Calixthe Beyala plaide pour la création des «Etats unis de l’Afrique»

29/10/2023 mis à jour: 00:09
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La romancière Calixthe Beyala au centre à droite de Benaouda Lebdaï / photo : El Watan

La romancière camerounaise Calixthe Beyala a plaidé, lors d’un débat sur «La pensée africaine ou l’affirmation de soi aux XXIe siècle», pour l’unification des Africains et a évoqué le nouveau panafricanisme porté par les jeunes.L’Algérie est un pays qui s’est toujours montré à la hauteur des défis. 

Je salue les autorités algériennes pour le sens du panafricanisme», a-t-elle dit lors de ce débat à l’Espace Afrique, au pavillon central du Palais des expositions des Pins maritime, à l’occasion du 26ème Salon international du livre d’Alger (SILA) qui se poursuit jusqu’au 4 novembre 2023. Selon elle, la pensée africaine s’est construite au le XIX ème  siècle par les premiers panafricanistes. «Une idéologie que nous avons tous récupérée et forgé une identité à travers ces penseurs qui nous ont précédé. 

Nous avons habité des pensées, celle de Cheikh Anta Diop et celle du panafricanisme. Au XXème siècle, la négritude est presque passée au second plan, même si elle est encore là», a-t-elle dit. «En ce XXIème siècle, l’Afrique se pense une, se pense États fédérés, nations fédérées. Les Européens, les Etats Unis, l’Australie, la France, la Grande Bretagne vont ensemble en guerre parce qu’ils constituent une nation. C’est une conscience que les Africains n’ont pas encore. Quand les pères fondateurs ont conçu l’Afrique, ils nous ont donné, pour les drapeau, le vert, le jaune et le rouge pour que nous devenions une nation. Tant que les Africains n’auront pas la conscience d’être une nation, il n’y a pas de pensée qui tienne. 

La pensée ne peut tenir que si nous en avons la conscience du nous. Nous, un et indivisible. Une conscience que nous devons avoir au-delà de nos cultures et de nos particularismes», a analysé l’auteur de «L’Homme qui m’offrait le ciel». Selon elle, le dirigeant libyen Mouammar El Kadhafi  avait le mieux porté  l’idée panafricaniste. «Il était maghrébin et toute l’Afrique était derrière lui. Nous ne pouvons pas créer une nation sans avoir des socles communs. Que l’Algérie au Cameroun, le Maroc à la Guinée et la Guinée au Mali ? Nous avons travaillé avec d’autres intellectuels sur le socle commun historique, architectural et humaniste. Notre espoir a été interrompu par l’assasinat de Kadhafi. La pensée semblait s’être arrêtée», a-t-elle regretté. «Depuis trente ans, nous parlons de la rupture avec le franc CFA» «Au tournant des années 2020-2021, nous avons vu une jeunesse africaine surgir. Depuis trente ans, nous parlons de la rupture avec le franc CFA. Dix neuf Etats, ex-colonies françaises, ne devaient plus utiliser cette monnaie.

 Nous nous sommes battus pour le départ des militaires français du continent africain. Nous avons eu l’impression de parler dans le vide. Les jeunes ont donné un coup de pied dans la fourmilière, n’ont pas fait de discours et décidé de pousser les militaires français vers la porte de sortie», a soutenu la romancière. Elle a estimé que les jeunes africains ont repris le discours laissé par les panafricanistes. «C’est là où vous voyez qu’il y a une construction de la pensée d’un peuple. C’est une continuité permanente avec le passage de relais entre générations. Donc, il n’y a pas de rupture. Il y a une réadaptation de la pensée du XIXème siècle à notre modernité. 

Les cassures dans la pensée sont un mauvais signe dans une civilisation. Malgré la souffrance et le désordre ambiant, les africains poursuivent la même ligne de conduite», a relevé Calixthe Beyala Elle a cité la réaction de colère des jeunes africains devant le président français Emmanuel Macron lors du sommet Afrique-France à Montpellier en octobre 2021.

 La preuve, selon elle, que l’idée panafricaniste est reprise par la nouvelle génération. «Nous sommes tous focalisés vers un objectif commun, la création des Etats unis d’Afrique. Ce projet peut commencer par trois Etats fédérés. Quel est le pays qui aura le courage d’être le moteur de ce projet. Nous recherchons un pays qui est tourné vers l’Afrique, pas vers l’Occident. Un pays qui va fédérer les autres. C’est cela l’affirmation de soi et c’est la reconnaissance de l’autre. L’affirmation de soi n’est pas contre l’autre, c’est la reconnaissance de ce que nous sommes. Nous avons à nous construire et à résister en acceptant que l’autre, différent, puisse exister à côté de nous. 

En Afrique, il n’existe pas de guerre de religions», a-t-elle soutenu Et d’ajouter : «nous vivons le miracle de cette Afrique qui bouge, qui demande le départ des soldats français, qui exige la fin du franc CFA...Cette Afrique qui demande sa souveraineté. 

C’est la nouvelle pensée africaine». Cette pensée est, d’après elle, confrontée aux individualismes. Comment ? «A chaque fois que vous avez un combat, il y a toujours des profiteurs qui tentent de le récupérer. C’est-à-dire qu’au moment où on demande le départ de la France, certains nous disent d’aller vers la Russie. Le combat panafricaniste n’est pas de changer un colonisateur par un autre. C’est l’Afrique aux africains en continuant à collaborer avec les autres», a-t-elle expliqué.

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