Boom des minéraux critiques : Des opportunités mais aussi des risques pour les pays en développement

04/05/2024 mis à jour: 18:51
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De nombreux pays en développement disposent de grandes quantités terres rares, mais n’ont pas les capacités de les exploiter - Photo : D. R.

A en croire les projections de la Cnuced basées sur les données de l’Agence internationale de l’énergie, d’ici 2050, par exemple, la demande de lithium pourrait augmenter de plus de 1500%, avec des évolutions similaires pour le nickel, le cobalt et le cuivre.

La transition énergétique mondiale offre aux pays riches en minéraux la possibilité de renforcer leurs industries et de diversifier leurs économies, mais elle risque également d’aggraver leur dépendance à l’égard des produits de base, a indiqué hier un communiqué de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (Cnuced). Selon cet organe subsidiaire de l’Assemblée générale des Nations unies, la demande de minéraux essentiels à la transition énergétique, tels que le lithium, le cobalt et le cuivre pourrait être multipliée par près de quatre d’ici à 2030.

De nombreux pays en développement disposent de grandes quantités de ces minéraux, mais n’ont pas les capacités de traitement nécessaires pour générer de la valeur ajoutée. La Cnuced indique que la dépendance à l’égard des matières premières touche 66% des petits Etats insulaires en développement, 83% des pays les moins avancés et 85% des pays en développement sans littoral.

La demande mondiale en minerais indispensables aux technologies en lien avec les énergies renouvelable telles que celles contenues dans les panneaux solaires, les turbines éoliennes et les véhicules électriques (VE) augmente fortement.

A en croire les projections de la Cnuced basées sur les données de l’Agence internationale de l’énergie, d’ici 2050, par exemple, la demande de lithium pourrait augmenter de plus de 1500%, avec des évolutions similaires pour le nickel, le cobalt et le cuivre. Un boom de la demande qui met les pays en développement riches en minerais essentiels à la transition énergétique, face à des opportunités et des défis importants.

C’est le cas en particulier de ceux qui sont aux prises avec une dépendance à l’égard des produits de base - lorsque 60% ou plus des recettes d’exportation de marchandises d’un pays proviennent de matières premières. Cette dépendance entrave le développement économique et perpétue les inégalités et les vulnérabilités en Afrique subsaharienne, en Amérique du Sud, dans le Pacifique et au Moyen-Orient.

Elle touche actuellement 95 pays en développement, soit près de la moitié des pays membres des Nations unies. Au total, 29 des 32 pays avec un faible niveau de développement humain en 2021 sont dépendants des produits de base.

Près de 450 milliards de dollars d’investissement nécessaires d’ici 2030

Les investissements mondiaux dans les minéraux essentiels à la transition énergétique ne suivent pas la vertigineuse hausse de la demande. Les niveaux de production actuels ne permettent pas de répondre aux besoins pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C, conformément à l’Accord de Paris, estime le communiqué de la Cnuced.

Cette organisation dit recenser 110 nouveaux projets miniers dans le monde, d’une valeur de 39 milliards de dollars, dont 22 milliards de dollars investis dans 60 projets dans les pays en développement. Pourtant, ajoute-t-elle, pour atteindre les objectifs de zéro émission nette en 2030, l’industrie pourrait avoir besoin d’environ 80 nouvelles mines de cuivre, 70 nouvelles mines de lithium et de nickel chacune et 30 nouvelles mines de cobalt.

Les investissements nécessaires entre 2022 et 2030 se situent entre 360 et 450 milliards de dollars, ce qui pourrait laisser un déficit de 180 à 270 milliards de dollars. Les déficits les plus importants concernent le cuivre et le nickel, représentant respectivement 36% et 16% du déficit total.

Le continent africain possède plus d’un cinquième des réserves mondiales dans une douzaine de métaux essentiels à la transition énergétique, dont 19% de ceux nécessaires aux véhicules électriques. Mais pour tirer pleinement parti de leur richesse minérale, les pays en développement doivent aller au-delà du simple approvisionnement en minéraux bruts et progresser dans les chaînes de valeur, a-t-on relevé.

Éviter les pièges de la dépendance à l’égard des produits de base

Pour renforcer leurs secteurs industriels, diversifier leurs économies et redéfinir leurs rôles dans l’économie mondiale, les pays en développement riches en minerais essentiels à la transition énergétique doivent éviter les écueils du passé en matière de dépendance à l’égard des matières premières.

Dans le cas contraire, l’augmentation actuelle de la demande pour ces minéraux pourrait renforcer les dépendances aux matières premières, aggravant les vulnérabilités économiques alors que les bénéfices restent hors de portée des communautés et des entreprises locales, estime encore la même source.

La Cnuced, dénommée aussi ONU commerce et développement, plaide pour des contrats miniers et des licences d’exploration plus durables et plus transparents «afin de soutenir les industries nationales et de permettre aux entreprises locales des pays en développement de mieux participer à la chaîne de valeur des composants d’énergie renouvelable».

L’organisation souligne le rôle crucial du soutien mondial pour garantir l’accès aux investissements et aux technologies nécessaires. Les Nations unies, par exemple, ont un rôle-clé à jouer dans l’établissement de principes pour la production et le commerce équitables et durables des minéraux nécessaires à la transition énergétique.
 

 

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