Escapade dans le Fahs algérois : El Qadous Berceau de la poterie de canalisation mauresque(*)

07/05/2023 mis à jour: 12:19
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Qadous (*) est le nom d‘un des plus anciens et des plus illustres quartiers mauresques du fahs algérois. Localisé à moins d'une dizaine de km de la capitale, ce dernier jouissait, d’une grande réputation pour ses vestiges romains, ses carrières de pierres ainsi que sa source d’Aïn Ezzebboudja, littéralement la fontaine de l’olivier sauvage qui jaillissait au fond d’un profond ravin. 

Autrefois, c’est dans ce hameau historique des environs immédiats d’Alger que les maures fabriquaient grâce aux fours traditionnels, des buses de canalisation à base d’argile connues localement sous le nom de Qadous, d’où d’ailleurs le toponyme de cette localité. El Qadous est également le nom d’un petit affluent de l’oued el Kerma qui sillonne les vallons et les vallées du Sahel algérois.

 

La campagne alentour de cet ancien haut lieu était rendue célèbre par son terrain vallonné, autrefois dominé par une végétation touffue alliant coquetterie et sauvagerie. Sous le règne ottoman, cet endroit plein de verdure et de fraicheur était considéré comme le lieu de villégiature très prisé des négociants, des dignitaires turcs, des consuls et des bourgeois désireux de vivre loin de l’agitation de la Médina.

Quelques fermes mauresques et somptueuses propriétés particulières constituaient le hameau primitif qui occupait une étendue située à cheval entre plusieurs communes dont Draria, El Achour et Hydra. La zone urbaine qu’on appelle communément Sebbala, la fontaine en dialecte local en faisait jadis partie.  

El Qadous accueillie les toutes premières années de son existence de nombreuses familles d’origine andalouse qui se sont réfugiées à Alger à partir du quinzième siècle. Depuis la chute de l’émirat de Grenade (Gharnata) en 1492, des foules de migrants musulmans expulsés d’Espagne par la reine Élisabeth vinrent s’établir sur les côtes algériennes.  

C’est ainsi que nombre de tribus Mudéjares originaires de Grenade, de Murcie et de Castille, ou encore des Tagarins issus de l’ancien royaume de Valence, de Catalogne et d’Aragon, sont venus se fixer à Alger, El Biar, El Qadous, Cherchell, Blida, Koléa ainsi qu’à Fouka, où ils s’adonnaient particulièrement à la manufacture de la soie.

En fuyant l’Andalousie et les Emirats du nord de l’Espagne, ces derniers rapportaient dans leurs bagages une quantité non négligeable de plantations de toutes espèces de même qu’un savoir-faire et un savoir vivre dans de multiples domaines tels que les arts, les lettres, la musique, l’habillement et la construction. La ville de Valence fournissait à elle seule des milliers d’ouvriers, parmi ceux-ci des artisans tous corps d’état vivant essentiellement de l’élevage des vers à soie, des tisserands, des bijoutiers, des couteliers et bien d’autres métiers. On attribue à ces tribus émigrées, l’édification avec l’aide de la Régence d’Alger, de très nombreux bâtiments publics, fontaines et aqueducs pour approvisionner en eau Alger et sa banlieue.

Autrefois, c’est dans ce hameau historique des environs immédiats d’Alger que les maures fabriquaient grâce aux fours traditionnels, des buses de canalisation à base d’argile connues localement sous le nom de Qadous, d’où d’ailleurs le toponyme de cette localité. El Qadous est également le nom d’un petit affluent de l’oued el Kerma qui sillonne les vallons et les vallées du Sahel algérois.

La localité El Qadous fut érigée en commune rurale consécutivement à un arrêté  datant du 23 avril 1835, seulement ce projet n’avait pas aboutie, bien qu’on y ait le 6 mai 1835, installé à la tête de la toute jeune commune d’El Qadous, Van der Brock, un ancien pied noir résidant dans cette partie de la banlieue d’Alger. Celui-ci exploitait la ferme de « La Chasse » de son vrai nom haouch El Aâchach qui avait à une époque donnée, appartenu à l’autochtone Belkacem Benhallou. 

El Qadous est finalement demeuré à l’état d’une annexe administrative rattachée à Draria. Il faut savoir que ce cas n’est pas du tout singulier, car à l’époque coloniale, les tentatives d’implantations dans l’algérois n’étaient pas toutes couronnées de succès à cause des maladies infectieuses ou en raison surtout, de la résistance spontanée opposée par les tribus locales.  Il convient de citer à ce titre, les Haouchs de Baba Ali, Fouka Marine, Dechioued de Ouled Fayet, et D’kakna de Douéra qui avaient tous fait partie de ce grand projet avorté.

Au centre de l’ancien quartier El Qadous, dans le voisinage de l’enceinte d’une école qui reçut le nom de Baghdadi Lemou, se dressait autrefois une grande belle maison chapeautée de tuiles rouge qui a pendant de longues années servit de mairie et de classe unique. Ce grand pavillon d’inspiration coloniale aux murs fragiles, fut au cours de la période postindépendance convertit en habitation. Un carrefour tout proche de cette ancienne mairie, dessert les trois agglomérations de Draria, Tixeraïne, El Achour ainsi que le parc zoologique. C’est tout près de ce lieu historique que fut créé le premier centre de recherche nucléaire d’Algérie.

Dans un vallon ombragé situé à une encablure de ce fameux quartier, se voyait il y a longtemps, une fontaine alimentant un bassin et un ruisseau arrosant de son eau fraîche le décor champêtre d’un agréable café maure surnommé ‘’Qahwet El Qadous‘’.

La nécropole d’El Qadous à laquelle les riverains attribuent également le nom de Sebbala, fut à l’origine aménagée dans un décor bucolique; elle se trouve à une assez courte distance du centre historique. Par le passé, on pouvait apercevoir dans son enceinte un modeste mausolée accueillant le tombeau d’un saint personnage nommé Sidi Lekhal. 

Ce petit édifice d’allure simplette, blanchi à la chaux était à l’origine construit en pierres sèches. Un petit muret de 4 mètres de long et 2 mètres de large, s’élevant à peine de 50 cm au-dessus du sol, est tout ce qu’il reste de ce monument autochtone. Pour faire perdurer la tradition les fidèles de Sidi Lekhal se chargent régulièrement de l’assemblage des pierres éparpillées à l’ombre d’un bosquet d’oliviers et de figuiers, pour former les contours de la construction primitive.

A l’intérieur de ce mausolée tombé en ruine, il existe une minuscule qûbba délabrée au sommet légèrement vouté élevée à la mémoire de l’illustre marabout. Cette dernière est environnée d’un petit nombre de sépultures, appartenant vraisemblablement à  des proches du saint homme. 

Protégée d’une clôture grillagée vieillotte, le cimetière Sebbala est planté d’arbres aux essences diverses dont le pin, sapin et châtaigne.  A proximité de son entrée principale se dressent encore aujourd’hui deux bâtisses composées chacune d’un toit à deux versants, faisant naguère office de classe d’école et de salle de prière.

Plus loin, en remontant l’antique route El Qadous, on peut voir la nouvelle mosquée El Islah, dont la structure est remarquable par ses proportions gigantesques. Celle-ci est surplombée d’un superbe dôme en forme de bulbe d’un bleu étincelant, que domine un ornement métallique représentant une petite étoile enveloppée d’un croissant, emblèmes de la religion musulmane.

Dans la région d’El Qadous, à Béni R’biaâ précisément, on pouvait par le passé entrevoir niché dans la verdure, un groupe d’habitations précaires qui avaient été détruits par leurs propres occupants lors de la grande résistance qui a éclatée au lendemain de la chute du traité de la Tafna. Cet ancien douar des Béni R’biaâ était renommé pour son vieux cimetière jadis dominé par la qubba de Sidi Ahmed Bou K’fifa. Cet enclos funéraire situé tout près d’une mosquée baptisée El Qods, est couvert d’un beau bois d’oliviers plusieurs fois centenaires.

La tradition rapporte que le hameau des Béni R’biaâ, doit son nom à quatre enfants bergers qui recevaient de leur mère, chaque matin avant d’aller rejoindre les pâturages, une portion de pain correspondant au quart d’une galette.
 

 

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