Hausse des prix des fruits et des légumes à Constantine : Vers une stratégie étatique globale ?

17/10/2024 mis à jour: 04:03
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Depuis plusieurs jours, les habitants de Constantine sont confrontés à une flambée intolérable des prix des fruits et légumes. 

Dans plusieurs marchés couverts de la wilaya, les légumes les plus consommés sont vendus à plus de 100 DA le kilo, exception faite de l’oignon, cédé à 80 DA. Une hausse qui pèse lourdement sur les foyers à revenus moyens, notamment les fonctionnaires. 

«Cette augmentation affecte considérablement nos dépenses, surtout pour un fonctionnaire dont près de la moitié du salaire est engloutie par les dépenses alimentaires. Même les récentes augmentations salariales restent dérisoires face à cette situation», s’indigne Karim, père de famille rencontré au marché Boumezzou du centre-ville de Constantine. 

Un autre consommateur déplore que le prix de la pomme de terre n’ait pas baissé depuis plus d’un an, oscillant toujours autour de 100 DA, tandis que les autres légumes affichent des variations d’une saison à l’autre. Lors de notre passage dans les marchés, les prix relevés étaient désolants: la tomate à 120 DA le kilo, le poivron à 150 DA, la pomme de terre à 120 DA, l’ail à 500 DA, les courgettes à 200 DA, les carottes à 100 DA, la laitue à 140 DA, l’aubergine à 120 DA, le concombre à 140 DA, le haricot vert à 240 DA, pour ne citer que ceux-là, alors que le gombo est à 650 DA. Pour les fruits, la situation n’est guère reluisante, avec des prix tout aussi exorbitants : la grenade à 150 DA, les pommes à 300 DA et la banane entre 300 et 350 DA. «Il est aberrant que  nos pommes produites à Batna soient plus chères que celles importées», regrette une consommatrice. 

Malgré une production relativement abondante, de nombreux citoyens ne parviennent plus à se procurer une alimentation variée et équilibrée. «Une famille nombreuse ne peut pas suivre un régime sain, comme recommandé par les nutritionnistes, qui prônent une consommation importante de fruits et de légumes et moins de pain pour prévenir les maladies chroniques. C’est ridicule», ironise un jeune homme. Alors, pourquoi une telle hausse et pourquoi l’État ne parvient-il pas à stabiliser les prix ? 

Dans un entretien accordé à El Watan, Rachid Gouaoura, président de la fédération du marché de gros des fruits et légumes à Constantine, a évoqué plusieurs facteurs à l’origine de cette flambée des prix. Il cite la «période transitoire» entre l’été et l’hiver, qualifiée de phase charnière pour l’agriculture, marquée par des changements climatiques qui influencent la croissance et la maturation des cultures. 

Les agriculteurs profitent de cette période pour préparer les terres aux cultures hivernales, ce qui peut perturber l’offre dans certains produits. Il annonce toutefois que la pomme de terre, produite en grande quantité à Oued Souf, inondera les marchés dès novembre. Malgré cela, son prix reste élevé, sachant qu’elle demeure un produit très consommé.

Une problématique plus complexe 

Pour expliquer cette hausse des prix, surtout pour la pomme de terre, M. Gouaoura souligne en premier lieu la contrebande et le trafic vers la Tunisie. «Tout le monde le sait, mais il appartient à l’État de prouver cela et prendre des mesures pour endiguer ce phénomène», a-t-il déclaré. 

Il ajoute qu’à Oued Souf, les surfaces consacrées à la culture de la pomme de terre sont immenses, assurant une production largement suffisante pour subvenir aux besoins de tout le pays. Il estime qu’un problème majeur réside dans les frais générés dans la chaîne d’approvisionnement, qui se répercutent sur les prix à la vente. «Si un légume est vendu à 30 DA, comment l’agriculteur pourrait-il couvrir les salaires de ses employés, une fois tous les frais pris en compte ?», s’interroge-t-il. 

L’autre fléau dénoncé est la conservation excessive des aliments dans des chambres froides. Prenant l’exemple des dattes, il explique que les meilleures récoltes sont souvent stockées dans des frigos, et ne sont pas mises sur le marché afin de maintenir des prix élevés. 

Il s’insurge contre cette pratique, qualifiant les prix actuels de «déraisonnables» et d’«injustifiés». Dans son magasin, il vend les grappes de dattes à 350 DA le kilo, tandis que les dattes en vrac sont proposées à 200 DA, des montants bien inférieurs à ceux pratiqués sur les marchés. 

Selon lui, un contrôle plus rigoureux des prix et des marges bénéficiaires s’impose. En conclusion, Rachid Gouaoura insiste sur l’urgence de supprimer le stockage frigorifique pour certains produits afin d’assurer une offre suffisante. Il appelle à multiplier les contrôles, affirmant que des agriculteurs agissent de concert avec des commerçants pour maintenir les prix élevés. 

«Une enquête rigoureuse est nécessaire pour comprendre si cette flambée est justifiée ou si elle relève d’une spéculation délibérée.

 Il faut imposer un plafonnement des prix des denrées alimentaires, particulièrement les fruits et les légumes», conclut-il.                                           

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