Conflit du Sahara occidental : «L’accord de pêche UE-Maroc devrait être annulé»

23/03/2024 mis à jour: 07:18
APS
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La Cour de justice de l’UE, siège à Luxembourg

L’avocate générale de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), Tamara Capeta, a estimé, jeudi, que la Cour devrait annuler l’accord de partenariat dans le domaine de la pêche durable conclu, en 2019, entre l’Union et le Maroc et que les melons et les tomates issus du territoire du Sahara occidental ne doivent pas indiquer sur leur étiquetage le Maroc comme pays d’origine. 

Selon l’avocate générale Tamara Capeta, la Cour devrait annuler la décision du Conseil portant conclusion de l’accord de partenariat dans le domaine de la pêche durable avec le Maroc pour plusieurs raisons. «En ne considérant pas le territoire du Sahara occidental et les eaux adjacentes à celui-ci comme étant séparés et distincts de celui du Maroc, le Conseil n’a pas respecté le droit à l’autodétermination du peuple du Sahara occidental», a-t-elle affirmé dans ses conclusions publiées jeudi. 

L’avocate générale de la CJUE a souligné, à ce titre, que «l’accord de pêche et le protocole de mise en œuvre méconnaissent l’exigence selon laquelle le territoire du Sahara occidental doit être considéré comme étant ‘‘séparé et distinct’’ de celui du Maro».

 «Cette situation est contraire au principe d’autodétermination tel qu’interprété par la Cour dans son arrêt de 2016» dans l’affaire opposant le Front Polisario au Conseil de l’UE, a-t-elle expliqué. En outre, selon l’avocate générale, l’absence d’un traitement séparé des deux territoires peut également avoir des répercussions sur le droit du peuple du Sahara occidental à jouir et à bénéficier de ses ressources naturelles, et ce, compris les ressources halieutiques dans les eaux adjacentes à ce territoire. 
 

En janvier 2019, l’Union européenne (UE) et le Maroc ont signé l’accord de partenariat dans le domaine de la pêche durable ainsi que le protocole de mise en œuvre. Cet accord a été approuvé par le Conseil au nom de l’UE. 
En juin 2019, le Front Polisario a demandé l’annulation de la décision du Conseil devant le tribunal. Dans sa requête, le Front Polisario a estimé que le Conseil n’a pas respecté le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui. Suite à cette requête, le tribunal a, dans son arrêt, annulé la décision du Conseil. En 2021, la Commission et le Conseil de l’UE ont chacun formé un pourvoi devant la Cour. L’avocate générale de la CJUE soutient, par ailleurs, que les melons et les tomates issus du territoire du Sahara occidental doivent comporter dans leur étiquetage une mention du «pays d’origine» reflétant leur provenance de ce territoire et que ces produits ne peuvent pas indiquer le Maroc comme «pays d’origine». 
 

A rappeler que c’est la Confédération paysanne, un syndicat d’agriculteurs français, qui a sollicité l’administration française d’interdire l’importation de melons et de tomates originaires du territoire du Sahara occidental en raison de leur étiquetage trompeur en ce qu’il indique qu’ils sont originaires du Maroc. Assimilant le silence de l’administration française à une décision implicite de rejet, la Confédération paysanne a saisi le Conseil d’Etat français qui a adressé à la Cour de justice différentes questions en interprétation de la réglementation de l’UE. 
 

A ce titre, Tamara Capeta rappelle, une nouvelle fois, dans ses conclusions, que l’UE et la communauté internationale considèrent que le territoire du Sahara occidental «jouit d’un statut séparé et distinct par rapport à celui du Maroc». «A l’instar du code des douanes de l’Union, la réglementation de l’Union en matière d’étiquetage des denrées alimentaires requiert dès lors d’indiquer le territoire du Sahara occidental comme pays d’origine des melons et des tomates cultivés et récoltés dans ce territoire», a-t-elle indiqué. 

Ainsi, l’avocate générale considère que l’absence de cette indication «heurterait la position affichée par l’Union sur le territoire du Sahara occidental et méconnaîtrait l’obligation de faire figurer des informations ‘‘correctes, neutres et objectives’’ sur l’étiquetage des denrées alimentaires ainsi que la décision du législateur de l’Union d’exiger une origine unique aux fins de l’étiquetage». Il s’ensuit, a-t-elle poursuivi, que «la mention du pays d’origine des melons et des tomates ne doit pas désigner un autre territoire que celui du Sahara occidental». «L’étiquetage de ces produits mentionnant qu’ils sont originaires du Maroc et non pas du Sahara occidental enfreint dès lors le droit de l’Union», a-t-elle soutenu.

Selon l’avocate générale, «l’absence de mention du territoire du Sahara occidental comme pays d’origine des melons et des tomates risque de tromper les consommateurs de l’Union dans leurs décisions d’achat». «Ce risque tient au fait que la réglementation de l’Union en matière d’étiquetage des denrées alimentaires entend précisément éviter qu’un étiquetage donne à penser qu’une denrée alimentaire provienne d’un lieu autre que son véritable lieu d’origine», a-t-elle ajouté. 

A noter que la mission des avocats généraux consiste à proposer à la Cour, en toute indépendance, une solution juridique dans les affaires dont ils sont chargés. Les juges de la Cour commencent, à présent, à délibérer dans ces affaires et les arrêts devraient être rendus à une date ultérieure. 
 

 

L’UA appelée à redoubler d’efforts pour permettre au peuple sahraoui d’exercer son droit

Le Représentant permanent de la République arabe sahraouie démocratique (RASD) auprès de l’Union africaine (UA) et son ambassadeur en Ethiopie, Lamine Aba Ali, a appelé la Commission africaine à consentir davantage d’efforts pour permettre au peuple sahraoui d’exercer son droit à l’autodétermination, en sa qualité de partenaire à part entière des Nations unies dans les efforts de règlement du conflit. Le diplomate sahraoui s’est exprimé lors d’une réunion de consultation et d’échange de vues avec la vice-présidente de la Commission de l’UA, Monique Nsanzabaganwa, tenue mercredi au siège de l’Union à Addis-Abeba, selon l’Agence de presse sahraouie (SPS). Après avoir évoqué les derniers développements de la question sahraouie, Aba Ali a appelé la Commission de l’UA à consentir davantage d’efforts pour instaurer la paix dans le pays et permettre au peuple sahraoui d’exercer son droit à l’autodétermination, en sa qualité de partenaire à part entière des Nations unies dans les efforts de résolution du conflit depuis l’adoption du Plan africain-ONU pour le règlement du conflit par le Conseil de sécurité des Nations unies. La réunion a également porté sur l’échange de vues sur les moyens de développer l’action commune entre la RASD et l’UA au profit du continent et de ses peuples, en cette conjoncture délicate marquée par l’émergence de nombreux défis dans plusieurs régions du monde, ajoute l’agence. 

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