Dossier - Investissement dans la wilaya de Tizi Ouzou : Le développement des entreprises contrarié

29/01/2025 mis à jour: 16:43
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Durant ses visites sur le terrain, le wali de Tizi Ouzou, Aboubakr Essedik Boucetta, promet d’accélérer la régularisation de la situation des zones d’activité - Photo : D. R.

Des participants à une rencontre régionale organisée à Tizi Ouzou dans le cadre du programme Impact 70 lancé par Nesda (ex-Ansej) soulignent que l’absence de foncier industriel bloque le développement de leurs activités.

Plusieurs propriétaires de petites et moyennes entreprises font face au problème d’absence du foncier industriel pour implanter ou procéder à l’extension de leurs activités. Des participants à la rencontre régionale organisée, mardi et mercredi derniers, à  Tizi Ouzou, dans le cadre du programme Impact 70 lancé par l’Agence nationale d’appui et de développement de l’entrepreneuriat (Nesda, ex-Ansej), évoquent  l’absence d’assiettes de terrain pouvant leur permettre d’assurer la continuité de leurs projets.

D’ailleurs, en sillonnant les différents stands de l’exposition des produits des PME financées par Nesda, abritée, à l’occasion, par  la maison de jeunes Mouloud-Mammeri de Tizi Ouzou, nous avons remarqué que des jeunes essayent de créer de la richesse à travers leurs activités implantées dans plusieurs localités de la wilaya. Farid Leghima, l’un des investisseurs dans le recyclage du plastique et la fabrication de feuillards de cerclage en PET, qui a mis sur pied son entreprise en 2018, évoque les difficultés auxquelles il est confronté en raison de l’absence de foncier. «C’est une petite entreprise familiale qui  peut se développer facilement, car notre activité concerne un domaine qui nécessite d’être encouragé davantage  dans notre pays.

Il s’agit de la récupération et la transformation des déchets plastiques. Aujourd’hui, faute de terrain, notre chaîne de recyclage est à l’arrêt, car nous travaillons dans des locaux loués auprès d’un particulier», nous a confié ce jeune investisseur. Selon notre interlocuteur, il y a des équipements qui ne peuvent pas être démantelés à chaque fois pour les transporter vers d’autres endroits. C’est pour cela que la nécessité d’installer l’entreprise dans une zone d’activité s’avère une nécessité absolue.

«Notre chaîne de production est à l’arrêt»

«Notre chaîne de production (recyclage) est actuellement à l’arrêt. Et pourtant, notre investissement permet de créer 20 postes d’emploi  directs et plus de 30 indirects. La transformation du plastique  intéresse d’autres jeunes qui investissent dans ce créneau. L’ETS Aït Aoudia, implantée dans la commune d’Aït Toudert, dans la daïra des Ouacifs, à 45 km au sud-est de Tizi Ouzou, est spécialisée dans les gaines électriques. Même si ce genre d’investissement attire les jeunes, il n’en demeure pas moins que la question du foncier industriel est souvent soulevée par les concernés.

Dans la commune de Fréha, une autre unité, l’ETS Ouhachi, est également dans le recyclage des matières plastiques. La même entreprise assure aussi la fabrication et la transformation industrielle du papier pour toutes sortes de solutions d’emballage en carton ondulé, comme les caisses à poussins, barquettes pour les fruits et légumes. Cependant, l’absence de terrains freine le développement  de son activité, affirme le propriétaire de cette unité qui attend, a-t-il souligné, la viabilisation de la zone d’activité afin de procéder à l’extension de son projet.

Par ailleurs, nous avons également visité le stand de l’entreprise de montage et maintenance industriel spécialisée aussi dans les constructions métalliques et canalisations (Charp montage, ex-Remica) qui a vu le jour en 2006 à Aït Azouanze, dans la commune de Bouzeguène.  «Grace à l’efficacité de nos équipes techniques, dynamiques et hautement qualifiées, nous offrons des services de qualité», précise le gérant de cette société qui assure même le nettoyage et la rénovation des réserves de stockage des hydrocarbures.

Des zones d’activité en jachère

L’aquaculture est également un domaine qui se développe, ces dernières années, dans la wilaya de Tizi Ouzou avec la création de fermes dans les localités du littoral de la wilaya de Tizi Ouzou. Aqua Bivalvia, un projet financé par l’Ansej, figure parmi ces investissements implantés dans la région de Tigzirt. Il s’agit d’une ferme conchylicole spécialisée dans la culture des moules et huîtres creuses.

Un autre investisseur venu de la même daïra a également exposé ses produits. Il s’agit de Hakim Igoudjil qui travaille dans le traitement de surfaces métalliques, peinture époxy et chromage, en  employant  une main-d’œuvre de qualité compte tenu de la stabilité de son personnel ouvrier assisté par des spécialités dans le domaine de l’électronique et de la chimie.

Son activité  s’articule particulièrement sur la fabrication de rideaux électriques et le traitement de surfaces des métaux avec des techniques modernes et écologiques, revêtement en peinture et transformation des métaux ainsi que profilage de la tôle et fabrication de lames de rideaux métalliques. Aujourd’hui, il a d’autres perspectives d’investissement qui lui permettraient de développer davantage son métier.

L’absence de terrains consiste en l’un des obstacles majeurs qui bloquent  plusieurs jeunes investisseurs dans l’extension de leurs entreprises.  La viabilisation de la zone d’activité de Tigzirt sera ainsi d’un apport considérable pour booster l’investissement et le développement local dans cette région côtière de la wilaya de Tizi Ouzou.

C’est dans ce sens même que Bilal Achacha, directeur général de Nesda, a déclaré à Tizi Ouzou que des rencontres régionales sont organisées afin d’évaluer le travail des investisseurs financé par son organisme pour essayer de lever toutes les contraintes qui empêchent l’extension des entreprises. «Nous avons remarqué qu’il y a beaucoup de jeunes qui ont réussi. Il y a ceux que nous allons accompagner dans l’extension de leurs activités», a-t-il ajouté avant d’estimer que les PME sont le moteur du développement local. «Leur rôle est même central dans l’économie du pays,  car 97% des entreprises en Algérie sont des PME», a-t-il indiqué.

Le même responsable a, à l’occasion, écouté les préoccupations des jeunes qui ont mis en place leurs projets avec le soutien de Nesda. Il a également, tout en rappelant les  nouvelles méthodes d’accompagnement des projets dans le secteur de l’entrepreneuriat, plaidé pour des perspectives du développement des PME en exploitant les opportunités économiques de la région.

Toutefois, il est important de préciser que l’assainissement du foncier industriel demeure l’une des actions prépondérantes pour  la relance de la machine de l’investissement au niveau de la wilaya de Tizi Ouzou. Dans cette optique, d’ailleurs, faut-il le rappeler en outre, la commission de wilaya chargée de l’assainissement du foncier industriel a pu récupérer des terrains donnés en concession mais non exploités. Il y en a, d’ailleurs, beaucoup dans la wilaya de Tizi Ouzou. Que ce soit au niveau des zones d’activité ou bien à l’extérieur de celles-ci.

Le nouveau wali de Tizi Ouzou, en poste depuis novembre 2024, veut, semble-t-il, à travers ses rencontres avec les porteurs de projets et ses sorties sur le terrain donner un nouveau souffle pour l’investissement dans la région. C’est ce qu’il a, d’ailleurs, déclaré, il y a quelques jours, lors de son déplacement à Tigzirt où il a visité, entre autres, le projet d’extension de la laiterie Tifra Lait implantée dans la zone d’activité de cette commune côtière. Aboubakr Essedik Boucetta a promis d’intervenir auprès des de la Société de gestion du réseau de transport de l’électricité (GRTE) pour résoudre le problème d’alimentation en énergie électrique, afin de permettre aux investisseurs d’entamer leurs activités.

Récupération des terrains squattés et régularisation de ceux en litige

Dans le même sillage, le premier magistrat de la wilaya s’est également engagé à œuvrer pour la levée de toutes les contraintes qui bloquent le développement à  Tizi Ouzou. Les contraintes sont multiples, elles sont liées surtout à l’assainissement du foncier public  à travers la récupération des terrains squattés et la régularisation de ceux en litige. En effet, même les membres de l’APW ont souvent  évoqué la situation du foncier dans la wilaya. Ali Bacha, président de la commission investissement au sein de cette assemblée, a, lors de la dernière session de l’APW en décembre 2024, mis l’accent sur la nécessité de procéder à la viabilisation des 18 zones d’activité que compte la wilaya de Tizi Ouzou.

Et ce, a-t-il ajouté, pour offrir un cadre propice à l’installation des entreprises et à la création d’emplois. «Durant sa visite dans notre wilaya, le président de la République a parlé de l’importance de développer plus de zones d’activité dans la wilaya de Tizi Ouzou,  car il sait bien que notre région pourrait jouer un rôle important et stratégique même dans le développement économique national», a-t-il soutenu aussi, tout en plaidant pour un travail de coordination et de concertation entre les parties concernées, afin, a-t-il souhaité, d’assainir la question du foncier industriel et  permettre à la wilaya de Tizi Ouzou de connaître son essor dans le développement économique.

La récupération des terrains de l’Etat squattés dans plusieurs communes de la wilaya et les affecter pour l’implantation des projets susceptibles de contribuer au développement local est également l’une des actions nécessaires pour encourager l’investissement à Tizi Ouzou. D’ailleurs, la réglementation est claire. Elle prévoit même de sévères sanctions dans le cadre de la nouvelle loi n°23/18 du 28 novembre 2023. Les collectivités locales sont confrontées continuellement au problème de dilapidation du foncier public, au moment où des investisseurs préfèrent délocaliser leurs entreprises ou mettre carrément la clé sous le paillasson en raison de l’absence de terrains pour l’implantation de leurs projets ou l’extension de leurs activités. H. A.              

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