Diversification des ressources nationales hors hydrocarbures : L'alternative de l'or vert

02/03/2023 mis à jour: 06:06
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Les Assises nationales de l’agriculture, organisées mardi, au Palais des nations à Alger, en présence du président Abdelmadjid Tebboune, auront été un moment fort pour la relance de ce secteur stratégique. Un secteur qui a montré les énormes potentialités qu’il recèle au regard des performances réalisées en si peu de temps. La nouvelle stratégie mise en œuvre, et dont l’enjeu n’est autre que la concrétisation de la sécurité alimentaire du pays, a été débattue et affinée lors de ces assises, ses objectifs clairement identifiés et tracés, au double plan du niveau de production, des rendements que de la qualité, de la labellisation des produits pour pénétrer en force les marchés extérieurs, et les moyens de la relance de la production agricole sériés et mobilisés.

Face à l’enjeu planétaire de la sécurité alimentaire dans lequel est projeté le monde d’aujourd’hui, l’Algérie ne peut pas continuer à s’offrir le luxe de dépenser sans compter, laissant exploser la facture des importations des produits alimentaires, dans un contexte de crise géopolitique international généré par la guerre russo-ukrainienne, qui a reconfiguré les concepts de la paix et de la sécurité nationales et internationales autour d’un nouveau paradigme : celui de la sécurité alimentaire. Le défi de l’indépendance alimentaire rime avec celui de la souveraineté nationale. Le pari de l’autosuffisance alimentaire est inscrit dans l’agenda présidentiel pour 2025. L’Algérie post-indépendante s’est construite par la grâce des derricks de pétrole, négligeant l’or vert, l’agriculture, seule vraie richesse pérenne. La course aux approvisionnements en produits céréaliers, à laquelle on assiste à l’ombre de la guerre en Ukraine et des restrictions du marché mondial où les productions russe et ukrainienne accaparent la part du lion, inquiète et interpelle les consciences. Il faut se réjouir à cet égard de la prise de conscience des institutions du pays et des différents acteurs en relation avec le secteur agricole autour des nouvelles problématiques qui se posent au secteur de l’agriculture et qui conditionnent son renouveau. Les éléments de langage et les exigences du travail de la terre ne sont plus aujourd’hui ce qu’ils étaient jadis. La recherche de la performance, de la qualité, du placement des produits agricoles sur le marché international où la concurrence est implacable requièrent une nouvelle vision pour le secteur. Ces assises, les premières du genre, au regard de la thématique centrée sur un objectif aussi stratégique que la sécurité alimentaire érigée en tant qu’attribut de la souveraineté nationale, tranchent singulièrement avec les précédentes rencontres du secteur. D’abord par le timing. La volonté d’anticipation des crises majeures, conséquences des bouleversements de l’écosystème mondial, auxquelles pourrait être confronté le pays, est aujourd’hui là, le bon diagnostic des maux endémiques dont souffre le secteur est posé et les solutions arrêtées pour en finir avec les errements du passé.

Les tabous levés

L’idéologisation de l’économie a causé des dégâts incommensurables au pays. Le discours socialisant sur «le privé exploiteur» qui avait irrigué le débat sur la Charte nationale dans les années 1970 a continué à entretenir les tabous sur les choix socioéconomiques du pays, même après son ouverture à l’économie de marché. Aujourd’hui, les portes de l’investissement sont grandement ouvertes pour les porteurs de projets, avec, en prime, le concours de l’Etat qui s’engage à financer jusqu’à 90% les dossiers structurants de l’agroalimentaire, tels que le sucre, l’huile de table… Le président Tebboune s’y est personnellement et solennellement engagé lors des assises sur l’agriculture. L’Etat s’est affranchi par rapport à la place du privé national, créateur de richesse, le processus de développement du pays ; il encourage désormais, de manière décomplexée, au nom du patriotisme économique, la création de méga-exploitations agricoles intégrées et spécialisées, à la fois dans l’agriculture et l’élevage, comme cela se fait dans les grands bassins agricoles et d’élevage européens, aux Etats-Unis et en Amérique latine. En plus de la levée du tabou de la délimitation des superficies des exploitations agricoles relevant des terres domaniales, l’accès au foncier agricole est grandement facilité dans les régions du sud du pays, qui se sont révélées comme de véritables greniers agricoles du Nord, en fournissant blé, maraîchages et fruits et viandes de qualité. Des aides substantielles sont également accordées aux agriculteurs en termes de financement, d’engrais, de semences, de raccordement en électricité, eau… Au plan administratif, des instructions fermes ont été données pour régulariser la situation des concessionnaires fonciers dont les dossiers sont pendants au niveau des services concernés. L’autre raison qui incite à l’optimisme, à la suite de la tenue des assises de l’agriculture, réside dans l’implication active des compétences issues des différents instituts du secteur : Institut national de la recherche agronomique d’Algérie (INRAA), Chambre nationale d’agriculture (CNA), Centre national de contrôle et certification des semences et plants de la Direction générale des forêts (DGF). Prélude à la tenue des assises de l’agriculture, des ateliers, sous la forme d’états généraux du secteur agricole, auxquels ont participé 440 experts et professionnels, ont été organisés durant plusieurs mois au niveau de ces structures. Les recommandations issues de ces ateliers, qui ont porté sur «Les moyens et les facteurs de production», «La promotion des filières stratégiques», «L’organisation et l’accompagnement» et «L’économie forestière et le barrage vert», ont permis, peut-être, pour la première fois, de valoriser et d’impliquer pleinement les compétences du secteur agricole, en tant qu’acteurs de premier plan, dans l’élaboration de la stratégie nationale de la promotion de l’agriculture. On croit presque rêver quand on entend aujourd’hui des débats sur le secteur aborder des problématiques sur des innovations technologiques de dernière génération, dont les applications sont déjà introduites au niveau de nos exploitations agricoles. L’introduction de l’agriculture intelligente, qui permet, par exemple, à l’agriculteur de programmer, à l’aide de son mobile, l’irrigation de son exploitation, le recours à la technologie du drone pour la surveillance et le recueil des données des périmètres agricoles laissent présager un futur prometteur pour le secteur agricole dans notre pays. Il reste à espérer que le vent de révolution qui souffle sur le secteur agricole ne connaisse pas le même sort que les politiques agricoles expérimentées jusqu’ici, qui ont pêché par un manque d’ambition et de vision stratégique. 

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