L’ancienne ministre de la Justice, Christiane Taubira, s’est à son tour jetée hier dans le bain de la présidentielle française, avec l’objectif ambitieux mais quasi-impossible de rassembler un camp de la gauche fragmenté et déjà surchargé de candidats.
Après plusieurs semaines de faux suspense, Mme Taubira a annoncé sa candidature, déclarant vouloir répondre «aux colères» face aux «injustices sociales» et avoir l’intention de convoquer une «conférence sur les salaires» avec un programme qui repose sur la défense de la jeunesse, la justice sociale ou encore l’écologie.
«La pandémie a révélé une souffrance sociale qui a frappé toutes les générations», a-t-elle déclaré lors d’un rassemblement militant pour l’union de la gauche, dans le quartier de la Croix-Rousse à Lyon (centre), choix symbolique en clin d’oeil aux Canuts, les anciens ouvriers de ce quartier de la soie. «Je veux un gouvernement qui sache dialoguer au lieu de moraliser et de caporaliser», a-t-elle ajouté, en allusion à la polémique sur les propos du président Emmanuel Macron qui a dit vouloir «emmerder les non-vaccinés» contre la Covid-19.
A moins de trois mois du premier tour, la gauche compte donc désormais six principaux candidats : outre Mme Taubira, le dirigeant radical Jean-Luc Mélenchon, l’écologiste Yannick Jadot, le communiste Fabien Roussel, l’ancien ministre Arnaud Montebourg, toutefois proche d’abandonner, et la maire de Paris socialiste Anne Hidalgo. Aucun pour l’instant ne dépasse la barre des 10% dans les sondages.
Emmanuel Macron, pas encore officiellement déclaré, est toujours donné gagnant au premier tour devant la candidate d’extrême droite Marine Le Pen talonnée par la candidate de droite Valérie Pécresse.
Dernière à entrer dans l’arène, Christiane Taubira avait annoncé fin décembre qu’elle envisageait d’être candidate «face à l’impasse» d’une gauche plus que jamais divisée, assurant qu’elle ne serait «pas une candidate de plus» et mettrait «toutes ses forces dans les dernières chances de l’union».
L’ancienne députée de Guyane, région française d’outre-mer où elle est née il y a 69 ans, s’est illustrée pour l’électorat de gauche par son combat pour la loi reconnaissant la traite et l’esclavage comme un crime contre l’humanité et surtout pour avoir porté, en tant que ministre, la loi ouvrant le mariage et l’adoption aux couples homosexuels, adoptée en 2013.
Candidate à la présidentielle en 2002, elle n’avait recueilli que 2,32% des suffrages. Bien qu’elle n’ait pas enregistré pour l’instant de percée dans les sondages (4,5% dans un sondage début janvier), son entourage assure qu’elle suscite toujours «la ferveur» au sein d’un électorat de gauche déboussolé depuis la victoire d’Emmanuel Macron en 2017 et le délitement des partis politiques traditionnels.
«Christiane Taubira veut être l’antidote à la lassitude de l’électorat de gauche qui n’en peut plus de la dispersion», affirme Christian Paul, maire de Lormes (centre), qui fait campagne à ses côtés. Mais la situation reste extrêmement confuse. Mme Taubira compte sur une «investiture» citoyenne portée par un collectif organisant une primaire à gauche du 27 au 30 janvier... à laquelle les autres candidats de gauche ont refusé de participer.