Crise politique en Tunisie : Kaïs Saïed a les mains libres pour instaurer un régime présidentiel

03/04/2022 mis à jour: 19:06
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Le président tunisien Kaïs Saïed est en passe de gagner son duel face à Rached Ghannouchi / Photo : D. R.

Résultats favorables aux options du président Saïed dans les premiers résultats de la Consultation populaire. 86,4% pour le régime présidentiel et 74% entre amendement de la Constitution et son renouvellement. Les consultés en ont marre du régime politique actuel.

Les 534 000 voix exprimées dans la consultation populaire ont été en majorité favorables aux choix du président Saïed. 86,4% préfèrent le régime présidentiel. 74% rejettent l’actuelle Constitution.

92,2% sont pour le retrait de confiance aux élus. 70,7% sont pour un mode de scrutin à listes uninominales. 75,7% considèrent que la magistrature actuelle n’offre pas la justice souhaitée. Un bon échantillon pouvant servir de base aux questions du référendum du 25 juillet prochain.

Les islamistes d’Ennahdha ont joué leur va-tout dans la réunion à distance de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) du 30 mars dernier. Ils savaient que le président Kaïs Saïed allait déclencher les procédures du référendum du 25 juillet prochain.

Leurs institutions seraient alors définitivement balayées. Rached Ghannouchi ne pouvait pas laisser faire le président Saïed sans bouger le petit doigt. Il a donc tenté le coup, porteur de plusieurs réactions possibles. Les développements de cette tentative ont toutefois abouti à un ratage monstre pour les islamistes, faute d’une quelconque assise populaire soutenant l’Assemblée des représentants du peuple (ARP).

Le président Saïed et son entourage ont saisi cette opportunité au vol pour les accuser de «putsch», dissoudre «constitutionnellement» l’ARP et les exclure du débat national, étant comploteurs contre l’Etat de droit, souhaité par le peuple et incarné par le président Saïed.

Le président Kaïs Saïed a, selon des observateurs, brillamment  manœuvré suite à ce semblant de putsch puisque, s’il leur avait laissé la main, ils pourraient avancer vers la nomination d’un autre gouvernement et ce serait effectivement une atteinte à l’unité de l’Etat.

Le coup a été bloqué et les perdants doivent payer, ne serait-ce qu’en les écartant du Dialogue national inclusif, puisqu’ils ont offert à Saïed le justificatif idéal pour les écarter. Par ailleurs, le Président a rapidement réagi en consultant les pays amis de la Tunisie et en rencontrant les bureaux exécutifs des organisations nationales, l’UGTT et l’UTICA, ainsi que le bâtonnier des avocats.

Les premiers participants au Dialogue national promis sont ainsi pratiquement désignés ; les exclus, aussi. Il s’agit d’Ennahdha, QalbTounes, Al Karama, ainsi que TahyaTounes et quelques indépendants, dont les députés ont participé à la plénière du mercredi 30 mars.

Les qualificatifs de putschistes par le président Saïed et sa référence à l’article 72 de la Constitution vont dans le sens de les punir, en les excluant du Débat national.

Consultation

Les composantes de l’ancien pouvoir (Ennahdha, Qalb Tounes et Karama) ont donc tenté leur coup, avant que le président Saïed n’avance vers le référendum du 25 juillet 2022 et le changement du régime politique.

La Tunisie ira vers un régime présidentiel et un scrutin uninominal pour la désignation de son Parlement, qui n’aura pas les pouvoirs du précédent, ceux précisés par la Constitution du 27 janvier 2014. C’est le référendum qui va renforcer les pouvoirs du président Saïed et ouvrir la voie au nouveau régime politique tunisien.

Les élections parlementaires du 17 décembre 2022 seront quasi-symboliques puisque la nouvelle ARP n’aura pas le même pouvoir que l’ancienne. Pour ce qui est du Dialogue national attendu en Tunisie, le président Kaïs Saïed a joué la montre contre les islamistes d’Ennahdha. Il a résisté à la pression de l’UGTT et ses critiques virulents l’accusant de tous les maux. Lesquelles critiques ont aidé l’ARP gelée à croire le moment opportun pour contrer le président Saïed.

Un faux calcul saisi au vol par le palais de Carthage afin d’exclure les protagonistes du putsch et de réunir, autour de lui, les deux centrales UGTT et UTICA, ainsi que le barreau des avocats. Il est à remarquer qu’aucune organisation nationale n’a exprimé de soutien à l’ARP dissoute. Seuls les partis Ennahdha, Ettakattol et Al Joumhouri ont condamné les décisions du président Saïed. C’est dire que le coup a été très bien calculé par la Présidence tunisienne et que la marche sera bien maintenue vers le référendum du 25 juillet 2022. 
 


 


 

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