Démissions et appels à des élections anticipées : Le cabinet de guerre israélien se déchire

11/06/2024 mis à jour: 07:52
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Benny Gantz a affirmé que Natanyahu se sert de la guerre pour se maintenir au pouvoir - Photo : D. R.

La diplomatie américaine reste figée sur le curieux pari d’un accord de cessez-le-feu que son allié israélien passe pourtant son temps à compromettre.

Benny Gantz, membre du cabinet de guerre israélien, a mis à exécution sa menace de quitter le gouvernement d’urgence avant-hier.  L’ancien chef d’état-major reversé dans la politique à la tête du parti centriste Union Nationale, ne cachait plus ses profondes divergences avec le Premier ministre sur la manière de diriger la guerre contre Ghaza et avait, il y a près d’un mois, lancé un ultimatum à Benyamin Netanyahu, le sommant notamment de ne pas s’obstiner à ignorer les orientations de Washington sur le sujet  et  ne pas rester otage des ministres de l’extrême droite. 

Lors d’une allocution solennelle, le démissionnaire a affirmé que le Premier ministre se sert de la guerre pour se maintenir au pouvoir en retardant toute issue. «Netanyahu nous empêche d’avancer vers une réelle victoire», a-t-il notamment accusé. Le dernier désaccord en date concerne la dernière proposition parrainée par la Maison- Blanche sur un arrêt des hostilités négocié à Ghaza.

Alors que les choses semblaient acquises pour un feu vert israélien, le Premier ministre, sous la pression de ses coalisés d’extrême droite, a louvoyé durant plusieurs jours avant de remettre de nombreux obstacles sur un chemin théoriquement déblayé, par la diplomatie américaine notamment, pour arriver à un accord.

C’est dans ce contexte qu’intervint étrangement l’«opération spéciale» menée par des commandos israéliens, soutenus en l’occurrence par les renseignements britanniques et américains, pour libérer les quatre «otages» aux mains des combattants du Hamas.

Opération qui, faut-il le souligner, a provoqué une véritable boucherie dans la population civile palestinienne à Nuseirat. Le sinistre «haut fait d’armes» est revendiqué par Netanyahu comme une victoire personnelle contre les partisans des négociations et lui sert actuellement de levier pour soigner une popularité au plus bas.

Benny Gantz ne s’est pas contenté de démissionner, accompagnant son acte de la demande de s’en remettre aux urnes pour débloquer la situation. «Pour garantir une véritable victoire, il convient qu’à l’automne, un an après le désastre, nous organisions des élections qui permettront d’établir un gouvernement qui gagnera la confiance du peuple et sera en mesure de relever les défis», a-t-il ainsi exhorté, avertissant que la politique du Premier ministre était en train de fissurer la société israélienne.

Dans la foulée, il a par ailleurs appelé l’autre membre influent du cabinet de guerre, Yoav Gallant, à laisser seul le Premier ministre face à ses alliés d’extrême droite, en déposant à son tour sa démission.

Le ministre de la Défense, même s’il ne remet pas en cause la conduite de la guerre à Ghaza, s’oppose quant à lui à la volonté affichée par le Premier ministre, contre l’avis de la majorité de la classe politique et des alliés occidentaux, d’occuper l’enclave palestinienne.
Le Premier ministre, qui semble avoir fait son choix de continuer à compter sur l’appui de l’extrême droite et sur l’ambivalence accommodante de l’administration Biden, n’a pas paru indisposé outre mesure par la défection de celui qui est présenté comme son rival politique.

L’ambivalence accommodante de Joe Biden

Dans un succinct post sur la plateforme X,   Benyamin Netanyahu a préféré appeler le démissionnaire à son devoir de préserver l’union des rangs au moment où l’Etat hébreu fait face à la guerre et ses «enjeux existentiels».  Les va-t’en guerre de l’extrême droite se frottent quant à eux franchement les mains.

Itamar Ben Gvir,  le ministre agité de la Sécurité intérieure, a ainsi vite fait de proposer ses services en avançant l’offre de remplacer le partant au cabinet de guerre. Il semble donc bien clair que l’écosystème de la guerre offre une garantie de survie politique  pour Benyamin Netanyahu et que ses intérêts se croisent, plus que jamais, avec ceux de l’extrême droite suprémaciste obsédée par une extension massive des colonies vers le territoire de Ghaza.

La diplomatie américaine reste quant à elle figée sur le curieux pari d’un accord de cessez-le-feu que son allié israélien passe pourtant son temps à compromettre. En énième tournée dans la région, Anthony Blinken, sitôt arrivé en Egypte hier, a mis la pression sur Le Caire, investi dans un laborieux effort de médiation avec Doha depuis huit mois, de convaincre le Hamas de revenir à la table des négociations.

Le secrétaire d’Etat américain a suggéré qu’un cessez-le-feu temporaire de six semaines était bon à prendre pour la partie palestinienne dans la mesure où il pourrait ouvrir la voie à un arrêt définitif de la guerre.

Le diplomate en chef de Washington feint d’ignorer que la primature israélienne a déjà signifié son refus catégorique d’envisager une cessation des hostilités prolongée au-delà des six semaines  et qu’elle exige même des «garanties» de la Maison-Blanche lui assurant le feu vert pour poursuivre l’offensive une fois cette parenthèse fermée.

Washington, qui ne formule pas de condamnations sur les derniers massacres perpétrés à Ghaza, a salué  la sanglante opération commando qui a libéré les quatre «otages» israéliens.

Sa focalisation sur un accord arraché d’urgence auprès du Hamas, en ce moment précis, prend les allures d’une exigence de reddition. Ce à quoi se refusent les dirigeants du mouvement palestinien jusqu’à présent, malgré l’intensification des opérations meurtrières et les pressions américaines par le truchement  des médiateurs.   
 

 

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