Burkina Faso : Des soldats se mutinent pour exiger le départ des chefs de l’armée

24/01/2022 mis à jour: 20:30
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Des soldats se sont mutinés hier dans plusieurs casernes du Burkina Faso pour réclamer le départ des chefs de l’armée et des «moyens plus adaptés» à la lutte contre les djihadistes qui frappent ce pays depuis 2015, rapporte l’AFP.

«Nous voulons des moyens adaptés à la lutte» anti-djihadiste «et des effectifs conséquents», ainsi que le «remplacement» des plus hauts gradés de l’armée nationale, indique, dans un enregistrement sonore, un militaire de la caserne Sangoulé Lamizana, sous le couvert de l’anonymat.

Il a en outre souhaité «une meilleure prise en charge des blessés» lors des attaques et des combats avec les djihadistes, ainsi que «des familles des défunts». Le militaire en question n’a pas réclamé le départ du président burkinabè, Roch Christian Kaboré, accusé par une grande partie de la population d’être «incapable» de contrer les groupes djihadistes.

Ces revendications ont été confirmées par d’autres sources militaires et des discussions ont été engagées l’après-midi entre des représentants des mutins et le ministre de la Défense, le général Barthélémy Simporé, selon une source gouvernementale. Des tirs ont été entendus à Gounghin provenant du camp Sangoulé Lamizana, situé à la sortie ouest de Ouagadougou.

Des tirs ont également été signalés dans un autre camp militaire de Ouagadougou, celui de Baba Sy, à la sortie sud de la capitale, et à la base aérienne proche de l’aéroport, selon des sources militaires. Des coups de feu sont aussi enregistrés dans des casernes de Kaya et Ouahigouya, dans le nord du pays.

L’internet mobile a été coupé dans la matinée. Le gouvernement a rapidement réagi en démentant une tentative de coup d’Etat.

«Des informations véhiculées sur les réseaux sociaux tendent à faire croire à une prise de pouvoir par l’armée en ce jour» de dimanche, a indiqué un communiqué du porte-parole du gouvernement, Alkassoum Maiga. «Le gouvernement, tout en reconnaissant l’effectivité de tirs dans certaines casernes, dément ces informations et appelle les populations à rester sereines», ajoute-t-il.

«Aucune institution de la République n’a pour le moment été inquiétée», a déclaré de son côté le ministre de la Défense, dans une intervention à la télévision nationale. Il a affirmé que les mouvements observés «dans quelques casernes» sont «localisés, circonscrits».

Fragilité

Une centaine de personnes ayant tenté de se rassembler place de la Nation, au centre de Ouagadougou, pour exprimer leur soutien au mouvement des soldats, ont été dispersées à coups de gaz lacrymogène par les policiers. Un peu plus tard dans la capitale, des manifestants ont incendié le siège du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), parti au pouvoir, ils ont ensuite été dispersés par la police à l’aide de gaz lacrymogène.

Le camp Sangoulé Lamizana abrite la Maison d’arrêt et de correction des armées (Maca) où est détenu le général Gilbert Diendéré, proche de l’ancien président Blaise Compaoré, renversé en 2014, et qui vit depuis en Côte d’Ivoire. Il est condamné à 20 ans de prison pour une tentative de putsch en 2015 et est actuellement jugé pour son rôle présumé dans l’assassinat de l’ancien président Thomas Sankara en 1987.

Samedi, des incidents ont éclaté à Ouagadougou et dans d’autres villes du pays entre les forces de l’ordre et des manifestants qui ont bravé l’interdiction de se rassembler pour protester contre l’impuissance des autorités à faire face aux violences des djihadistes. Comme le Mali et le Niger voisins, le Burkina Faso est confronté à des attaques attribuées à des groupes armés djihadistes, affiliés à Al Qaîda et au groupe Etat islamique.

Les attaques qui visent les civils et les militaires sont de plus en plus fréquentes et en grande majorité concentrées dans le nord et l’est du pays. Le 23 décembre, une embuscade de groupes armés visant un convoi de ravitaillement composé de civils et de Volontaires de défense pour la patrie (VDP, supplétifs de l’armée) dans la zone de You (nord), a fait 41 morts. Les violences des groupes djihadistes ont fait depuis près de sept ans plus de 2000 morts et contraint 1,5 million de personnes à fuir leurs foyers.

Plusieurs militaires sont détenus depuis mi-janvier pour des faits présumés de «tentative de déstabilisation des institutions». Parmi eux, le lieutenant-colonel Emmanuel Zoungrana, ex-chef de corps du 12e régiment d’infanterie commando, qui est jusque-là commandant du groupement des forces du secteur ouest, engagées dans la lutte antiterroriste. 

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