Le Parti socialiste des travailleurs (PST) a reçu officiellement la notification judiciaire portant suspension de ses activités et fermeture de ses locaux.
Prononcée en janvier dernier par le Conseil d’Etat, qui a statué sur une plainte du ministère de l’Intérieur, la décision devient effective. Elle risque de concourir à la disparition d’un représentant d’un courant politique ayant une existence de près de 50 ans en Algérie.
Cette notification a suscité aussitôt des réactions dénonçant une grave violation des acquis démocratiques dans le pays. Parmi elles, il y a celle du Parti des travailleurs (PT) qui a exprimé sa stupéfaction. «Le PT exprime sa plus grande inquiétude car cette décision, qui vient confirmer la régression très grave sur le terrain des libertés démocratiques, est un développement qualitatif sans précédent qui consacre une violation brutale d’un des acquis démocratiques arrachés au prix du sacrifice de plus de 500 jeunes en octobre 1988», souligne le parti de Louisa Hanoune dans un communiqué.
Cette décision, ajoute la même source, «est d’autant plus grave qu’elle intervient dans une conjoncture nationale et mondiale de plus en plus dangereuse et qui pose comme jamais la nécessité que soient rétablies toutes les conditions du libre exercice de la politique pour l’impulsion d’un débat large et sans conditions afin que soient dégagés les moyens et mesures politiques, économiques et sociaux à même de sortir notre pays de l’impasse et par la même de préserver la nation des dangers». «Inconditionnellement attaché au multipartisme et plus généralement à la liberté d’organisation, le PT assure la direction et les militants du PST de sa solidarité effective», lit-on dans ce communiqué rendu public, vendredi.
Pour l’universitaire Adel Abderezak «le bâillonnement du PST est un très mauvais signe». «Parti d’obédience anticapitaliste et socialiste, le PST a une existence militante de près de 50 ans. Un demi-siècle d’histoire qui débute avec le GCR dans la clandestinité et se prolonge après octobre 1988 dans la légalité. Un parti qui porte le projet d’une gauche radicale si indispensable à notre champ politique.
Un parti qui a capté les énergies révolutionnaires des étudiants et jeunes travailleurs qui ont tenté de porter les luttes depuis les années 1970 jusqu’au hirak modestement et avec beaucoup d’abnégation», rappelle-t-il dans un texte posté sur sa page Facebook. Selon lui, le PST «essaye de rationaliser la colère sociale dans un projet de conscientisation politique avec beaucoup d’ardeur et certainement avec des erreurs et des travers». «Ce parti encore jeune d’histoire et dans sa composante doit exister, doit activer, doit avoir le droit de construire cette Algérie si revendiquée par le hirak. Bâillonner un parti est un très mauvais signe.
Lui reprocher son engagement dans le hirak est une entrave aux libertés politiques», lance-t-il. Le champ partisan, souligne l’universitaire, «est indispensable malgré son discrédit». «Il permet de rationaliser l’action politique, de capter la colère émeutière et de promouvoir la culture démocratique.
Un parti d’opposition est un garde-fou contre les dérives des partis au pouvoir. Il est, à travers les luttes politiques et sociales, un contrepoids aux politiques publiques des gouvernants.
Et c’est ça le socle d’une modernité démocratique et sociale si nécessaire à notre Algérie», précise-t-il, appelant à «remettre les clés au PST, car ce sont aussi les clés d’une espérance».
Après la notification de la décision judiciaire, la direction du PST compte saisir à nouveau le ministère de l’Intérieur pour connaître les procédures à suivre en vue de lever cette suspension.
Mais elle bute sur le silence du département de Kamel Beldjoud, qui refuse d’accuser réception de ses lettres, en contradiction avec la loi en vigueur.