Dr Mohammed Lakhdar Dahel. Médecin. Multiplicateur de semences et vice-président du cnif des céréales : «Les agriculteurs ont besoin de garanties pour vraiment se lance

11/09/2022 mis à jour: 21:42
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Propos recueillis par  Yousra Salem

 

-Quel est votre commentaire sur les récentes déclarations du ministre de l’Agriculture concernant le parcours de production du tournesol ? 
 

Ce n’est pas comme les céréales. Il s’agit d’autre chose et d’un autre monde. Le même malheur que celui du colza est en train de se reproduire, où on n’a parlé au préalable ni avec les transformateurs, ni avec les agriculteurs. Il y a un grand problème concernant le tournesol qu’il faut prendre en considération. Cela, en consultant les professionnels du terrain. D’abord je dois évoquer quelques éléments qui paraissent futiles, mais nécessaires dans la production des céréales, pour comprendre le monde du tournesol. 

Le premier point concerne le foncier et les problèmes d’héritage, où nous n’avons plus de grandes terres, mais des jardins avec des productions de potager. Deuxièmement, nous n’avons pas une semence performante, essayée par l’agriculteur sur son propre terrain. Par exemple, s’il ne trouve pas la semence adéquate pour un bon rendement, il sera obligé de prendre le Simeto, même s’il ne convient pas à sa terre et il n’y aura pas une bonne récolte. Le troisième point, qui est connu dans le monde entier, la nécessité de faire un semi précoce dans des années de sécheresse. 

A l’Est, cette opération s’étend jusqu’à janvier et les CCLS vendent la semence même en janvier. Le quatrième problème est le manque de laboratoires de contrôle et d’analyse des engrais. De visu et sur terrain, il n’y a pas de résultat. Qui me dira que cet engrais contient 52 phosphates et 12 azotes ; sa disponibilité fait également défaut. Par exemple à Guelma, il faut mettre l’azote en décembre, le produit n’est disponible qu’en 30 mars. Le Président avait raison de parler du respect de l’itinéraire technique, mais commençons par ces multiples détails qui peuvent augmenter la production. Et pourquoi ne pas faire l’irrigation goutte à goutte pour les céréales ? Nous l’avons essayé auparavant, donnant de bons résultats. 
 

Sur un autre plan, nos ingénieurs bénéficieront-ils de formations spécialisées ? Y aura-t-il un transformateur qui prendra la récolte ? La même erreur de la deuxième année du colza est en train de se reproduire pour le tournesol, au sujet duquel personne ne nous a concrètement parlé jusqu’à présent. 
 

Donc, en tant qu’agriculteur, vous n’êtes pas optimiste pour le tournesol et n’êtes pas tenté par cette expérience ? 
 

Personnellement, je ne suis pas optimiste et je ne ferai plus, ni tournesol, ni colza s’il n’y a pas de garanties. C’est un appel au ministre, où il faut mobiliser des contrôleurs, s’entretenir avec les professionnels du terrain et préparer les contrats après des négociations entre l’agriculteur et le transformateur. 

Chacun impose ses conditions sans pénaliser l’autre, et le ministère doit se porter garant assurant la continuité du programme et ne pas abandonner l’opération après la deuxième saison. Nous avons l’exemple de la région de Beja en Tunisie, où la moitié est consacrée pour le tournesol et l’autre pour les céréales avec la mise en place des anti-moineaux. Ça ne sera pas si méchant, même s’ils perdent 20% de la récolte. 

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