Le patrimoine culturel de la wilaya de Bouira est à l’abandon. Si les promesses d’une relance culturelle se sont multipliées au fil des années, la réalité sur le terrain est bien différente. Les salles de cinéma, les théâtres et même les nouvelles infrastructures censées renforcer le dynamisme artistique et culturel de la région sombrent dans une indifférence qui inquiète.
Ces lieux, jadis vivants et animés, sont aujourd’hui les témoins silencieux d’une négligence prolongée. La situation est d’autant plus préoccupante que certaines infrastructures, appartenant aux biens communaux, à l’image de la salle de cinéma Salah Saâdaoui du chef-lieu de wilaya, sont dans un état de délabrement avancé. Excepté la salle de cinéma de M’chedallah et du théâtre régional Amar Laskri, qui ont bénéficié d’opérations de restauration importantes, la majorité des structures sont dans un état critique. Un exemple particulièrement révélateur est celui de la salle Salah Saâdaoui, au centre-ville de Bouira.
Cette salle, autrefois lieu phare des projections cinématographiques, est aujourd’hui à l’abandon. Le carrelage décalé, les murs fissurés et l’absence de toute maintenance témoignent de l’ampleur des dégâts. Les riverains, autrefois habitués à fréquenter cet espace, n’ont plus que des souvenirs d’une époque où le cinéma était accessible à tous. La salle, pourtant située dans un endroit stratégique du centre-ville, est devenue un symbole de l’abandon culturel. Mais le constat ne s’arrête pas là.
Des infrastructures plus récentes, construites pour enrichir l’offre culturelle de la wilaya, sont tout aussi inexploitées. L’école régionale des beaux-arts de Bouira, fraîchement ouverte, aurait pu devenir un lieu incontournable pour la formation et l’épanouissement des jeunes talents de la région. Cependant, cette structure est toujours vide et inutilisée, faute de gestion et de mise en œuvre d’un projet éducatif cohérent. De même, le théâtre en plein-air de la ville de Bouira, une infrastructure qui aurait pu accueillir des spectacles, des représentations ou des festivals, reste à ce jour inexploité, malgré les investissements qui y ont été consacrés.
L’urgence d’un sursaut collectif
Le problème dépasse largement le simple manque de restauration. Il s’agit d’une défaillance structurelle dans la gestion des infrastructures culturelles, qui reflète une absence de vision à long terme. Ces espaces qui pourraient être des lieux de vie, d’échange et de création, sont laissés à l’abandon au détriment des habitants. Les jeunes, en particulier, souffrent de ce vide culturel qui limite leurs perspectives d’épanouissement. Au-delà des critiques, les solutions existent. Une relance des activités culturelles dans ces établissements pourrait être amorcée grâce à des partenariats entre les autorités locales, les associations et les acteurs privés.
Il s’agit de réhabiliter ces lieux, mais surtout de leur donner une vocation claire et adaptée aux besoins des habitants. «Par exemple, l’école régionale des beaux-arts pourrait offrir des cours ouverts au grand public et organiser des expositions régulières. Le théâtre en plein air pourrait accueillir des événements estivaux, des projections de films, ou encore des concerts.
Quant aux salles de cinéma comme celle de Salah Saâdaoui, leur réouverture permettrait de reconnecter la population avec le 7e art », préconise un artiste peintre. «Raviver la culture à Bouira ne se résume pas à restaurer des bâtiments. Cela implique une volonté et un engagement de tous les acteurs pour rendre ces lieux attractifs, accessibles et fonctionnels», recommande-t-il. L’enjeu est de taille.
Il s’agit non seulement de préserver un patrimoine en péril, mais aussi d’offrir à la population des espaces de partage, de créativité et d’évasion. La culture est un levier essentiel pour redynamiser la vie sociale et économique de la région. Ignorer ce potentiel, c’est tout bonnement la condamner à l’inertie.