Immigration en Méditerranée : Rome invite les ministres de l’Intérieur d’Alger, Tunis et Tripoli à des concertations

02/05/2024 mis à jour: 09:38
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Il existe une grande entente entre les présidents algérien, tunisien et libyen - Photo : D. R.

Recrudescence de la migration irrégulière en Méditerranée avec l’approche de l’été. L’inquiétude monte en Italie. Rome veut impliquer l’Algérie, la Tunisie et la Libye dans la mise en place d’un plan d’urgence. Une réunion quadripartite est prévue à Rome.

Les autorités italiennes ont indiqué que le flux migratoire vers ses côtes s’est quintuplé durant la semaine du 08 au 15 avril, en lien avec la clémence du climat, ce qui avait provoqué la visite, le 17 avril, de Georgia Meloni en Tunisie, pour la 4e fois en moins d’un an. Meloni n’a cessé de proposer des plans multiples pour lutter contre la migration irrégulière, sans trouver les fonds conséquents pour passer à l’acte.

A titre d’exemple, elle n’a pas pu débloquer des financements pour mettre en œuvre le plan Mattei qui promet de développer les pays pourvoyeurs de migrants. Quant au Président tunisien Kaïs Saïed, il a régulièrement insisté sur le fait que la Tunisie ne serait jamais une terre d’accueil pour les migrants subsahariens.

Les difficultés économiques et financières de la Tunisie ne l’ont pas empêché d’émettre un «Non catégorique» à l’Italie. La Tunisie de Saïed a été confortée dans sa position par le soutien de l’Algérie et les décisions du récent Sommet tripartite Tunisie-Algérie-Libye sur la question migratoire, refusant de protéger les frontières du sud de l’Europe.

Consciente des réserves des Tunisiens et des autres pays du Sud, l’Italie a changé de fusil d’épaule. Ainsi, le ministre italien de l’Intérieur, Matteo Piantedosi, a déclaré le 29 avril au journal italien La Stampa qu’il serait inutile d’installer un relais hotspot (point chaud) pour les migrants irréguliers en Tunisie et qu’il n’est même pas pertinent de parler de hotspot concernant le projet envisagé.

Piantedosi a souligné que la coopération italo-tunisienne en matière de lutte contre la migration irrégulière vise à mettre en œuvre des projets de retour volontaire vers les pays de départ. Le ministre italien a également indiqué qu’une prochaine réunion est prévue à Rome avec ses collègues d’Algérie, de Tunisie et de Libye, pour examiner cette proposition de rapatriement des migrants irréguliers chez eux, de manière volontaire et organisée.

La réaction italienne dénote d’une peur de perdre contact avec les partenaires du Sud, notamment la Tunisie, d’autant plus qu’ils suspectent un laisser-aller vis-à-vis du contrôle de la migration irrégulière de la part des autorités tunisiennes, chaque fois que le débit des migrants irréguliers devient plus fort à travers leurs frontières.

Le nouveau sur la question migratoire concerne ces derniers jours l’influenceuse camerounaise Clara Fowe, qui a diffusé les 26 et 27 avril des vidéos sur les réseaux sociaux à partir de l’oliveraie d’El Amra, l’une des régions que les migrants irréguliers ont choisie comme refuge (30 kilomètres de la ville de Sfax).

Les vidéos en question ont attiré l’attention des autorités sécuritaires tunisiennes et le parquet de Tunis a chargé l’unité centrale de la Garde nationale de l’Aouina de l’affaire. Clara Fowe a été appréhendée dans l’oliveraie d’El Amra, au nord de Sfax.

Le porte-parole des tribunaux de Sfax, Hichem Ben Ayed, a déclaré sur la radio Diwan Fm que les premiers éléments de l’enquête ont révélé que Clara Fowe est entrée en Tunisie de manière irrégulière, elle a été donc placée en garde à vue, en attendant d’autres détails que pourrait amener l’enquête.

Pour sa part, le porte-parole de la Garde nationale, Houssem Jebabli, a indiqué, le 29 avril à la Télévision tunisienne, que la tiktokeuse camerounaise se trouvait en garde à vue pour connaître les éventuels réseaux derrière son infiltration en Tunisie.

Le mystère Clara Fowe

D’autres sources sur les réseaux sociaux ont indiqué que Clara Fowe a brièvement transité par Ghardaïa, en Algérie, avant de se rendre en Tunisie. Est-elle en mission pour des services étrangers ennemis à la région ? L’enquête le dira certainement. Clara Fowe, une activiste sur les réseaux sociaux, dispose de dizaines de milliers d’abonnés.

Elle aurait tourné certaines chansons à Dubaï et travaillé comme animatrice sur une radio camerounaise. L'on s'interroge comment elle est passée de Dubaï et ses limousines de luxe à El Amra, sous une tente de migrants irréguliers, dans une oliveraie tunisienne.

Il serait très important de comprendre ce qu’avait bien pu faire Clara Fowe à Ghardaïa, si la version s’avère correcte concernant son passage en Algérie, et quelle serait sa mission en Tunisie, pour se permettre de troquer son luxe de Dubaï contre la misère des tentes de migrants irréguliers.

Par ailleurs, cette histoire de Clara Fowe a poussé, pour la première fois, le réseau tunisien des droits économiques et sociaux à lancer une alerte concernant l’arrivée massive de migrants irréguliers en Tunisie. Le réseau s’est interrogé sur les mesures à prendre pour protéger les frontières du pays. Problématique à suivre. 
 

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