Durant les dernières 48 heures, les déclarations d’officiels israéliens se sont en effet multipliées confirmant ce cap vers le fait accompli.

«Il n’y aura pas d’Etat palestinien ici. Nous ne permettrons jamais qu’un autre Etat soit établi entre la Jordanie et la mer», décrétait mardi dernier Shlomo Karhi, ministre des Communications au cabinet Netanyahu. Son collègue du Patrimoine, Amihai Eliyahu, l’illuminé qui n’excluait pas la possibilité de larguer une bombe atomique sur l’enclave palestinienne, a réaffirmé hier que Ghaza ne sera jamais plus palestinienne. Membre influente du Likoud, parti du Premier ministre, l’actuelle ambassadrice de Tel-Aviv à Londres a fait une démonstration plus sérieuse des intentions d’Israël sur la question.

Interviewée avant-hier par la chaîne britannique Sky News, Tzipi Hotovely s’est littéralement emportée contre l’«obsession» de la communauté internationale à voir s’établir un Etat palestinien ; une perspective à laquelle la réponse d’Israël «est  absolument non !» a-t-elle martelé.

Le reste de l’interview est un réquisitoire contre les agences de l’ONU, notamment l’Unrwa, dont les écoles serviraient à «enseigner le terrorisme», et un développement effronté sur la responsabilité de la partie palestinienne dans l’échec de la mise en œuvre, depuis 30 ans, des engagements des accords d’Oslo.

Après avoir prétendu exercer son droit à se défendre suite aux attaques du 7 octobre, requis et eu le soutien de ses alliés au nom du même principe, Tel-Aviv a vu culminer la pression diplomatique internationale pour l’amener à cesser les massacres, avec le dernier recentrage discursif opéré par Joe Biden.

Il se résout manifestement, aujourd’hui, à dévoiler ses cartes quitte à mettre son principal parrain, la Maison-Blanche, ses soutiens occidentaux et ses amis «normalisateurs» arabes dans un sacré embarras. Mais plus globalement, c’est là un défi inédit qui est lancé à la face de la communauté internationale. 

 

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