Alors que Bruxelles dégaine son «bazooka» face à Trump  : Le président américain va-t-il faire machine arrière ?

09/04/2025 mis à jour: 12:36
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Le président américain, Donald Trump, a imposé des tarifs «réciproques» à de nombreux pays

Dans une ère marquée par un «changement de paradigme» du commerce mondial, l’Union européenne se trouve aujourd’hui au cœur d’un conflit commercial d’une intensité inédite. Alors que les Etats -Unis, sous l’impulsion de politiques protectionnistes, rappelant celles des années 1930, imposent des droits de douane pouvant atteindre 20% sur des produits en provenance de l’UE, Bruxelles réagit avec une détermination affichée. 

Lors d’une réunion cruciale au Luxembourg, le commissaire européen au commerce, Maroš Šefčovi, a souligné, lundi, la nécessité pour l’Europe de s’adapter à ce nouvel ordre mondial. «Nous devons préparer une réponse robuste et soutenir nos entreprises pour pallier les hausses tarifaires américaines», a-t-il affirmé devant les ministres du commerce extérieur des 27 Etats membres. L’unité européenne se confirme du côté des responsables : le ministre suédois du Commerce extérieur, Benjamin Dousa, a plaidé pour une solution négociée, tout en rappelant que «toutes les options sont sur la table» afin de ne pas pénaliser davantage les entreprises européennes. 

Le ministre allemand de l’Economie, Robert Habeck, a pour sa part évoqué l’activation possible du «bazooka» commercial de l’UE : l’instrument anticoercition, adopté en 2023, qui autorise des représailles telles que le gel de l’accès aux marchés publics ou le blocage d’autorisations de mise sur le marché. Les tensions se sont accentuées le 12 mars 2025, lorsque Washington a annoncé de nouveaux tarifs sur l’acier, l’aluminium et un tarif de base de 10% sur la plupart des marchandises, avec un taux spécifique de 2 % visant l’UE. 

En riposte, Bruxelles a réactivé, dès le 1er avril 2025, des mesures de rééquilibrage suspendues depuis janvier 2024, appliquant des droits supplémentaires sur des produits emblématiques américains — bateaux, bourbon, motocyclettes — avant de préparer un nouveau paquet de mesures ciblant environ 18 milliards d’euros de biens américains. Les retombées économiques sont déjà visibles : les importateurs américains devront s’acquitter d’environ 6 milliards d’euros de droits de douane supplémentaires, un surcoût susceptible d’être répercuté sur les consommateurs. 

Du côté européen, la zone euro pourrait voir sa croissance ralentir de 0,3 à 0,5 point de pourcentage dans les mois à venir, alors que l’incertitude plane sur l’économie mondiale. Pourtant, certains économistes estiment que la fermeté américaine pourrait céder sous la pression des marchés financiers.

Desmond Lachman, du American Enterprise Institute, prédit que l’impact négatif des droits de douane sur l’économie américaine, notamment la hausse des prix à la consommation, pourrait contraindre Donald Trump à reculer afin d’éviter des répercussions politiques défavorables pour son administration. 

Des mesures unilatérales

Malgré ces prévisions, il demeure difficile de savoir si l’administration maintiendra sa ligne dure ou utilisera ces taxes comme un simple levier de négociation. Selon ses porte-parole, plus de 50 pays auraient déjà sollicité des discussions pour réduire leurs propres barrières douanières, suggérant que Washington pourrait privilégier des concessions bilatérales plutôt qu’un recul pur et simple. Malgré ce bras de fer, Bruxelles reste résolument attachée au dialogue. Ursula von der Leyen, présidente de la Commission européenne, a réitéré la volonté de négocier avec Washington, tout en affirmant que l’UE ne se laissera pas intimider par des mesures unilatérales. L’objectif affiché est de «restaurer un commerce équitable et mutuellement bénéfique, dans le respect des règles d’un système multilatéral qui a longtemps permis de stabiliser l’économie mondiale». 

Cette réponse collective et coordonnée pourrait marquer un tournant stratégique : en diversifiant ses partenariats et en accélérant ses accords de libre-échange avec d’autres régions, l’UE espère réduire sa dépendance vis-à-vis du marché américain et renforcer sa résilience face aux chocs externes. Alors que l’offensive tarifaire américaine remet en question l’ordre économique international, l’Union européenne se dresse, avec unité et détermination, pour défendre ses intérêts et garantir la stabilité de ses économies.  M.-F. Gaidi
 

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