Guerre au Soudan : Un premier convoi d’aide arrive au sud de Khartoum assiégé

29/12/2024 mis à jour: 09:37
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Au total, 28 camions sont arrivés à Jebel Aulia, une localité située à 40 kilomètres au sud de Khartoum

Des habitants au sud de la capitale soudanaise ont reçu cette semaine le premier convoi d’aide depuis le début de la guerre entre l’armée et les paramilitaires qui dure depuis 20 mois et a dévasté le pays, ont indiqué des volontaires locaux, relayés hier par l’AFP.

Au total, 28 camions sont arrivés à Jebel Aulia, une localité située à 40 kilomètres au sud de Khartoum, a indiqué vendredi le réseau local Cellules d’intervention d’urgence,   dirigé par des bénévoles qui gèrent des cuisines communautaires, distribuent des colis alimentaires, organisent des évacuations et fournissent une assistance médicale. Le convoi comprend 22 camions transportant de la nourriture du Programme alimentaire mondial de l’ONU (PAM), un camion de Médecins sans frontières et de Care, ainsi que cinq camions chargés de médicaments de l’agence des Nations unies pour l’enfance (Unicef).


Le groupe local de volontaires et l’Unicef ont déclaré que les fournitures aideront à répondre aux «besoins urgents en matière de santé et de nutrition d’environ 200 000 enfants et familles». Jebel Aulia est l’une des nombreuses régions du Soudan confrontées à une famine massive après que les parties belligérantes aient coupé l’accès. 

Depuis le début de la guerre en avril 2023 entre l’armée soudanaise et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), rien n’entre ou ne sort de la zone sans l’approbation des deux parties. Les volontaires du réseau local ont dû négocier laborieusement pour obtenir un accès même minime, tout en étant constamment soupçonnés et menacés de  violence des deux côtés. «L’accès à la zone a été essentiellement coupé en raison du conflit», a déclaré Sheldon Yett, représentant de l’Unicef au Soudan, ajoutant qu’il a fallu trois mois de négociations pour faire passer le convoi. «Les camions ont été arrêtés à plusieurs reprises, et les chauffeurs étaient naturellement réticents compte tenu des risques encourus», a-t-il poursuivi. Le PAM a déclaré que certaines parties de l’Etat de Khartoum et celui d’Al-Jazira, plus au sud, pourraient déjà être confrontées à la famine, mais il est impossible de le confirmer sans données fiables en raison du manque d’accès. Les deux camps sont accusés d’utiliser la famine comme arme de guerre contre les civils.


«Tactiques de famine»

Le système de classification intégrée de la sécurité alimentaire (IPC), utilisé par les agences de l’ONU, a déterminé dans son rapport publié mardi que la famine s’est déjà propagée dans deux camps de déplacés dans l’ouest du pays et dans certaines parties du sud. La guerre depuis avril 2023 a tué des dizaines de milliers de personnes et déraciné 12 millions de personnes, provoquant ce que les Nations unies qualifient de plus grande crise de déplacement au monde. Dans son rapport, l’IPC a déclaré que 638 000 personnes sont désormais confrontées à des niveaux de faim catastrophiques, et que 8,1 millions de personnes supplémentaires sont au bord de la famine. L’IPC a déterminé que la famine sévissait dans trois camps du Darfour-Nord, dont Zamzam, où la famine a été officiellement déclarée en août, et parmi les résidents et les communautés déplacées des monts Nouba, dans la région du Kordofan-Sud. Entre décembre et mai, l’IPC a déclaré que 24,6 millions de personnes, soit environ la moitié de la population du Soudan, devraient être confrontées à «des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë». Le rapport indique que cela «marque une aggravation et un élargissement sans précédent de la crise alimentaire et nutritionnelle».

Selon le Programme alimentaire mondial de l’ONU, les zones de conflit intense, notamment certaines parties de la capitale Khartoum et d’Al-Jazira au centre du Soudan, «pourraient connaître déjà des conditions de famine», mais le manque d’accès aux données a empêché une classification officielle. Dans son rapport de mardi, l’IPC s’attend à ce que la famine s’étende à cinq autres zones du Darfour-Nord d’ici mai, ajoutant que 17 zones supplémentaires dans l’ouest et le centre du pays sont menacées de famine. Mary Lupul, directrice humanitaire de l’ONG Save the Children au Soudan, a qualifié le rapport de «terrifiant et d’échec du système mondial». 

«Les enfants sont les premières victimes de la famine et sont déjà confrontés à des décès évitables et atroces dus à la malnutrition et à la Maladie», a déclaré Mme Lupul. Elle a appelé à «un accès immédiat et sans entrave à tous les postes frontières et à travers le pays pour fournir une aide humanitaire à grande échelle et des livraisons commerciales».

En octobre, des experts de l’ONU ont accusé les belligérants d’utiliser des «tactiques de famine» contre des millions de civils.

Selon les agences d’aide, le gouvernement aligné sur l’armée a placé des obstacles bureaucratiques à leur travail et a profité de sa position d’autorité internationalement reconnue pour fermer les principaux points d’accès à l’aide. Seuls deux convois de l’ONU ont été autorisés à atteindre Zamzam depuis que la famine a été déclarée. La quasi-totalité du Darfour est désormais contrôlée par les FSR, qui ont également pris le contrôle de pans entiers de la région du Kordofan, au sud, et du centre du Soudan, tandis que l’armée contrôle le nord et l’est du pays. «Une famine prolongée s’installe au Soudan», a déclaré Jean-Martin Bauer, directeur de l’analyse de la sécurité alimentaire et de la nutrition au PAM. 

«Les gens s’affaiblissent de plus en plus et meurent car ils n’ont eu que peu ou pas d’accès à la nourriture depuis des mois et des mois».

 

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