Il est écrivain et journaliste à la télévision publique espagnole (Tve). Professeur d’université et conférencier. Docteur en sociolinguistique et titulaire d’un master en journalisme et en sciences politiques. Décoré Chevalier des arts et des lettres et par la médaille du mérite. Bouziane Ahmed Khodja est le fondateur et le président du Parlement des écrivains de la Méditerranée à Madrid (Espagne).
- On vient de prendre connaissance de votre institution avec la remise du prix à Yasmina Khadra. Dans quelle circonstance a été créé le Parlement des écrivains de la Méditerranée ?
Notre Parlement réunit exactement 402 écrivains de plus d'une trentaine de nationalités. Des intellectuels, des influenceurs et des faiseurs d´opinion dans tous les pays méditerranéens. Il est né de la volonté de construire un réseau capable de communiquer non seulement avec les millions de lecteurs de ces auteurs, mais aussi pour inscrire dans l’esprit des institutions, un espace méditerranéen réel.
C´est-à-dire pas seulement géographique ou historique, mais aussi culturel, social, économique, politique et surtout humain, avec la nécessité affirmée de tenir compte de cet espace pour la construction d´un futur commun aux deux rives.
La Méditerranée, prise dans toute son étendue, forme un écosystème linguistique particulièrement riche et ancien. Trois continents, Afrique, Europe et Asie, sont baignés par la Méditerranée. Ses rivages ont attiré des peuples parlant différentes langues et professant diverses religions. La mer du milieu est le berceau de plusieurs civilisations qui ont marqué l´histoire de l´humanité.
- Quels sont les objectifs du Parlement des écrivains de la Méditerranée ?
Le siège du Parlement des écrivains de la Méditerranée est installé dans la capitale espagnole, Madrid. Mais notre rayon d´action est ample, on est présent dans plus de 22 pays. Si notre raison d´exister est en rapport avec le livre et le lecteur, nous sommes intiment persuadés que nous devons également être en rapport avec les institutions politiques supra nationales ; par exemple le Conseil de l´Europe avec lequel nous collaborons á travers plusieurs programmes, ainsi que des assemblées des élus, Sénats et autres organisations de l´ensemble de la Méditerranée. Comme tout citoyen méditerranéen, nous nous inscrivons dans une dynamique qui tourne autour de notions centrales, la guerre, la paix, les conflits, et notamment les conflits non résolus dans la région.
La paix ne sera réelle en Méditerranée que si toutes les énergies créent une sorte de catharsis, comme la définit le philosophe de la Grèce ancienne Aristote, comme une Purification des passions, une purgation des émotions. Nous luttons contre les inégalités sociales et économiques ; entre le Nord et le Sud.
Des réalités qui peuvent expliquer une partie des migrations. Nous concentrons nos efforts sur l’environnement, nous constatons que la Méditerranée est la mer la plus polluée du monde, comment pouvons-nous aider à lutter contre le réchauffement climatique ?
Bien sûr, nous apportons un regard particulier à la question des femmes et des jeunes ; lutter contre les discriminations, faciliter l’information, l’éducation et la mobilité. Finalement, notre objectif est de faciliter les échanges d’expérience et la connaissance entre les cercles décisionnels, car nous intervenons en tant qu´écrivains au sein des assemblées élues en Europe.
Il s’agit aussi de rendre visible le fait qu’il est possible de se réunir malgré nos différences et de faire des propositions communes à destination des institutions publiques. C´est pour cela que nous avons choisi le substantif de Parlement.
Un prix encore plus médiatisé avec, pour la première fois, les félicitations du président Tebboune à l’écrivain ; vous y attendiez-vous à cette reconnaissance, cette réussite ?
Non, ce n’est pas surprenant pour nous, cet hommage a été agréablement accueilli par le PEM et nous souhaitons que ce genre d´initiative soit réédité, car il contredit l´adage qui dit : «Nul n´est prophète en son pays.» En vérité, le débat a toujours existé sur l´attitude de nos gouvernants dans la région méditerranéenne en rapport avec la culture en général, on s´est souvent posés des questions, genre : en ont-ils ou pas ? la montrent-ils ou la cachent-ils ?
Sont-ils plutôt classiques, élitistes ou veulent-ils être folkloriques et totalement populaire ? La réponse nous est venue d´Alger. Et nous avons accueilli avec grande satisfaction ce message de félicitations du Président algérien á Yasmina Khadra, car en lui rendant hommage, ce sont tous les écrivains qui l´auront été.
- Vous écrivez en espagnol, ce n’est pas commun pour un Algérien, vous êtes auteur de Makeda qui rencontre un grand succès, mais pas lu en Algérie…
Vous savez, ce qui se dit olio en italien, se dit ladi en grec moderne, huile en français, et aceite en espagnol. Or, c’est d’un même fruit, dont les rives de la Méditerranée sont si riches, que tous ces mots proviennent : l’olive, qui se dit olea en latin, elaia en grec ancien et zitoun en arabe. L’olivier et les produits que l’on en tire font tellement partie du paysage méditerranéen que leur présence n´a pas de frontières entre les langues. Voilà qui les unit, mais pas seulement cela, car migrations, conquêtes et échanges ont aussi brassé populations et langues.
C’est ainsi que j´ai hérité d´une multitude de mots et expressions arabes pour m´exprimer en espagnol. Pour moi si les humains ont une histoire, les langues aussi. Si nos migrations nous permettent d’embrasser des langues et des cultures, les langues que nous utilisons nous permettent d´être des passeurs linguistiques, voire aussi des brasseurs de cultures.
J´ai choisi d´écrire en espagnol, pour le simple fait que je vis en Espagne mais aussi parce que en étant journaliste à la télévision espagnole, on devient forcément un homme public, vu et connu par des millions de téléspectateurs, je dirai même de millions d´hispanophones, car en Amérique du Sud, la télévision espagnole est très regardée.
C´est un capital de réputation qui m´a permis d´écrire en castellan et d´avoir un large public. Mon roman a été traduit au français et à l´italien, cette année, il le sera en arabe et en anglais. Je ne suis pas lu en Algérie pour la simple raison qu´aucun éditeur ne s´est manifesté pour le distribuer en Algérie. Mais beaucoup d´Algériens résident en Europe, m´ont lu.
- Il y a 18 ans, vous avez choisi de vous installer en Espagne, qu’est-ce qui a motivé ce choix ?
C´est une pointe de hasard combinée à une grande admiration de ce pays. La chaleur humaine, la sérénité, la tranquillité, la joie de vivre des Espagnols et leur accueil. Ils ne te demandent pas d´où tu viens, ni quelle religion tu professes ni pourquoi tu as décidé de vivre avec eux. Tu es un des leurs et c´est tout. Ces facteurs ont été déterminants dans mon choix. Evidemment, il y a aussi le climat et la beauté de ce pays, sans oublier le Real Madrid, que du bonheur quoi !
J´aimerais peut-être souligner un phénomène extraordinaire dans ce pays. Il n´y a pas de débat populaire sur l´immigration ni sur le voile ou l´Islam ni sur d´autres croyances, d´ailleurs. Dans les sondages d´opinion ni l´immigration, ni l´Islam, ni les Arabes ne sont relatés comme préoccupations pour les Espagnols. C´est extraordinaire, car l´Espagne démontre ainsi que c´est un pays civilisé humainement.
- Maintenant que vous êtes sous les projecteurs, c’est quoi votre prochain défi ?
(Rires). Je suis sous les projecteurs depuis bientôt une quinzaine d´années en Espagne, en Europe et Amérique latine. La magie de l´écran tv te projette sous les feux de la rampe et te fait accéder au statut d´un personnage public. Ainsi, tout ton travail devient un défi.
Chaque programme de télévision ou de radio est un jour nouveau pour moi. Chaque ligne de mes écrits, roman ou investigation, essai ou publication scientifique, est une nouvelle page dans ma vie ici en Europe. Je suis conférencier et j´enseigne les sciences politiques pour les doctorants á l´université, á Madrid et j´ai appris en dirigeant mon amphithéâtre ou les salles où je me produis, que l´usage de l´intelligence culturelle est fondamental.
Ce concept relativement récent désigne l´aptitude d´une personne à s´adapter lorsqu´elle agit avec un groupe de cultures différentes. Si c´était un défi dans le passé, aujourd´hui, elle ne l´est plus. Cette compétence est indispensable à acquérir quand on a l´ambition de diriger, quand on est issus d´une culture différente, en Europe, autrement dit, quand on est leader international. J´invite nos jeunes à s´initier á l´intelligence culturelle, afin qu´ils soient ainsi nos ambassadeurs dans toute la planète.
Présentation d’un florilège de nouvelles publications à l'Ambassade d’Azerbaïdjan
L’ambassade d’Azerbaïdjan en Algérie a organisé, jeudi à son siège, une rencontre culturelle au cours de laquelle un florilège de nouvelles publications portant sur l’histoire et la culture de ce pays, ainsi que sa vision d’avenir, ont été présentées.
L’ambassadeur de la République d’Azerbaïdjan en Algérie, Tural Rzayev, a présidé l’ouverture de cette soirée culturelle en présence d’un groupe d’enseignants et d’intellectuels ainsi que du représentant du ministère des Affaires étrangères, de la Communauté nationale à l’étranger et des Affaires africaines, et des représentants du corps diplomatique accrédité en Algérie.
Lors de cette rencontre, plusieurs nouveaux ouvrages publiés en Azerbaïdjan et en Algérie, portant sur l’histoire, la culture et la situation géopolitique de l’Azerbaïdjan, ont été présentées, dont les livres Histoire de la guerre nationale, facteur de la personnalité, Le leader Heydar Aliyev, fondateur de l’Azerbaïdjan moderne et Shusha, la forteresse de la musique azerbaïdjanaise.
A cette occasion, l’ambassadeur Rzayev a salué les relations bilatérales entre les deux pays, l’Algérie et l’Azerbaïdjan, affirmant que «les relations amicales et fraternelles qui nous unissent dans différents domaines connaissent un développement rapide».
Après avoir précisé que l’ambassade d’Azerbaïdjan «organise des rencontres culturelles et littéraires pour présenter des livres et projeter des films afin de renforcer ce rapprochement», le diplomate a exprimé «la gratitude de l’Azerbaïdjan à l’Algérie, qui nous a toujours soutenus dans le cadre des Nations unies, du Mouvement des non-alignés (MNA) et de l’Organisation de la coopération islamique (OCI)».