Les économies émergentes et en développement seront probablement touchées de manière disproportionnée en raison de leur dépendance à l’égard des investissements directs étrangers et de leur exposition aux risques liés à l’approvisionnement en énergie et en matières premières.
L’économie mondiale, très différente aujourd’hui par rapport à ce qu’elle était il y a quelques années à peine, a connu des changements «sismiques» depuis la pandémie de Covid-19. D’importants changements structurels sont en train de façonner l’économie et les marchés financiers à travers le monde.
Des changements dus, selon l’expertise des différentes institutions internationales spécialisées en la matière, à cinq facteurs fondamentaux, à savoir la démondialisation, la décarbonation, la dette, la numérisation et la démographie. «Ces cinq facteurs établissent un espace de décision multidimensionnel pour les décideurs politiques et les investisseurs, d’où la nécessité d’une évaluation minutieuse», «car ils ont le potentiel d’avoir des impacts transformationnels» a-t-on considéré.
Premier facteur, la démondialisation. En effet, le recul de la mondialisation s’accélère à mesure que les tensions commerciales, les rivalités géopolitiques et la réévaluation des vulnérabilités de la chaîne d’approvisionnement catalysent la résurgence du nationalisme économique et la régionalisation du commerce. Selon le FMI, le nombre de restrictions commerciales imposées chaque année dans le monde est passé d’environ 1000 en 2019 à plus de 3000 en 2023.
Et avec l’arrivée de Trump aux affaires, ce nombre devrait encore augmenter. Selon le FMI, «la démondialisation pose des défis importants à la croissance économique et accroît considérablement les impulsions inflationnistes. La fragmentation des échanges réduit les gains d’efficacité résultant de la spécialisation et de la concurrence, et limite les économies d’échelle, tandis que la fragmentation financière limite les flux de capitaux transfrontaliers et accroît la volatilité macro financière».
Cela dit, les effets de la démondialisation ne seront pas uniformes. Les économies émergentes et en développement seront probablement touchées de manière disproportionnée en raison de leur dépendance à l’égard des investissements directs étrangers et de leur exposition aux risques liés à l’approvisionnement en énergie et en matières premières, estime la même source.
Dans le même temps, certains pays ou régions pourraient en bénéficier, à mesure que les relations commerciales établies se désintégreraient et que de nouvelles relations se formeraient. L’Asie du Sud-Est voit émerger de nouveaux modèles commerciaux, alors que les liens entre les Etats-Unis et la Chine s’affaiblissent.
Une nouvelle ère de croissance
Autre facteur, la décarbonation. En effet, et quel que soit le rythme du changement climatique, l’adaptation nécessite des subventions et un soutien budgétaire, ce qui est inflationniste, puisqu’il n’y a pas d’augmentation concomitante de la productivité ou de l’assiette fiscale. Si les obligations vertes et les prêts durables se développent, ils ne sont pas encore à une échelle suffisante pour relever ces défis.
Une certaine forme de soutien budgétaire sera inévitablement nécessaire pour combler le déficit. D’autre part, la démographie, qui est à l’origine d’un déclin de la main-d’œuvre, alourdit encore le fardeau budgétaire lié à la fourniture de soins médicaux et de prestations de retraite à une population vieillissante.
De même que l’augmentation de la dette mondiale qui a récemment atteint un record de 307 billions de dollars, ainsi que la hausse des taux d’intérêt au cours des deux dernières décennies, entraînera probablement une augmentation de la prime de risque pour l’émission de titres de créance supplémentaires et des coûts de service de la dette. «Une dette élevée limite la capacité d’un gouvernement à investir dans l’infrastructure, l’éducation et la recherche, qui sont les principaux moteurs de la croissance économique à long terme», a-t-on indiqué. Enfin et dernier facteur, la numérisation.
Cette dernière avec notamment l’intelligence artificielle (IA) promettent de fournir un contrepoids incertain mais indispensable aux forces qui freinent la croissance. Selon les données des organisations internationales spécialisées, et rien que pour l’IA générative, l’on estime la croissance de la productivité d’environ 1,5% par an et les avantages économiques totaux allant de 2,6 à 4,4 billions de dollars dans tous les secteurs.
Partant de ce qui précède, les experts, pour qui les interactions entre ces facteurs sont «complexes», prédisent une nouvelle ère de croissance mondiale. Des facteurs qui offrent également des opportunités uniques dans de nombreux secteurs, notamment le secteur financier, où d’importants flux de capitaux devront
être obtenus et gérés pour répondre à l’évolution de la demande.