Le théâtre régional de Constantine (TRC) Mohamed Tahar Fergani a renoué avec son grand public, samedi dernier, lors de la générale de sa nouvelle production théâtrale pour l’année 2022. Le spectacle est une adaptation du roman de Mohamed Dib Un été africain réalisée par Saïd Boulmerka en arabe dialectal, et la mise en scène est de Karim Boudechiche, avec la participation de 12 comédiens.
L’histoire se déroule dans la maison d’une famille algérienne à l’époque coloniale, en 1958-1959. Dans un décor traditionnel, le spectacle d’une heure décrit la vie quotidienne avec ses soucis, son ambiance, ses coutumes et surtout ses soirées caractérisées par ces chuchotements nocturnes ainsi que les conversations autour d’une meïda (table basse ronde), autour de l’avenir de Zakia (incarnée par Yasmine Abbassi).
Cette jeune fille rêveuse vient d’avoir son Bac et envisage déjà de continuer ses études et travailler comme éducatrice. Intelligente et instruite, Zakia croyait qu’elle n’est pas comme les autres filles de son époque et aura un avenir différent.
Malheureusement, la réalité l’a heurtée, lorsque son père (Adel Hamlaoui) et sa grand-mère paternelle Razia décident de son sort, lui annonçant son mariage «forcé» avec son cousin ivrogne Sabri (Mohamed Delloum). C’était le choc fatal pour Zakia qui plonge dans une transe en se posant des questions sur l’utilité de ses études et son existence.
En dépit de son niveau intellectuel, elle ne pourra pas échapper aux griffes des traditions et des coutumes de la famille algérienne. «Les études t’ont ouvert les yeux», lance la grand-mère. Le combat à Zakia devient double, contre les traditions et le colonialisme. L’héroïne, qui croit à la lutte fugue et rejoint le maquis.
La pièce a réussi également un intelligent brassage des autres œuvres de Mohamed Dib à l’instar de Mille hourras pour une gueuse et «L’incendie». D’ailleurs dans une des scènes, Arfia (Hadjar Seraoui) présentait la condition de la femme algérienne à l’époque. Du même endroit de l’autre côté de la scène, un autre cercle gréco-carsien éclairé a été consacré pour le fou Miloud (Djamel Mezouari) du film Les chroniques des années de braise. Un bel hommage rendu à Lakhdar Hamina. Dans un dialogue entre Arfia et Babanag de Mille hourras pour une gueuse a été intégré subtilement dans la pièce.
Un autre passage de l’œuvre de Talisman de Mohamed Dib a été inclus dans le rôle du capitaine français, quand il parlait de son affrontement avec un Baba Allal, qui disait : «Allez ! Tirez sur nous…». Durant cette série d’événements, on découvre qu’en réalité Sabri n’est pas ce clochard. Il était la personne qui a aidé Zakia à rejoindre le maquis.
À la fin, Sabri entre dans le cercle gréco-carsien de Miloud, disant El fathia ya zakia au même rythme d’El Fatahia ya Arfia. Qui est en réalité Sabri ? Selon le metteur en scène Karim Boudechiche, tous ces gens ont des références pour Mohamed Dib. «On avait cette idée depuis environ 3 ans. Nous avons également choisi Un été africain, pour inculquer à cette nouvelle génération les ouvrages des auteurs algériens et leur montrer les repères de notre identité et de notre culture.
D’un autre côté le but est pour dire que le combat de la femme algérienne continue toujours. À notre époque, et loin des grandes villes on trouve beaucoup de Zakia», a déclaré Karim Boudechiche à El Watan. Saïd Boulmerka explique également que le choix de cette œuvre est lié à la condition féminine, où certaines mœurs et traditions devraient disparaitre. «La rébellion de l’héroïne n’est pas à tort, mais à juste raison», a-t-il souligné.