La faculté de droit de l’université Frères Mentouri de Constantine a organisé un colloque international sur le bicamérisme parlementaire, sous le thème «Le bicamérisme parlementaire : place de l’expérience algérienne dans les systèmes comparés».
Vingt-huit années se sont écoulées depuis l’adoption du bicamérisme en Algérie, marquant la création d’une structure parlementaire à deux chambres – l’Assemblée nationale et le Sénat – née dans le contexte particulier des années 1991 à 1996. Cette réforme institutionnelle avait, à l’époque, répondu à un besoin pressant de renforcer la stabilité et d’assurer une représentation politique élargie.
Aujourd’hui, il semble opportun de réévaluer ce système, non pour le remettre en question, mais pour en optimiser le fonctionnement et en moderniser le cadre. Les différentes étapes de réformes successives du bicamérisme, menées en 2002, 2008, 2016 et 2020, témoignent d’une volonté continue d’adapter ce dispositif aux réalités politiques et sociales du pays.
Dans cette lignée, une analyse approfondie s’avère nécessaire afin de déterminer si des ajustements seraient bénéfiques pour le rendre plus efficient, tout en honorant son rôle fondamental de pilier de la démocratie et d’équilibre institutionnel. Dans cette optique, la faculté de droit de l’université Frères Mentouri de Constantine a organisé un colloque international sur le bicamérisme parlementaire, sous le thème «Le bicamérisme parlementaire : place de l’expérience algérienne dans les systèmes comparés.
Création, réalité et perspectives». Cet événement, qui a réuni de nombreux chercheurs algériens et des experts étrangers, a permis d’examiner en profondeur la trajectoire de cette expérience parlementaire algérienne. Le Professeur Lamine Cheriet, expert en droit et ancien sénateur, invité d’honneur, a félicité les organisateurs pour leur choix d’un sujet aussi important, peu abordé à travers les écrits ou dans les débats juridiques et constitutionnels.
Il a par ailleurs appelé à une réévaluation de ce système, pour opter à son amélioration, notamment face aux défis de la numérisation et aux évolutions mondiales. M. Cheriet a souligné certaines limites observées au niveau du Conseil de la nation, en relevant qu’il n’aurait pas pleinement exploité ses prérogatives législatives, y compris après les réformes de 2016, lesquelles lui avaient pourtant octroyé la faculté de proposer des projets de loi.
Selon lui, un réajustement, voire la révision de certaines dispositions du système bicaméral, serait souhaitable. Dr Dalila Ayachi, organisatrice de l’événement et spécialiste des institutions politiques et administratives, a pour sa part rappelé que le bicamérisme avait été mis en place dans un «contexte de transition politique», visant ainsi à assurer la continuité et la stabilité des institutions de l’Etat algérien.
Cependant, la question de revenir à un système monocaméral mérite réflexion. Sihem Abdennour, docteure en droit constitutionnel et administratif, estime que le contexte ayant initialement motivé la création d’une deuxième chambre a aujourd’hui évolué. Elle a rappelé que l’élargissement de la représentation populaire, par le biais de l’élection des deux tiers des membres du Conseil de la nation par les collectivités locales, répond à un besoin essentiel de renforcement démocratique.
Accroître les prérogatives des élus
Elle a toutefois précisé que le tiers présidentiel permet d’intégrer des compétences variées, couvrant des domaines cruciaux tels que l’économie, le social, et bien d’autres. Selon Mme Abdennour, ce mécanisme, malgré ses imperfections, vise un but stratégique : contribuer au développement économique et social du pays. En revanche, elle considère que la deuxième chambre fonctionne encore dans une dynamique qu’il serait possible d’actualiser. Pour assurer une meilleure représentativité et efficacité, elle suggère d’accroître les prérogatives de ses membres élus.
Mme Abdennour a aussi relevé que le maintien d’une chambre haute implique des coûts notables, une préoccupation qui suscite des débats dans d’autres pays où la présence d’une telle institution est perçue comme un investissement parfois superflu.
Selon elle, une solution pourrait consister à mobiliser cette chambre principalement en cas de crise politique ou d’incertitude institutionnelle, garantissant ainsi une continuité économique, sociale et juridique essentielle. Interrogée par El Watan sur les mécanismes de contrôle parlementaire de l’action gouvernementale, Mme Abdennour a indiqué que le pouvoir exécutif tend fréquemment à prendre le pas sur le législatif.
Elle a observé que ce contrôle, exercé par le Parlement, semble davantage symbolique que véritablement effectif. Lors de cette rencontre, Mohammed Abdallah Aljahwari, directeur de la recherche juridique au Conseil supérieur d’Oman et professeur associé de droit public, a fait savoir que le système parlementaire omanais présente des similitudes avec celui de l’Algérie, notamment en ce qui concerne la création d’une deuxième chambre en 1996.
Pour lui, cette structure bicamérale revêt une importance cruciale, car elle permet une participation populaire et favorise le développement durable dans le pays. Toutefois, il a souhaité l’introduction d’enquêtes parlementaires à Oman, un outil fondamental dans d’autres systèmes parlementaires.