Hommage : Michel Deguy, une écriture du partage

20/02/2022 mis à jour: 02:35
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Un des grands poètes vivants de ce siècle, de celui qui précède, vient de s’en aller retrouver «la mer allée / avec le soleil ». 

Michel Deguy nous a quittés mercredi 16 février. Les éditions Apic avaient inauguré en 2018 la collection « Poèmes du Monde » avec son anthologie singulière : Divan amoureux. Il avait accueilli le projet de cette collection avec enthousiasme et voulait à tout prix venir en Algérie à la rencontre d’un public amoureux de la poésie. Il se prendrait à charge lui-même, me disait-il. Il voulait débattre de littérature, de poésie, de problèmes linguistiques, de traductions… Il écrit dans sa présentation : «L’occasion m’est donnée ici de disposer des poèmes  sous un aspect»… 

Ce sera celui de l’amour. Amoroso comme la lettre. /Et puisque c’est un ami et un éditeur algérien qui m’accueillent, comme chez eux, sans prendre le bateau de l’importation, j’en profite pour cette déclaration (une des phrases de l’aimer, comme on sait… Je laisse les lecteurs découvrir l’importance du propos de Michel Deguy. 

Le voyage d’Alger n’eut pas lieu après la sortie du recueil. Une rencontre poétique a été organisée au Centre culturel algérien à Paris. Michel Deguy a lu avec Marilyn Hacker, Cécile Oumhani et Issa Makhlouf, tous publiés chez Apic. Mourad Yellès assurait la modération. Ce fut une belle célébration de la poésie dans la pluralité des langues. Le voyage à Alger n’était que retardé, pensait-il. Nous en parlions. Mais la pandémie empêcha tout déplacement. Puis vint la maladie, je le voyais lutter avec acharnement, continuant à travailler à de nouveaux livres quand bien même avec moins de force... Après tous ces mois de cancer, il s’est retiré paisiblement, chez lui.

Ce court texte du recueil, en pensée :

«Il est besoin d’un lecteur d’un geste d’un papier 
D’un miroir Tu es visage ma feuille mon échancrure
Je suis le tissu pour que tu sois ton vide La surface
Pour que froisse la main L’aber où l’eau s’aiguise
Racine où le sol tressaille Ton blanc mon noir
Le creux pour ma difficulté le blanc pour que je sois
Ce dessin que je ne serais pas Tu es peau pour
Mon alphabet J’étais l’air pour que tu n’engorges
Alvéole pour que tu fusses arcade»
Habib Tengour, Le K. B. 18 fév. 22

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