Ce que l’Afrique attend de l’Europe

27/02/2022 mis à jour: 07:54
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Il y a de quoi être dubitatif, après le sommet qui a réuni la semaine dernière, à Bruxelles, les dirigeants de l’Union européenne (UE) et de l’Union africaine (UA). Ce fut un rendez-vous intercontinental qui n’a pas tenu sa promesse de «poser les fondations d’un partenariat rénové sur des bases équitables». 

Force est de relever, de prime abord, que la déclaration à l’issue des travaux de ce sommet a versé dans un satisfecit controversé : «Les accords de commerce existants entre l’UE et certains pays africains ont contribué à renforcer et à approfondir les échanges et le développement économique entre les deux continents.» Cette affirmation est pour le moins surprenante, d’autant plus qu’aucun bilan n’a été publié pour appuyer une telle autosatisfaction. 

Tout le monde sait que les partenariats jusque-là paraphés entre l’UE et les pays africains sont loin d’être équitables et surtout la partie des accords relative au transfert de technologies n’a jamais été appliquée. Les accords de partenariat économique signés entre l’UE et avec la quasi-totalité des pays africains sont loin d’être basés sur le principe gagnant-gagnant. 

Pire, ils n’ont fait que fragiliser davantage les économies des pays africains. Avec le démantèlement des tarifs douaniers sur les importations de produits européens, s’est établi un libre-échange à sens unique qui a privé de vulnérables Etats africains de précieuses recettes budgétaires publiques, et porté un coup dur à la compétitivité des modestes industries du sud de la Méditerranée. 

Les responsabilités de ce déséquilibre sont évidemment partagées entre l’Union européenne et les pays africains, puisque chacune des parties peut facilement et à tout moment dénoncer ces accords. 

Au lieu de déployer au Sénégal l’agence européenne de protection des frontières Frontex, pour «aider à lutter contre le trafic de migrants», il aurait été plus souhaitable que l’UE renonce d’abord aux accords commerciaux inéquitables avec les pays africains pour s’attaquer aux origines des migrations clandestines de plus en plus consolidées par ces accords déséquilibrés.
 

Dans le même registre économique, parmi les annonces faites lors de ce sommet, figure «un paquet d’investissements Afrique-Europe de 150 milliards d’euros au service d’une ambition commune pour 2030 et de l’agenda 2063 de l’UA.

 Ce paquet d’investissements contribuera à la mise en place d’économies plus diversifiées, inclusives, durables et résilientes». «L’UE et l’UA mobiliseront des fonds publics afin de stimuler les investissements privés en recourant à des instruments de financement innovants. Elles entendent en outre améliorer le climat des affaires et le climat d’investissement en réformant la gouvernance et en soutenant l’entrepreneuriat africain.

 A cette fin, des institutions financières internationales et nationales, telles que la Banque européenne d’investissement et la Banque africaine de développement, ainsi que des partenariats publics-privés seront également mobilisés», précise la déclaration à l’issue de ce sommet. 

Si le montant de 150 milliards d’euros n’est qu’une estimation forcément approximative des investissements souhaités, l’amélioration du climat des affaires et la réforme de la gouvernance sont dans la réalité une affaire strictement interne aux Etats et échappent totalement aux volontés affichées dans de telles déclarations de bonnes intentions rituellement formulées depuis la tenue du premier sommet, il y a 22 ans au Caire. 

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