L’enquête des services de la sûreté a révélé que l’exploitant des lieux utilisait un hangar pour le stockage de produits cosmétiques, et un autre comme atelier clandestin de fabrication de la vaseline.
Le juge d’instruction près le tribunal de Aïn Oulmène a ordonné, lundi dernier, le placement sous mandat de dépôt de trois personnes en liaison avec la terrible explosion qui a ébranlé, mardi 1er février, vers 15h25, la cité Maameche des 586 lots, où la déflagration a tué deux mères âgées respectivement de 35 et 38 ans et leurs six enfants (une fille et cinq garçons) de 4 à 16 ans, et fait 15 blessés, dont 2 graves.
D’après Amine Limane, procureur de la République près le tribunal de Aïn Oulmène, chef-lieu de daïra situé à 32 km au sud de Sétif, une fuite de gaz est la principale cause de l’explosion ayant en outre soufflé des habitations et de nombreux véhicules. Au cours d’un point de presse animé, hier, le magistrat a révélé que l’exploitant des lieux utilisait un hangar pour le stockage de produits cosmétiques, et un autre comme atelier clandestin de fabrication de la vaseline. Suite aux premières conclusions de l’enquête, le magistrat instructeur a ordonné le placement en détention préventive de l’exploitant des deux hangars et deux autres individus, lesquels seraient ses collaborateurs.
Les révélations du procureur mettent un terme aux spéculations et rumeurs des «gorges chaudes» ayant injustement pointé du doigt les propriétaires meurtris dans leur chair. D’après Amine Limane, les mis en cause vont devoir répondre de cinq chefs d’inculpation. Ils sont poursuivis pour «exploitation d’une structure classée sans autorisation», «mise en danger involontaire de la vie d’autrui», «homicides et blessures involontaires» et «mise à feu involontaire aux biens d’autrui».
Faisant l’objet des articles 19 et 102 de la loi 03-10 relative à la protection de l’environnement dans le cadre du développement durable, et des articles 288, 289, 290 bis et 405 bis du code pénal, les mis en cause risquent de six mois à 3 ans d’emprisonnement. La disparition tragique de deux femmes et six enfants ne plaide pas en faveur des prévenus. Il convient de souligner que huit jours après, le terrible accident est toujours d’actualité à Aïn Oulmène, où la population est sous le choc.
Des fabriques clandestines qui prolifèrent
«L’informel ne date pas d’aujourd’hui. L’atelier en question n’est pas la seule fabrique clandestine dans la région, où certains barons du gain facile ne trouvent aucune difficulté à mettre sur le marché divers produits contrefaits, dont le gel hydroalcoolique. Il est utile de remettre sur la table la question du registre du commerce qu’on ne trouve pas chez bon nombre de faux commerçants. Les fautifs doivent répondre de leurs actes. Il faut qu’ils payent pour les autres», ont déclaré à El Watan de nombreux habitants de la ville attendant avec impatience les conclusions finales de l’enquête.
Pour connaître la situation des sinistrés et les mesures prises suite aux instructions du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, nous avons pris attache avec Yacine Gabas, le nouveau P/APC de Aïn Oulmène. «Les deux habitations soufflées par l’explosion sont grillagées. On attend le rapport et l’expertise du CTC (Centre technique de la construction). Inhabitables, les deux bâtisses seront à 90% démolies.
Fortement endommagées, deux autres demeures sont en cours de réhabilitation. Composée de 27 personnes, les deux familles propriétaires des lieux sont provisoirement logées au niveau de l’auberge où elles ne manquent de rien», nous confie le premier magistrat de la cité. «Le terrible drame donne à réfléchir. Sur instruction du wali, une commission communale va non seulement recenser tous les dépôts existants en milieu urbain, mais procéder à la délocalisation des produits inflammables et dangereux à la fois. Pour éviter un autre traumatisme, il n’est plus possible de tolérer de telles pratiques dont nous héritons», conclut le P/APC d’une cité pansant difficilement ses plaies et blessures.
A propos de l’état de santé des blessés, Abdelkrim Dahane, Directeur de la santé et de la population (DSP) de Sétif, rassure. «Après un court séjour à l’hôpital Mohamed Boudiaf de Aïn Oulmène, la femme enceinte a rejoint sa famille logée temporairement au niveau de l’auberge. Comme je l’ai déclaré précédemment à El Watan, le blessé atteint de brûlures de 2e et 3e degrés se trouve actuellement à l’hôpital de Douéra, spécialisé en la matière. Souffrant de fractures, l’autre victime est prise en charge par les équipes du CHU de Sétif», précise le DSP.