Des dizaines d’Afghans ont manifesté hier à Kaboul pour dénoncer le sort réservé par l’Iran aux réfugiés afghans, après la diffusion sur les réseaux sociaux de vidéos montrant certains d’entre eux battus par des individus présentés comme Iraniens.
Environ 200 personnes se sont rassemblées sur une place du centre de la capitale afghane et ont brandi des pancartes appelant l’Iran à «cesser les mauvais traitements» et réclamant «justice». Les manifestations publiques sont interdites par les talibans, mais celle-ci a été autorisée, sous la surveillance attentive des forces de l’ordre.
«Les forces de sécurité iraniennes et même les gens ordinaires nous traitent mal désormais», a affirmé un manifestant, Manzoor Ahmad Farooqi, qui dit être revenu d’Iran après s’y être rendu il y a quatre mois. «Quand leurs policiers nous voient, ils nous plaquent au sol et nous battent.»
L’Iran, qui abritait déjà plus de trois millions de réfugiés afghans, a accueilli une nouvelle vague d’arrivants après la prise du pouvoir par les talibans en août. Pour échapper à la crise économique qui frappe leur pays, des milliers d’Afghans tentent chaque jour d’entrer en Iran pour y trouver du travail ou pour ensuite essayer de gagner l’Europe, en espérant y obtenir l’asile.
Les images diffusées ce week-end montrent des hommes, présentés comme des gardes-frontières iraniens et des citoyens iraniens, qui battent des réfugiés afghans. Leur authenticité n’a pas pu être vérifiée de manière indépendante. Dans un communiqué publié dimanche, l’ambassade iranienne à Kaboul les a jugées «sans fondement».
Ces vidéos ont suscité l’émotion en Afghanistan. Lundi, des dizaines d’Afghans ont scandé «Mort à l’Iran !» devant le consulat iranien à Hérat (Ouest), selon un journaliste de l’AFP. Ils ont aussi brûlé un drapeau iranien, brisé des caméras de vidéosurveillance équipant le bâtiment et jeté des pierres dessus. Selon un communiqué publié hier sur le site du ministère iranien des Affaires étrangères, l’ambassade d’Iran à Kaboul a aussi été visée.
L’Iran a indiqué dans ce communiqué avoir convoqué le chargé d’affaires afghan à Téhéran «pour protester vigoureusement» contre ces attaques, et avoir suspendu les activités de son ambassade et de ses sections consulaires en Afghanistan le temps d’obtenir «des assurances garantissant leur sécurité». Comme l’ensemble de la communauté internationale, l’Iran, qui partage une frontière de 900 km avec l’Afghanistan, n’a pas reconnu le gouvernement taliban.
Mais l’Iran chiite paraît avoir adopté une attitude moins hostile à l’égard des talibans, des islamistes sunnites, que lors de leur précédent passage au pouvoir, entre 1996 et 2001. Les deux pays avaient entretenu des rapports très crispés après l’assassinat de 10 diplomates iraniens et d’un journaliste par des talibans au consulat de Mazar-i-Sharif (Nord) en 1998.