Contes & histoires : Le livre des Mille et Une nuits

16/03/2024 mis à jour: 04:24
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HISTOIRE DU ROI SCHAHRIAR ET DE SON FRÈRE, LE ROI SCHAHZAMAN

Quand le roi Schahriar entra dans son palais, il fit couper le cou à son épouse, et de la même façon le cou des esclaves femmes et des esclaves hommes. 

Puis il ordonna à son vizir de lui amener chaque nuit une jeune fille vierge. Et chaque nuit, il prenait une jeune fille vierge et lui ravissait sa virginité. Et la nuit écoulée, il la tuait. Et il ne cessa d’agir de la sorte durant la longueur de trois années. Aussi, les humains furent dans les cris de douleur et le tumulte de la terreur, et ils s’enfuirent avec ce qui leur restait de filles. Et il ne resta dans la ville aucune fille en état de servir à l’assaut du monteur.

Sur ces entrefaites, le Roi ordonna au vizir de lui amener une jeune fille, comme d’habitude. Et le vizir sortit et chercha, mais ne trouva point de fille ; et, tout triste, tout affligé, il revint vers sa demeure, l’âme pleine de terreur à cause du Roi.
 

Or, ce vizir avait lui-même deux filles pleines de beauté, de charme, d’éclat, de perfection et d’un goût délicieux. Le nom de l’aînée était Schahrazade, et le nom de la petite était Doniazade. L’aînée, Schahrazade, avait lu les livres, les annales, les légendes des rois anciens et les histoires des peuples passés. On dit aussi qu’elle possédait mille livres d’histoires ayant trait aux peuples des âges passés et aux rois de l’antiquité et aux poètes. Et elle était fort éloquente et très agréable à écouter.
 

A la vue de son père, elle dit : «Pourquoi vous vois-je ainsi changé, portant le fardeau des chagrins et des afflictions ? Car sache, ô père, que le poète dit : ‘‘Ô toi qui te chagrines, console-toi ! Rien ne saurait durer : toute joie s’évanouit et tout chagrin s’oublie !’’» Lorsque le vizir entendit ces paroles, il raconta à sa fille tout ce qui était arrivé, depuis le commencement jusqu’à la fin, concernant le Roi. Alors Schahrazade lui dit : «Par Allah ! ô père, marie-moi avec ce Roi, car, où je vivrai, ou je serai une rançon pour les filles des Mousslemine et la cause de leur délivrance d’entre les mains du Roi !» Alors il lui dit : «Par Allah sur toi ! ne t’expose pas ainsi au péril jamais !» Elle lui dit : «Il faut absolument faire cela !» Alors il dit : «Prends garde qu’il ne t’ar rive ce qui arriva à l’âne et au bœuf avec le maître du labour ! 
 

Écoute donc :
 

FABLE DE L’ÂNE ET DU BŒUF ET DU MAÎTRE DE LABOUR

«Sache, ô ma fille, qu’il y avait un commerçant, maître de grandes richesses et de bétail, marié et père d’enfants. Allah Très- Haut lui donna aussi la connaissance des langues des animaux et des oiseaux. Or, le lieu d’habitation de ce commerçant était un pays fertile sur le bord d’un fleuve. Dans la demeure de ce commerçant, il y avait aussi un âne et un bœuf.

Un jour, le bœuf arriva à l’endroit occupé par l’âne, et trouva cet endroit balayé, arrosé ; dans l’auge, il y avait de l’orge bien criblée et de la paille bien criblée ; et l’âne était couché bien au repos ; ou bien quand son maître le montait, c’était seulement pour une petite course qui par hasard était urgente ; et l’âne revenait bien vite à son repos. 

Or, ce jour-là, le commerçant entendit le bœuf qui disait à l’âne : «Mange avec délices ! et que cela te soit sain, profitable et de bonne digestion ! 

Moi, je suis fatigué, et toi, reposé ; tu manges l’orge bien criblée et tu es servi ! Et si, des fois parmi les moments, ton maître te monte, il te ramène bien vite ! 

Quant à moi, je ne sers qu’au labour et au travail du moulin !» Alors l’âne lui dit : «Lorsque tu sortiras au champ et qu’on te mettra le joug sur le cou, jette-toi à terre et ne te lève point, même si on te frappait ; et quand tu te seras levé, vite recouche-toi pour la seconde fois. Et si alors on te fait retourner à l’étable et qu’on te présente les fèves, n’en mange point, tout comme si tu étais malade. 

Ainsi, efforce-toi de ne pas manger ni boire durant un jour, deux ou trois. De cette façon-là, tu te reposeras de la fatigue et de la peine !»
 

Or, le commerçant était là, qui entendait leurs paroles.

Lorsque le meneur du bétail vint près du bœuf pour lui donner le fourrage, il le vit manger très peu de chose ; et quand, le matin, il le prit au labour, il le trouva malade. 
 

Alors le commerçant dit au meneur du bétail : «Prends l’âne et fais-le labourer à la place du bœuf durant toute la journée !» Et l’homme revint et prit l’âne à la place du bœuf et le fit labourer durant tout le jour.
 

Lorsque l’âne retourna à l’étable à la fin du jour, le bœuf le remercia pour sa bienveillance et pour l’avoir laissé se reposer de la fatigue durant ce jour. Mais l’âne ne lui répondit aucune réponse, et se repentit le plus fort repentir.

 

Traduit par Dr Joseph-charles Mardus

(A suivre)

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