Les journées portes ouvertes consacrées à la promotion de la santé dans les zones enclavées de la wilaya de Constantine se sont imposées comme un événement majeur, illustrant une volonté résolue d’améliorer l’accès aux soins pour les populations les plus vulnérables.
Ces initiatives, bien au-delà de simples campagnes de communication, se manifestent comme une réponse tangible aux besoins spécifiques de ces régions reculées. Dans cette optique, la Direction de la santé et de la population (DSP) de la wilaya de Constantine a inauguré hier, depuis la polyclinique de la commune de Messaoud Boudjeriou, la seconde phase de la troisième édition de ces journées. La caravane sanitaire, ayant notamment fait escale dans la localité rurale de Messida, située dans la ville précitée, a permis de constater certaines avancées infrastructurelles, tout en révélant des disparités persistantes en matière d’accès aux soins spécialisés.
Une équipe pluridisciplinaire, composée de médecins généralistes, internistes, chirurgiens-dentistes, pédiatres, sages-femmes, psychologues et paramédicaux de l’EPSP de Hamma Bouziane et de l’EH de Didouche Mourad, a rendu visite à plusieurs foyers de cette localité. Bien que l’amélioration des conditions de vie soit perceptible, notamment à travers l’aménagement de la voie principale, l’installation de l’internet, l’éclairage public, le raccordement au gaz et à l’électricité ainsi que l’approvisionnement en eau potable, la question du transport demeure un obstacle majeur pour de nombreux habitants, en particulier pour accéder à des établissements hospitaliers bien équipés.
Les témoignages recueillis soulignent les difficultés rencontrées pour obtenir des soins adaptés, notamment pour les personnes âgées ou souffrantes de pathologies chroniques. «Nous sommes contraints de recourir à des transporteurs informels, qui nous demandent 80 DA par personne pour nous emmener à Aïn El Karma. Et parfois, il est difficile d’en trouver», a déploré un habitant interrogé sur place.
Les résidents ont également fait remarquer que la salle de soins ou la polyclinique la plus proche se trouve à plusieurs kilomètres de leurs domiciles, rendant les déplacements compliqués pour des soucis de santé qu’ils tentent souvent de gérer par des moyens traditionnels. Ce constat a été corroboré par la directrice de la santé, Lynda Boubguira, qui a souligné que ce genre de zones est très éloigné des établissements de santé disposant de services de chirurgie et de spécialistes, souvent absents dans les salles de soins locales. Elle a ajouté qu’il s’agit de personnes démunies et âgées, incapables de se permettre de longs déplacements. Certains sont «grabataires», rendant tout déplacement difficile. Les consultations réalisées sur place ont révélé des situations complexes, où coexistent souvent des pathologies multiples et chroniques, aggravées par l’absence d’un accès à des diagnostics précis et à des traitements adéquats. Le cas d’un homme de 67 ans, souffrant de troubles intestinaux et oculaires, illustre parfaitement les défis sanitaires dans ces régions.
En raison de son âge et du manque de moyens de transport, il s’est contenté des soins prodigués par un médecin généraliste de la salle de soins, sans entreprendre des analyses approfondies. Les problèmes de santé ont émergé progressivement, et sa femme a rapporté qu’il souffre également du côlon irritable. Les médecins présents n’ont pas hésité à conseiller à sa femme d’adopter une communication ouverte et une approche psychologique pour éviter le stress.
Prise en charge globale et effective
Au cours de la tournée, un cas particulièrement alarmant a été identifié, nécessitant une évacuation immédiate à l’hôpital. Né en 1939, cet homme âgé était gravement déshydraté, au point de nécessiter une perfusion sur place. Sa famille ignorait la nature exacte de son mal, et il n’avait jamais été transféré à l’hôpital pour des analyses plus approfondies. «Il a besoin d’un bilan général, nous ne savons pas s’il souffre d’un problème rénal ou d’une autre affection. Il doit être évacué de toute urgence vers l’EH de Didouche Mourad», a confié un médecin sur place. Par ailleurs, un des praticiens de la salle de soins de cette localité a sollicité les services de la DSP pour effectuer des analyses sur une source naturelle que les habitants utilisent comme principale ressource d’eau potable. Bien que les habitations soient raccordées au réseau d’alimentation en eau potable (AEP), la population locale préfère consommer de l’eau minérale ou, la plupart du temps, celle provenant de cette source.
Malheureusement, quelques cas d’intoxication ont été signalés parmi les résidents, touchant notamment des enfants. Les médecins suspectent une altération de la qualité de l’eau. Concernant la prise en charge des malades découverts sur place, Lynda Boubguira, directrice de la santé et de la population (DSP), a affirmé à El Watan qu’«Elle sera effective dès cette même journée. Une hospitalisation sera mise en place, et pour les cas nécessitant une intervention chirurgicale, celle-ci sera programmée dans la semaine, avec les analyses et les radiographies nécessaires.» Elle a souligné que cela relève avant tout d’un devoir. «Lors de nos précédentes sorties, nous avons découvert des cas d’insuffisance rénale dont les patients ignoraient la pathologie, des malades en réanimation souffrant de déshydratation, des diabétiques nécessitant un suivi spécifique, ainsi que des personnes âgées et des enfants atteints de diverses pathologies, y compris des gangrènes et des troubles psychologiques», a-t-elle précisé.
Cinquante-trois zones ciblées
Il convient de rappeler que cette initiative s’inscrit dans la continuité du programme annuel visant à garantir une couverture sanitaire exhaustive pour les populations des zones reculées. L’objectif fondamental est d’offrir des services de santé de haute qualité. Cette seconde phase, qui s’étendra sur neuf jours, a débuté le 12 août et se prolongera jusqu’au 22 du même mois. Les activités de cette troisième édition ont été lancées sous le slogan : «Votre service est notre devoir, votre santé est notre responsabilité». Les zones ciblées par cette campagne couvrent 53 agglomérations réparties au sein de six communes de la wilaya, à savoir Messaoud Boudjeriou, El Khroub, Zighoud Youcef, Aïn Smara, Ibn Ziad et Aïn Abid.
À cet effet, la DSP a mobilisé six équipes médicales et paramédicales issues des établissements publics de santé de proximité, renforcées par des praticiens de diverses spécialités médicales en provenance des établissements publics hospitaliers de la wilaya de Constantine. Cela est dans le but de garantir une prestation de service sanitaire optimale et de rapprocher les soins de santé des citoyens. Cette phase offrira également l’opportunité d’organiser des campagnes de sensibilisation à destination des habitants de ces zones, portant sur les maladies liées à la saison estivale ainsi que sur les moyens de prévention.
«La programmation de cette seconde phase durant la saison estivale poursuit un double objectif», a précisé la DSP. Et de renchérir : «Il s’agit non seulement de prendre en charge les patients, mais aussi de sensibiliser sur les maladies saisonnières, telles que les pathologies à transmission hydrique, les intoxications alimentaires, les coups de soleil, et autres affections.»
L’originalité de cette phase réside dans la mission confiée aux établissements publics de santé, qui consiste à organiser une campagne de prévention et d’information à destination des résidents de ces zones, en étroite collaboration avec les représentants de la société civile. Cette coordination vise à garantir la réussite de cette phase et à maximiser le nombre d’examens médicaux effectués. Yousra Salem